Afrique, invités triés sur le volet à la maison blanche : Trump joue son va-tout
Auteur: Jacques Pj Provost
Un silence pesant, une tension palpable, la Maison Blanche s’ouvre aujourd’hui à une poignée de dirigeants africains, cinq sur cinquante-cinq, triés, sélectionnés, presque arrachés à la masse. Donald Trump orchestre ce qu’il nomme un « sommet de la dernière chance », mais derrière les dorures, l’urgence gronde. L’Afrique, continent immense, mosaïque de douleurs et de richesses, se retrouve réduite à une poignée de mains serrées dans le bureau ovale. Les projecteurs sont braqués sur Gabon, Guinée-Bissau, Liberia, Mauritanie et Sénégal : pourquoi eux ? Pourquoi maintenant ? La réponse, brute, crue, tient en un mot : urgence. Urgence diplomatique, urgence économique, urgence existentielle. Derrière les sourires crispés, les enjeux sont titanesques : sécurité, minerais, commerce, survie. La scène est dressée, le rideau se lève, mais l’Afrique entière n’a pas été invitée au festin. Et déjà, dans les couloirs, on murmure que ce sommet n’est pas une main tendue, mais un pari risqué, un jeu d’influence où chaque mot pèse une vie, chaque omission une trahison.
Trump, l’Afrique et la nouvelle doctrine du donnant-donnant

Un sommet sous tension, cinq pays et des millions d’absents
Ils sont cinq. Cinq à franchir le seuil de la Maison Blanche ce 9 juillet 2025, alors que le reste du continent observe, sidéré, la porte se refermer. Trump a choisi : pas de Nigeria, pas de Afrique du Sud, pas d’Égypte, pas d’Ethiopie. Les géants sont absents, les invités sont des « petits » : Gabon, Guinée-Bissau, Liberia, Mauritanie, Sénégal. Un choix qui interroge, qui choque, qui bouscule. Pourquoi eux ? Parce qu’ils sont, dit-on, « dociles », « accessibles », « stratégiques ». Parce qu’ils ne sont pas alignés avec la Chine, ni avec la Russie, ni avec les « anti-américains ». Parce qu’ils sont, pour Trump, des « fruits mûrs » à cueillir dans la guerre froide économique qui s’intensifie sur le continent africain.
Fin de l’aide, début du business : le virage radical
Le mot est tombé, sec, définitif : USAID est dissoute. Fini la charité, place à l’échange. Trump l’a martelé : « L’aide, c’est fini. Commerce, ou rien. » Les ambassadeurs américains en Afrique seront désormais jugés au nombre de contrats signés, pas à la qualité des réformes démocratiques. Les ONG s’étouffent, les économistes s’alarment, mais la doctrine est claire : « On aide ceux qui s’aident eux-mêmes. » Les invités du jour l’ont compris, ils jouent le jeu, ils sourient, mais derrière les sourires, la peur. Peur de disparaître des radars, peur de perdre les derniers filets de sécurité, peur de voir la famine, la maladie, la violence, tout ce que l’aide contenait à grand-peine, déferler à nouveau.
Le spectre de la famine, l’ombre de la mort
Les chiffres claquent comme des gifles. Plus de quatorze millions de morts supplémentaires d’ici 2030, dont 4,5 millions d’enfants, selon les projections. La suppression de l’aide américaine n’est pas un détail, c’est une bombe à retardement. Les dirigeants invités savent, ils voient, ils sentent la colère monter dans leurs rues, l’angoisse dans les regards. Le sommet promet des contrats, des investissements, mais la réalité, c’est que l’Afrique, privée d’aide, vacille. Les hôpitaux ferment, les écoles se vident, les routes s’effondrent. Et dans les coulisses, la Chine et la Russie avancent leurs pions, prêts à combler le vide.
La diplomatie du minéral, la géopolitique du vide

