Trump orchestre la reddition d’ottawa : la taxe numérique canadienne tombe, le grand jeu tarifaire commence
Auteur: Maxime Marquette
Le retrait de la taxe numérique : un geste dicté par la pression américaine
Le 30 juin 2025, le gouvernement canadien a annoncé l’annulation de la taxe sur les services numériques (TSN), une mesure qui devait cibler les géants américains du numérique comme Google, Apple, Meta ou Amazon. Cette décision n’est pas tombée du ciel : elle fait suite à une offensive diplomatique et commerciale sans précédent menée par Donald Trump. Depuis son retour à la Maison-Blanche, Trump avait tout anticipé, tout planifié. Il a d’abord qualifié la taxe canadienne de « coup direct et évident » contre les intérêts américains, puis menacé d’imposer des droits de douane massifs sur les importations canadiennes. Ottawa, déjà fragilisé par la multiplication des tarifs sur l’acier, l’aluminium, l’automobile et d’autres secteurs stratégiques, n’a pas tenu le choc. La TSN, qui devait entrer en vigueur le 1er juillet, a été suspendue à la dernière minute, les paiements gelés, et une mesure législative d’abrogation est déjà en préparation.
Le gouvernement de Mark Carney justifie ce recul par la nécessité de « faire progresser les négociations commerciales plus larges avec les États-Unis ». Mais derrière la langue de bois, c’est un aveu de faiblesse. Les discussions entre Ottawa et Washington avaient été brutalement interrompues par Trump, qui exigeait le retrait de la taxe comme condition préalable à toute reprise. La pression était immense : le président américain avait promis d’annoncer, sous sept jours, le niveau des nouveaux droits de douane imposés au Canada si la TSN était maintenue. Face à la menace d’une guerre commerciale totale, Ottawa a préféré céder. Les géants du web respirent, les lobbyistes américains jubilent, et le Canada s’incline devant la stratégie implacable de la Maison-Blanche.
Ce retrait marque la fin d’une illusion : celle d’un Canada capable de défendre sa souveraineté numérique et fiscale face à la première puissance mondiale. La TSN, adoptée en 2020 pour combler les lacunes fiscales et forcer les géants étrangers à contribuer aux finances publiques, n’aura été qu’une parenthèse. Désormais, Ottawa mise tout sur la reprise des négociations, espérant un accord commercial « mutuellement avantageux » d’ici le 21 juillet. Mais à quel prix ? Les concessions s’accumulent, la crédibilité s’effrite, et la dépendance vis-à-vis de Washington n’a jamais été aussi flagrante.
Trump, stratège du tarif : la guerre commerciale comme levier de domination

Depuis son retour au pouvoir, Donald Trump n’a jamais caché ses intentions : imposer une nouvelle ère de protectionnisme et de rapports de force brutaux avec tous les partenaires commerciaux des États-Unis, Canada en tête. Sa stratégie est simple : utiliser la menace tarifaire comme arme de négociation massive. Dès janvier 2025, il a multiplié les annonces de droits de douane : 25 % sur l’acier, 25 % sur l’aluminium, 10 % sur les hydrocarbures, et jusqu’à 50 % sur certaines importations stratégiques. À chaque fois, le message est le même : « Coopérez, ou payez le prix fort. » Le Canada, principal partenaire commercial des États-Unis, est en première ligne. Les secteurs de l’automobile, de l’agroalimentaire, du bois d’œuvre, tous sont visés. Les ripostes canadiennes existent, mais elles restent limitées, ciblées, incapables d’inverser la dynamique imposée par Washington.
Trump a parfaitement orchestré la séquence. Lorsqu’Ottawa a maintenu la TSN, il a immédiatement suspendu les négociations commerciales, accusant le Canada de « tricher » et de porter atteinte aux intérêts américains. Il a menacé d’imposer de nouveaux droits de douane, cette fois sur l’ensemble des importations canadiennes, avec un objectif affiché : atteindre un taux global de 30 % sur les échanges bilatéraux. Cette perspective, inédite depuis la Seconde Guerre mondiale, a semé la panique à Ottawa et dans les milieux d’affaires. Les industriels, les exportateurs, les syndicats ont tous tiré la sonnette d’alarme : une telle guerre tarifaire serait dévastatrice pour l’économie canadienne, déjà fragilisée par la hausse des coûts et la volatilité des marchés mondiaux.
Mais pour Trump, c’est un calcul gagnant. Il sait que le Canada ne peut pas se passer du marché américain : près de 75 % des exportations canadiennes traversent la frontière sud. En brandissant la menace tarifaire, il force Ottawa à céder sur tous les dossiers sensibles : fiscalité numérique, normes environnementales, quotas agricoles, et bientôt, peut-être, sur la gestion de l’offre ou la protection des données. La Maison-Blanche veut un accord global, mais à ses conditions. La TSN n’était qu’un prétexte, un test de résistance. Le Canada a échoué. Trump jubile, les négociateurs américains dictent le tempo, et l’équilibre commercial nord-américain bascule vers une domination sans partage de Washington.
La « renaissance manufacturière » : promesse ou mirage pour le Canada ?

