Qui nous défendra ? L’Occident face au vertige de la double menace russe et chinoise
Auteur: Maxime Marquette
12 juillet 2025. Les conversations bruissent d’inquiétude, de jugements, d’accusations. On critique les États-Unis, on s’indigne des droits de douane, on moque la brutalité de Trump, on s’inquiète de la montée du populisme. Mais derrière cette tempête de reproches, une question obsédante, presque taboue, s’insinue : qui, demain, sera prêt à nous défendre ? Lorsque la Russie massera ses chars à l’est, lorsque la Chine déploiera ses navires à l’ouest, lorsque l’ombre d’un conflit sur deux fronts deviendra réalité, qui tiendra la ligne ? L’Europe, si fière de son modèle, si sûre de sa morale, n’a jamais semblé aussi vulnérable, aussi dépendante de ce géant américain qu’elle adore détester. Ce paradoxe, cette peur, cette urgence, je veux la nommer, la disséquer, la vivre, sans détour, sans filtre. Parce que ce qui se joue, ce n’est pas seulement une histoire de tarifs ou de tweets, c’est la survie d’un monde, d’une idée, d’une promesse.
La tempête tarifaire : le divorce transatlantique

Les tarifs américains : une onde de choc mondiale
Le 12 juillet, la nouvelle tombe comme un couperet. Trump annonce des droits de douane de 30 % sur les produits européens et mexicains. Les marchés s’affolent, l’euro plonge, le peso s’effondre. Les industriels crient à la trahison, les diplomates s’indignent, les agriculteurs manifestent. Mais derrière la colère, une réalité s’impose : l’Amérique n’est plus ce partenaire fiable, prévisible, protecteur. Elle défend d’abord ses intérêts, ses emplois, sa sécurité. Elle impose ses règles, sans égard pour les alliances, pour l’histoire, pour les sacrifices partagés. L’Europe, sidérée, découvre sa dépendance : sans accès au marché américain, sans la garantie de la protection militaire, que reste-t-il ? Un sentiment d’abandon, de vulnérabilité, de solitude.
La fracture morale : juger sans agir
Les débats s’enflamment dans les parlements, sur les plateaux télé, dans les dîners mondains. On juge, on condamne, on ironise sur l’Amérique de Trump, sur ses excès, ses contradictions, ses outrances. Mais derrière la posture morale, que fait-on ? L’Europe, forte de ses principes, de ses valeurs, de son droit, multiplie les communiqués, les sanctions, les rappels à l’ordre. Mais sur le terrain, la réalité est plus crue : sans puissance militaire, sans autonomie stratégique, la morale devient un luxe, une distraction, une illusion. Les adversaires le savent, le sentent, en jouent. La Russie avance, la Chine s’impose, l’Amérique hésite, l’Europe s’interroge.
Des alliances fragilisées, une solidarité fissurée
L’OTAN, longtemps pilier de la sécurité occidentale, vacille. Les budgets militaires stagnent, les divergences explosent, les promesses s’effritent. L’Allemagne hésite, la France temporise, la Pologne s’inquiète, les pays baltes supplient. Les États-Unis, las de « payer pour les autres », conditionnent leur soutien, exigent des contreparties, menacent de se retirer. Le parapluie nucléaire, jadis sacré, devient un instrument de chantage, de marchandage. La solidarité, si forte en 2022, s’érode sous le poids des crises, des égoïsmes, des peurs. L’Europe, face à la tempête, se découvre nue, exposée, sans filet.
La double menace : Russie à l’est, Chine à l’ouest

