Les pièces s’assemblent : l’axe du mal réinventé, la guerre de l’ombre en Ukraine
Auteur: Maxime Marquette
Il y a des soirs où l’Histoire s’accélère, où les contours du monde se brouillent, où la lumière des certitudes s’éteint d’un coup. Ce soir, je regarde les actualités, je lis les dépêches, et j’ai la sensation étrange d’assister à la mise en place d’un puzzle noir, d’un jeu de dominos dont chaque pièce tombe, inexorable, sur la suivante. Kim Jong Un proclame son soutien « inconditionnel » à la Russie dans la guerre en Ukraine. Les drones iraniens, enrichis de technologie chinoise, s’abattent sur Kyiv. Les cargaisons nord-coréennes traversent la Sibérie, les navires russes croisent avec les destroyers iraniens. Les alliances se nouent, les lignes se déplacent, et dans l’ombre, un nouvel « axe du mal » s’esquisse, plus dangereux, plus insaisissable, plus déterminé que jamais. Ce n’est pas une fiction : c’est la réalité, brute, froide, implacable, qui s’impose à nous, qui nous bouscule, qui nous oblige à regarder la menace en face.
Kim Jong Un et la Russie : l’alliance sans condition

Un soutien affiché, un pacte de sang
Le 12 juillet 2025, la déclaration tombe, sèche, sans détour : Kim Jong Un offre à Vladimir Poutine son appui « inconditionnel » dans la guerre contre l’Ukraine. Pas de nuances, pas de condition, pas de faux-semblants. Dans les salons feutrés de Pyongyang, le leader nord-coréen reçoit le ministre russe des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov, et promet de soutenir « toutes les mesures prises par la Russie » pour « résoudre la crise ukrainienne ». Derrière les formules diplomatiques, la réalité est brutale : la Corée du Nord n’est plus un simple spectateur, elle s’engage, elle s’implique, elle envoie des soldats, des obus, des ingénieurs. Les images satellites révèlent le ballet des cargos, les analystes décryptent les manuels d’artillerie coréens traduits en russe, les rapports occidentaux confirment la présence de troupes nord-coréennes sur le sol russe, dans la région de Koursk, là où la ligne de front vacille.
Des armes, des hommes, des ambitions
Ce n’est plus un secret : Pyongyang alimente la machine de guerre russe. Artillerie, munitions, missiles balistiques, tout ce que la Russie peine à produire, la Corée du Nord le fournit. En échange ? Du pétrole, du blé, des devises, mais surtout, une reconnaissance internationale, un statut de faiseur de guerre. Les soldats nord-coréens, déployés en unités compactes, participent aux combats, construisent des fortifications, réparent les blindés. Les pertes sont lourdes, les conditions inhumaines, mais le régime de Kim y voit une occasion unique de tester ses hommes, ses armes, ses doctrines, loin des regards, loin des sanctions.
Un pacte qui inquiète l’Occident
À Washington, à Séoul, à Tokyo, l’alarme retentit. Les analystes parlent d’une « rupture historique », d’un basculement stratégique. La coopération militaire entre Moscou et Pyongyang viole ouvertement les résolutions de l’ONU, finance le programme nucléaire nord-coréen, accélère la prolifération des missiles. Les experts redoutent un transfert de technologies sensibles, une montée en puissance de l’arsenal nord-coréen, une déstabilisation durable de l’Asie du Nord-Est. Mais la Russie, isolée, acculée, n’a plus rien à perdre. Elle ouvre grand la porte à son nouvel allié, et l’axe se renforce, chaque jour un peu plus.
Chine : l’ombre portée sur le conflit

Le fournisseur invisible
La Chine avance masquée, mais son empreinte est partout. Officiellement, Pékin proclame sa neutralité, appelle à la paix, refuse de livrer des armes létales à la Russie. Mais les faits, eux, sont têtus. Les débris de drones abattus au-dessus de Kyiv révèlent des composants chinois, des microprocesseurs, des moteurs, des systèmes de navigation. Les usines russes tournent à plein régime, alimentées par des machines-outils, des semi-conducteurs, des matériaux dual-use venus de Chine. Les analystes occidentaux parlent d’un « soutien décisif », d’une « dépendance croissante » de l’armée russe aux technologies chinoises.
Le rôle clé dans la guerre des drones
L’Iran fournit les fameux drones Shahed, mais c’est la Chine qui en fournit les cerveaux, les muscles, les yeux. Les ingénieurs chinois collaborent avec leurs homologues russes et iraniens pour améliorer les performances, contourner les sanctions, industrialiser la production. En mai, le ministre ukrainien de la Défense alerte : « 80 % des composants électroniques des drones russes sont d’origine chinoise ». Les chaînes de montage s’étendent de Moscou à Shenzhen, les cargos traversent la mer de Chine, les sanctions américaines sont contournées par des sociétés-écrans, des intermédiaires, des circuits parallèles.
La diplomatie du silence
Pékin nie, Pékin temporise, Pékin accuse l’Occident de « jeter de l’huile sur le feu ». Mais derrière les discours, la réalité est limpide : la Chine est le pilier discret de l’axe Moscou-Téhéran-Pyongyang. Elle fournit la technologie, elle finance l’effort de guerre, elle protège diplomatiquement ses alliés. Les sommets se multiplient, les visites d’État aussi. En mai, Xi Jinping reçoit Vladimir Poutine à Pékin, scelle une « amitié sans limites », promet une coopération militaire « stratégique ». L’axe se structure, s’organise, s’affirme, pièce après pièce.
L’Iran : l’artisan du chaos aérien