Minerais stratégiques, appétits américains
Le mot est sur toutes les lèvres : minerais. Lithium, cobalt, manganèse, or, pétrole. La nouvelle ruée vers l’or se joue en Afrique, et Trump ne veut pas laisser la Chine rafler la mise. Les cinq pays invités ne sont pas les plus riches en minerais, mais ils sont stratégiquement placés, sur la façade atlantique, loin des zones d’influence chinoises. L’objectif : sécuriser des approvisionnements, signer des accords, verrouiller des marchés. Les négociations sont âpres, les promesses nombreuses, mais la réalité, c’est que l’Amérique ne vient plus offrir, elle vient prendre. Prendre ce qui reste, ce qui n’est pas encore sous contrôle russe ou chinois. Et l’Afrique, encore une fois, se retrouve terrain de chasse, proie plus que partenaire.
Guerre d’influence, la Russie et la Chine en embuscade
À peine les portes de la Maison Blanche refermées que la Russie et la Chine répliquent. Moscou annonce de nouveaux accords militaires avec des pays du Sahel, Pékin multiplie les investissements, les prêts, les infrastructures. L’Afrique devient champ de bataille, pièce maîtresse d’un échiquier mondial où chaque pion compte. Les dirigeants africains, eux, oscillent, balancent, négocient. Ils savent que le vent peut tourner, qu’un faux pas peut coûter cher. L’instabilité gagne, la peur s’installe, et les populations, elles, n’ont plus le luxe d’attendre.
Des deals, mais pour qui ?
Les contrats signés aujourd’hui profiteront-ils aux populations ? Rien n’est moins sûr. Les précédents abondent : infrastructures fantômes, promesses non tenues, ressources pillées, populations déplacées. Les ONG tirent la sonnette d’alarme : sans contrôle, sans transparence, ces nouveaux accords risquent de reproduire les mêmes schémas, d’enrichir une élite, de laisser la majorité sur le carreau. Les dirigeants invités promettent des emplois, des écoles, des hôpitaux, mais sur le terrain, la réalité est plus crue. Les populations attendent, espèrent, désespèrent. Et la Maison Blanche, elle, referme ses portes, satisfaite d’avoir « fait affaire ».
La sécurité, prétexte ou priorité ?

Le Sahel, la poudrière oubliée
Le mot « sécurité » revient en boucle dans les communiqués. Les cinq pays invités sont en première ligne face à la menace djihadiste, à la violence, à la déstabilisation. Le Sahel brûle, les groupes armés progressent, les États vacillent. Trump promet de l’aide, mais pas sous forme de dons : il propose des partenariats, des ventes d’armes, des formations. Les populations, elles, attendent la paix, la stabilité, la fin de la peur. Mais la sécurité, à la sauce américaine, ressemble de plus en plus à une affaire de gros sous, de contrats militaires, de surveillance accrue. Et le sentiment d’abandon grandit, chez ceux qui n’ont pas été invités, chez ceux qui voient leur sort se jouer sans eux.
L’exclusion, nouvelle norme diplomatique
Le choix des invités n’est pas anodin. Les grands absents – Nigeria, Afrique du Sud, Égypte – sont ceux qui contestent, qui négocient, qui s’opposent. Trump ne veut plus de partenaires récalcitrants, il veut des alliés dociles, prêts à signer sans discuter. Cette diplomatie de l’exclusion inquiète, elle fracture le continent, elle isole les plus faibles, elle renforce les divisions. Les analystes parlent de « pari risqué », de « stratégie de la tension ». Sur le terrain, la réalité est plus crue : certains pays se sentent abandonnés, d’autres menacés, tous fragilisés.
Le prix humain de la realpolitik
Derrière chaque décision, il y a des vies. Les coupes budgétaires, les accords militaires, les exclusions diplomatiques ont un prix : celui du sang, de la souffrance, de la mort. Les ONG alertent, les médecins témoignent, les familles pleurent. Mais la realpolitik n’a que faire des larmes, elle avance, implacable, sûre d’elle. Et l’Afrique, une fois de plus, paie le prix fort d’une guerre qui ne dit pas son nom.
Les voix étouffées, l’Afrique qui résiste