La Russie : l’art de la guerre hybride
Depuis l’invasion de l’Ukraine, la Russie a perfectionné ses méthodes : cyberattaques, désinformation, sabotages, pressions énergétiques. Les frontières de l’OTAN sont sous tension : Lituanie, Estonie, Lettonie, Pologne, toutes redoutent un « incident », une provocation, un prétexte. Les troupes russes, massées à Kaliningrad, en Biélorussie, multiplient les exercices, les incursions, les démonstrations de force. Les services de renseignement occidentaux alertent : la Russie prépare, teste, évalue la résilience de l’Alliance. L’objectif : diviser, épuiser, démoraliser, avant même le premier coup de feu. L’Europe, consciente du danger, peine à s’organiser, à réagir, à parler d’une seule voix.
La Chine : le rouleau compresseur asiatique
À l’autre bout du monde, la Chine muscle son jeu. Les manœuvres autour de Taïwan se multiplient : 31 avions, 7 navires, des exercices de débarquement, des cyberattaques, des blocus simulés. Pékin teste la patience, la détermination, la cohésion de l’Occident. Les alliés du Pacifique – Japon, Corée du Sud, Australie – s’inquiètent, se réarment, multiplient les alliances, mais redoutent d’être abandonnés, sacrifiés. La Chine, forte de sa puissance économique, de son influence diplomatique, avance ses pions, tisse ses réseaux, impose ses règles. L’Europe, fascinée, inquiète, hésite : faut-il s’aligner, résister, négocier ? Le dilemme est cruel, insoluble, dangereux.
Le spectre de la guerre sur deux fronts
Le scénario tant redouté prend forme : une attaque russe à l’est, une offensive chinoise à l’ouest, une Amérique contrainte de choisir, de répartir ses forces, de prioriser ses intérêts. Les stratèges parlent de « dilution de la puissance », de « risque d’effondrement du parapluie sécuritaire ». Les alliés s’inquiètent : que fera Washington si Moscou et Pékin frappent simultanément ? Qui défendra l’Europe, qui protégera l’Asie ? Les réponses manquent, les certitudes vacillent, la peur grandit. L’équilibre du monde, patiemment construit depuis 1945, vacille, menacé d’implosion.
L’Europe face à l’épreuve : puissance ou impuissance ?

L’autonomie stratégique, mirage ou nécessité ?
Depuis des années, les dirigeants européens parlent d’« autonomie stratégique ». Mais sur le terrain, les progrès sont lents, laborieux, fragmentés. Les budgets militaires peinent à décoller, les industries de défense restent nationales, les doctrines divergent. L’Allemagne hésite à livrer des chars, la France défend sa dissuasion nucléaire, l’Italie temporise, l’Espagne s’interroge. Les projets communs, comme le SCAF ou le MGCS, avancent à pas de tortue. L’Europe, géant économique, reste un nain militaire, dépendant du parapluie américain pour sa sécurité. Les adversaires le savent, en jouent, en profitent.
La tentation du repli, le risque de l’isolement
Face à la montée des menaces, certains prônent le repli, la neutralité, la négociation à tout prix. Les débats sur l’élargissement de l’OTAN, sur l’accueil de l’Ukraine, de la Géorgie, divisent, fracturent, paralysent. Les opinions publiques, fatiguées, inquiètes, doutent de la pertinence des engagements, redoutent l’escalade, la guerre totale. Les partis populistes, nationalistes, surfent sur la peur, promettent la paix, l’ordre, la stabilité. Mais l’histoire montre que le repli n’est jamais une garantie, que l’isolement est un leurre, une illusion dangereuse. L’Europe, si elle veut survivre, devra choisir : puissance ou impuissance, solidarité ou solitude.
Les fissures de la solidarité européenne
La crise ukrainienne a révélé les failles, les tensions, les rivalités au sein de l’Union. Les pays baltes réclament des troupes, la Pologne exige des garanties, la Hongrie bloque, l’Italie négocie, la France et l’Allemagne s’opposent. Les sanctions contre la Russie divisent, les livraisons d’armes traînent, les budgets stagnent. La solidarité, si forte en 2022, s’effrite sous le poids des crises, des égoïsmes, des calculs politiques. L’Europe, face à la menace, peine à parler d’une seule voix, à agir avec détermination, à incarner la puissance qu’elle revendique.
Les États-Unis : allié critiqué, allié indispensable