Dans ce contexte tendu, l’ancien secrétaire au commerce de Trump, Robert Lighthizer, a tenté de rassurer les Canadiens. Selon lui, la guerre commerciale déclenchée par la Maison-Blanche finira par « bénéficier autant au Canada qu’aux États-Unis » grâce à une « renaissance manufacturière ». L’idée est simple : en imposant des droits de douane élevés sur les importations chinoises, mexicaines et européennes, Washington force les industriels à relocaliser leurs usines en Amérique du Nord. Le Canada, partenaire privilégié, devrait en profiter, voir renaître ses filières industrielles, créer des emplois, attirer des investissements. C’est le grand pari du protectionnisme trumpiste : sacrifier la mondialisation pour rebâtir une industrie forte, indépendante, capable de rivaliser avec les géants asiatiques.
Mais cette promesse est loin d’être garantie. D’abord, parce que la dépendance du Canada vis-à-vis des chaînes d’approvisionnement mondiales reste massive. Les pièces, les composants, les matières premières traversent les frontières des dizaines de fois avant d’être assemblés. Imposer des droits de douane de 30 % sur ces flux, c’est risquer de casser la machine, de renchérir les coûts, de rendre les produits canadiens moins compétitifs. Ensuite, parce que les investissements promis tardent à se concrétiser. Les industriels hésitent, attendent la fin de l’incertitude, redoutent les représailles européennes ou asiatiques. Enfin, parce que la « renaissance » manufacturière ne profite pas à tous : certains secteurs, comme l’automobile ou l’agroalimentaire, sont plus exposés que d’autres, et risquent de perdre plus qu’ils ne gagnent.
Pour Ottawa, le dilemme est cruel. Faut-il accepter les conditions de Washington, espérer un retour des usines et des emplois, au risque de sacrifier la souveraineté et la diversité économique ? Ou faut-il résister, défendre ses propres intérêts, quitte à affronter une guerre commerciale longue et coûteuse ? Pour l’instant, le choix est fait : la TSN tombe, les négociations reprennent, et la promesse d’une « renaissance » industrielle sert de justification à une politique de concessions en série. Mais les doutes persistent, les inquiétudes grandissent, et la confiance s’effrite.
Le Canada face à ses contradictions : souveraineté, dépendance et choix impossibles

La crise de la TSN révèle une vérité brutale : le Canada, malgré ses ambitions, reste profondément dépendant des États-Unis. Cette dépendance n’est pas nouvelle, mais elle s’est accentuée avec la montée des tensions commerciales, la multiplication des barrières tarifaires et la volatilité des marchés mondiaux. Ottawa peut bien parler de souveraineté numérique, de justice fiscale, d’autonomie stratégique : au moindre coup de semonce de Washington, la marge de manœuvre s’effondre. La TSN, pourtant conçue comme un outil de rééquilibrage, a été sacrifiée en quelques jours, sans résistance, sans débat public, sans plan B.
Cette situation pose des questions de fond. Peut-on encore parler de souveraineté économique quand 75 % des exportations dépendent d’un seul partenaire ? Peut-on imposer des règles fiscales à des géants mondiaux quand le voisin du sud menace de fermer la frontière ? Peut-on défendre l’innovation, la culture, la justice sociale, quand chaque avancée se paie d’une concession sur un autre dossier ? Pour Ottawa, la réponse semble être non. La stratégie actuelle, c’est la survie : céder sur la fiscalité pour sauver l’automobile, abandonner la régulation numérique pour préserver l’agroalimentaire, sacrifier la diversité pour garder l’accès au marché américain.
Mais cette logique a ses limites. À force de reculer, le Canada risque de perdre ce qui fait sa spécificité : sa capacité à innover, à protéger ses citoyens, à défendre ses valeurs. Les partenaires internationaux observent, les investisseurs s’interrogent, les citoyens doutent. La TSN n’est qu’un exemple parmi d’autres : demain, ce sera la protection des données, la régulation de l’intelligence artificielle, la défense de la culture locale. À chaque fois, la tentation sera grande de céder, de reculer, d’abandonner les principes pour préserver la relation avec Washington. Mais à quel prix ?
La souveraineté sacrifiée, l’avenir en suspens

Un Canada à la croisée des chemins : résignation ou sursaut ?
Le retrait de la taxe sur les services numériques marque un tournant dans l’histoire économique et politique du Canada. C’est la preuve éclatante que, face à la puissance de Washington et à la stratégie implacable de Donald Trump, Ottawa n’a pas su, ou pas pu, défendre ses choix. Les négociations commerciales reprennent, mais la dynamique a changé : le Canada négocie en position de faiblesse, contraint de céder pour préserver l’essentiel. La promesse d’une « renaissance manufacturière » sert de justification, mais les risques sont immenses : perte de souveraineté, dépendance accrue, fragilisation de l’innovation et de la justice sociale.
Pourtant, tout n’est pas joué. Cette crise peut aussi être un électrochoc, une invitation à repenser la stratégie nationale, à diversifier les partenariats, à investir dans l’autonomie, à défendre plus fermement les intérêts du pays. La souveraineté n’est pas un slogan, c’est un combat de chaque instant, une capacité à résister, à inventer, à s’adapter. Le Canada a les ressources, les talents, la créativité pour relever le défi. Mais il faudra du courage politique, de la vision, de la détermination. La reddition n’est pas une fatalité. L’avenir reste à écrire.