Des sociétés civiles en ébullition
Dans les rues de Dakar, de Monrovia, de Libreville, la colère monte. Les sociétés civiles, longtemps tenues à l’écart, prennent la parole, manifestent, dénoncent. Elles refusent d’être réduites à des chiffres, à des variables d’ajustement. Elles exigent des comptes, réclament des droits, interpellent leurs dirigeants. Mais la répression guette, la peur rôde, et la tentation du repli est forte. Pourtant, partout, des voix s’élèvent, des mouvements naissent, des solidarités se tissent. L’Afrique n’est pas passive, elle résiste, elle invente, elle lutte.
La diaspora, force vive ou mirage ?
La diaspora africaine, forte de millions de membres, observe, analyse, s’inquiète. Beaucoup rêvent de retour, d’investissement, de participation. Mais la réalité est rude : les obstacles administratifs, les risques, les incertitudes freinent les élans. Les politiques migratoires américaines, de plus en plus restrictives, compliquent la donne. Les promesses de partenariat, de business, de prospérité partagée, peinent à convaincre. Mais la diaspora ne renonce pas, elle s’organise, elle innove, elle garde l’espoir d’un avenir meilleur.
Femmes et jeunes, oubliés du sommet
Parmi les invités, aucun représentant de la jeunesse, aucune voix féminine. Pourtant, ce sont elles, ce sont eux, qui font battre le cœur de l’Afrique. Elles créent, elles entreprennent, elles soignent, elles enseignent. Ils inventent, ils contestent, ils rêvent. Mais dans les salons feutrés de la Maison Blanche, leurs voix ne portent pas. L’exclusion est double, triple, totale. Et pourtant, sur le terrain, ce sont eux qui tiennent, qui avancent, qui changent, parfois, la donne.
Le grand jeu, l’Afrique face à l’histoire

Un continent sous surveillance
Jamais l’Afrique n’a été autant scrutée, analysée, convoitée. Les satellites américains, chinois, russes surveillent, les agences de renseignement écoutent, les multinationales cartographient chaque ressource, chaque faille, chaque opportunité. L’Afrique, immense, diverse, complexe, se retrouve réduite à des cartes, à des graphiques, à des tableaux Excel. Mais la réalité, elle, échappe, déborde, surprend. Les crises s’enchaînent, les solutions manquent, les risques explosent. Et au centre de ce maelström, les populations, elles, tiennent bon, inventent, résistent.
La mémoire des humiliations
L’histoire pèse, lourde, écrasante. Colonisation, pillages, guerres, famines, épidémies. L’Afrique porte les stigmates de siècles de violences, d’exclusions, de trahisons. Le sommet de la Maison Blanche n’est qu’un épisode de plus, une humiliation de plus, diront certains. Mais d’autres y voient une opportunité, un sursaut, une chance de reprendre la main. La mémoire n’est pas un fardeau, elle est une force, une boussole, un rappel. Rien n’est jamais acquis, tout est toujours à refaire.
Vers une nouvelle ère ?
Le sommet s’achève, les contrats sont signés, les photos circulent. Mais l’avenir reste incertain. L’Afrique, forte de ses contradictions, de ses blessures, de ses espoirs, continue d’avancer. Rien n’est écrit, tout reste possible. Les défis sont immenses, les dangers réels, mais la vitalité, l’énergie, la créativité du continent sont intactes. Peut-être qu’un jour, enfin, l’Afrique ne sera plus l’invitée, mais l’hôte. Peut-être qu’un jour, elle imposera ses règles, ses priorités, ses rêves. Ce jour-là, la Maison Blanche devra ouvrir grand ses portes. Et écouter.
Conclusion : sortir du huis clos, ouvrir les fenêtres

Le sommet de la Maison Blanche s’achève, les lumières s’éteignent, la tension retombe. Mais l’Afrique, elle, ne dort pas, ne se tait pas, ne se résigne pas. Elle invente, elle résiste, elle avance. L’urgence est là, brûlante, vitale. Il ne s’agit plus de deals, de contrats, de photos. Il s’agit de vies, de rêves, d’avenir. Le huis clos diplomatique ne tiendra pas éternellement. Les fenêtres finiront par s’ouvrir, les voix par se faire entendre. Et ce jour-là, l’Afrique ne demandera plus la permission d’entrer. Elle sera déjà là, debout, fière, incontournable.