Le paradoxe américain : force et imprévisibilité
Les États-Unis fascinent, inquiètent, irritent. Leur puissance militaire reste sans égale : 800 bases dans le monde, 11 porte-avions, un budget de défense de 900 milliards de dollars. Mais leur politique, sous Trump, est devenue imprévisible, transactionnelle, conditionnelle. L’Amérique défend ses intérêts, ses frontières, ses emplois. Elle exige des alliés qu’ils « paient leur part », qu’ils s’alignent, qu’ils obéissent. Les Européens, habitués à la protection gratuite, découvrent le coût de la sécurité, la réalité du rapport de force. Les critiques fusent, mais la dépendance demeure. Sans l’Amérique, l’Europe est nue, vulnérable, exposée.
La tentation du désengagement
La tentation du repli, du « America First », gagne du terrain. Les débats sur l’OTAN, sur l’aide à l’Ukraine, sur la défense de Taïwan, divisent le Congrès, polarisent l’opinion, fragilisent les alliances. Trump menace de retirer les troupes, de couper les aides, de négocier directement avec Moscou, avec Pékin. Les alliés s’inquiètent, multiplient les visites, les promesses, les concessions. Mais l’incertitude demeure : que fera Washington si la Russie et la Chine frappent en même temps ? Qui, demain, prendra le risque, paiera le prix, assumera la responsabilité de la défense de l’Occident ?
Le dilemme de la crédibilité
La crédibilité américaine est en jeu. Si Washington recule, hésite, abandonne un allié, le signal sera dévastateur : pour l’Europe, pour l’Asie, pour le monde. Les adversaires testeront, provoqueront, avanceront. Les alliés douteront, hésiteront, chercheront d’autres protecteurs, d’autres solutions. L’ordre mondial, fondé sur la dissuasion, la solidarité, la confiance, vacillera, menacé d’effondrement. Les États-Unis, critiqués, moqués, détestés, restent pourtant le dernier rempart, la dernière garantie, la dernière espérance d’un monde libre.
Scénarios d’avenir : entre peur et espérance

Le risque de l’effondrement
Si la Russie attaque à l’est, si la Chine frappe à l’ouest, si l’Amérique hésite, l’Europe risque l’effondrement : militaire, politique, moral. Les lignes pourraient céder, les alliances se déliter, les certitudes s’effondrer. Les adversaires avanceraient, les alliés reculeraient, les populations fuiraient. L’histoire, cruelle, implacable, ne pardonne pas la faiblesse, l’indécision, la division. L’Europe, si fière, si sûre d’elle, pourrait redevenir un champ de bataille, un enjeu, une proie.
La possibilité d’un sursaut
Mais rien n’est écrit. L’histoire regorge de surprises, de retournements, de sursauts. L’Europe pourrait décider de s’armer, de s’unir, de résister. Les États-Unis, confrontés à la réalité, pourraient choisir l’engagement, la solidarité, le leadership. Les peuples, face à la menace, pourraient retrouver le sens du collectif, du courage, du sacrifice. Les adversaires, confrontés à la détermination, à la résilience, pourraient reculer, négocier, renoncer. L’avenir reste ouvert, incertain, dangereux, mais porteur d’espérance.
L’urgence de l’engagement
Ce qui compte, ce n’est pas seulement la puissance des armes, la force des alliances, la solidité des traités. C’est la volonté, le courage, la lucidité. C’est la capacité à regarder la réalité en face, à nommer la peur, à assumer la responsabilité. C’est l’engagement, individuel, collectif, politique, moral. L’Europe, l’Occident, le monde libre, ne survivront que s’ils acceptent de se battre, de s’unir, de se réinventer. L’histoire n’attend pas, la menace non plus.
En écrivant ces lignes, je ressens un mélange de peur, de colère, d’espérance. Peur de voir le monde basculer, colère contre l’inertie, l’aveuglement, l’égoïsme. Espérance, malgré tout, dans la capacité de l’homme à se relever, à inventer, à aimer. Rien n’est perdu, tant qu’il reste une volonté, une voix, une main tendue. Mais il faudra du courage, de la lucidité, de la détermination. Et ça, personne ne peut le faire à notre place.
Conclusion : L’heure de vérité, le prix de la liberté

Le monde juge, critique, condamne les États-Unis, Trump, les tarifs, les égoïsmes. Mais la question essentielle demeure : qui, demain, sera prêt à nous défendre, à payer le prix, à assumer la responsabilité ? L’Europe, l’Occident, le monde libre, sont à l’épreuve. La double menace russe et chinoise n’est plus une hypothèse, c’est une réalité, une urgence, un défi. L’avenir dépendra de notre capacité à regarder la peur en face, à assumer la responsabilité, à choisir la solidarité, la puissance, l’engagement. Rien n’est écrit, rien n’est perdu, mais tout reste à faire. L’histoire continue, la lutte aussi. Le prix de la liberté, de la sécurité, de la dignité, est élevé. Mais il vaut d’être payé, ensemble, lucidement, courageusement.
En refermant cet article, je ressens la gravité de l’instant, mais aussi la force de l’engagement. Je ne sais pas ce que demain nous réserve, mais je sais que l’indifférence n’est plus une option. Dire, raconter, alerter, c’est déjà refuser la résignation. Et, peut-être, c’est le début d’une autre histoire.