Les députés britanniques votent pour la dépénalisation de l’avortement : une révolution historique au Royaume-Uni
Auteur: Jacques Pj Provost
Le Royaume-Uni vient de franchir un cap historique : les députés britanniques ont voté en faveur de la dépénalisation de l’avortement, mettant ainsi fin à plus de 160 ans de criminalisation. Cette décision, attendue et débattue depuis des années, marque un tournant majeur pour les droits des femmes en Angleterre et au Pays de Galles. Mais que signifie réellement ce vote ? Pourquoi suscite-t-il autant de réactions ? Plongée au cœur d’une réforme qui bouleverse la société britannique.
Une décision attendue depuis des décennies

Jusqu’à ce vote, l’avortement restait une infraction pénale en vertu d’une loi datant de 1861, héritée de l’ère victorienne. Les femmes risquaient jusqu’à la prison à perpétuité si elles avortaient hors du cadre légal, c’est-à-dire après 24 semaines de grossesse ou sans l’approbation de deux médecins. Cette situation, jugée archaïque par de nombreux défenseurs des droits humains, a conduit à des drames humains et judiciaires retentissants.
Des cas qui ont ému l’opinion publique
Le cas de Nicola Packer, une Britannique de 45 ans jugée après avoir avorté à 26 semaines sans savoir qu’elle dépassait le délai légal, a récemment bouleversé l’opinion. Après avoir accouché chez elle dans des conditions traumatisantes, elle a été dénoncée, arrêtée et poursuivie. Son acquittement n’a pas effacé le choc de voir une femme traînée devant la justice pour avoir tenté de gérer une situation désespérée. D’autres femmes, parfois victimes de fausses couches, ont également été soupçonnées, interrogées, voire poursuivies, illustrant la cruauté d’un système dépassé.
Le contenu du vote : ce qui change, ce qui ne change pas

La dépénalisation, mais pas la légalisation totale
Le vote du 17 juin 2025 à la Chambre des Communes a été sans appel : 379 voix pour, 137 contre. Désormais, plus aucune femme ne pourra être poursuivie pénalement pour avoir mis fin à sa grossesse, quel que soit le stade. Cette avancée concerne l’Angleterre et le Pays de Galles, où l’avortement restait jusqu’ici un crime en dehors du cadre médical strict.
Attention, le délai légal pour l’IVG n’est pas modifié : il reste fixé à 23 semaines et six jours. L’avortement au-delà de ce terme n’est autorisé que si la vie de la mère est en danger ou en cas de grave malformation du fœtus. Ce qui change, c’est que les femmes ne seront plus considérées comme des criminelles si elles dépassent ce délai. En revanche, toute personne aidant une femme à avorter hors du cadre médical reste passible de poursuites.
Un soutien massif, mais une société divisée
La réforme a été soutenue par une cinquantaine d’organisations : syndicats médicaux, associations féministes, cliniques spécialisées. Elles dénonçaient depuis longtemps le climat de peur et de honte qui entourait l’avortement, et les enquêtes traumatisantes menées contre des femmes vulnérables. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 100 femmes ont été visées par des enquêtes ou des poursuites ces cinq dernières années, parfois simplement après une fausse couche.
Cependant, la décision ne fait pas l’unanimité. Les groupes antiavortement dénoncent une « menace pour les enfants à naître » et craignent une banalisation de l’IVG. Le débat reste vif, mais la majorité des députés a choisi de placer la santé et la dignité des femmes au centre des priorités.
Un contexte international sous tension

Un message fort face aux reculs ailleurs dans le monde
Alors que de nombreux pays, notamment les États-Unis, connaissent des reculs en matière de droits reproductifs, le Royaume-Uni envoie un signal fort. Pour les défenseurs de l’IVG, cette dépénalisation est une réponse à l’urgence de protéger les femmes contre la stigmatisation et la criminalisation de leurs choix.
En Irlande du Nord, l’avortement n’a été dépénalisé qu’en 2019. L’Écosse, quant à elle, dispose de règles similaires à celles de l’Angleterre et du Pays de Galles. Ce vote britannique s’inscrit donc dans une dynamique européenne de reconnaissance des droits des femmes, même si chaque pays avance à son rythme.
Des témoignages poignants qui ont fait bouger les lignes
La députée travailliste Tonia Antoniazzi, à l’origine de l’amendement, a rappelé que la loi de 1861 avait été votée par un Parlement exclusivement masculin. Elle a souligné l’absurdité de voir des femmes arrêtées sur leur lit d’hôpital, alors qu’elles sont déjà en situation de détresse. Son combat, relayé par des médecins, des militantes et des citoyennes ordinaires, a permis de faire entendre la voix de celles qui n’osaient plus parler.
Quelles conséquences pour les femmes britanniques ?

Un soulagement, mais aussi de nouveaux défis
La fin de la criminalisation de l’avortement va soulager des milliers de femmes qui, jusqu’ici, vivaient dans la peur d’être dénoncées, arrêtées, voire emprisonnées. Cela va aussi permettre aux professionnels de santé d’accompagner leurs patientes sans crainte de poursuites. Mais la vigilance reste de mise : l’accès à l’IVG, notamment après 24 semaines, demeure très encadré et les débats sur la durée légale pourraient resurgir.
Pour les associations, l’enjeu est désormais d’améliorer l’accès à l’information, à la contraception et à un accompagnement psychologique de qualité. Car dépénaliser l’avortement, c’est aussi reconnaître la complexité des situations vécues par les femmes et leur droit à disposer de leur corps sans jugement.
Conclusion : une victoire pour les droits des femmes, un espoir pour l’avenir

La dépénalisation de l’avortement votée par les députés britanniques est une avancée majeure qui met fin à une injustice historique et offre enfin aux femmes la reconnaissance de leur autonomie. Ce vote est le fruit d’années de luttes, de témoignages courageux et d’une mobilisation sans précédent de la société civile. Il ne règle pas tous les problèmes, mais il ouvre la voie à une société plus juste, où la santé et la dignité des femmes sont enfin respectées. Un message d’espoir pour toutes celles qui, ailleurs dans le monde, continuent de se battre pour leurs droits fondamentaux.