Les drones Shahed, la signature iranienne
Depuis 2022, les drones Shahed sont devenus le cauchemar des villes ukrainiennes. Silencieux, bon marché, mortels, ils frappent les infrastructures, les centrales, les hôpitaux. Mais ce que l’on sait moins, c’est que la Russie a appris à les produire en masse, sur son propre territoire, avec l’aide d’ingénieurs iraniens, de pièces chinoises, de financements russes. Les usines tournent jour et nuit, les attaques se multiplient, la défense ukrainienne s’épuise. Le 10 juin, près de 500 drones sont lancés sur Kyiv en une seule nuit. Le président Zelensky alerte : « La Russie sera bientôt capable d’en lancer mille par jour ».
La coopération militaire Iran-Russie
Mais l’Iran ne se contente pas de livrer des drones. Il fournit aussi des missiles, des conseillers, des technologies de guidage. En retour, la Russie partage son savoir-faire nucléaire, ses systèmes de défense anti-aérienne, ses techniques de camouflage. Les exercices navals conjoints se multiplient, les échanges de renseignements aussi. Téhéran profite du chaos pour renforcer ses positions au Moyen-Orient, contourner les sanctions, tester ses armes sur le terrain ukrainien. L’axe Moscou-Téhéran s’affirme, s’enracine, se nourrit de la guerre.
Une stratégie de la terreur
Les drones iraniens ne visent pas seulement des cibles militaires. Ils terrorisent la population, ils épuisent les stocks de missiles anti-aériens, ils forcent l’Ukraine à disperser ses défenses. C’est une guerre d’usure, une guerre psychologique, une guerre de la peur. Les analystes parlent d’une « stratégie de saturation », d’une « guerre à bas coût, à haut rendement ». L’Iran, en s’imposant comme le fournisseur incontournable de la terreur aérienne, gagne en influence, en prestige, en pouvoir de nuisance. Et l’axe se renforce, encore, toujours.
Russie : le chef d’orchestre du nouvel axe

Une guerre d’usure, une guerre d’alliances
La Russie de 2025 n’est plus celle de 2022. Isolée, sanctionnée, affaiblie, elle a su transformer ses faiblesses en atouts. Elle a bâti un réseau d’alliances, elle a ouvert ses arsenaux à la Corée du Nord, elle a intégré les drones iraniens, elle a modernisé ses usines avec l’aide de la Chine. Les offensives se succèdent, les pertes sont lourdes, mais le front tient, les lignes bougent, l’Ukraine s’épuise. Les analystes parlent d’une « guerre d’usure », d’une « guerre de ressources », d’une « guerre de coalition ». La Russie ne combat plus seule, elle combat en réseau, elle combat en meute.
La stratégie du chaos contrôlé
Moscou ne cherche plus la victoire éclatante, la percée décisive. Elle vise l’épuisement, la lassitude, la division de ses adversaires. Elle multiplie les attaques sur les infrastructures, elle cible les lignes électriques, les dépôts de carburant, les centres logistiques. Les drones, les missiles, les sabotages deviennent les armes du quotidien. L’objectif : rendre la vie impossible, forcer l’Ukraine à négocier, dissuader l’Occident de s’impliquer davantage. C’est une guerre sale, une guerre longue, une guerre sans vainqueur assuré.
Le pari de l’axe
En s’alliant à la Corée du Nord, à l’Iran, à la Chine, la Russie prend un risque, mais elle n’a plus le choix. L’axe du mal version 2025 n’est pas une alliance de façade : c’est une communauté d’intérêts, de ressentiments, de rêves de revanche. Chacun y trouve son compte, chacun y joue sa partition. Mais la partition est dangereuse, explosive, imprévisible. Si l’un tombe, les autres vacillent. Si l’un trahit, l’édifice s’effondre. Mais pour l’instant, l’axe tient, l’axe avance, l’axe inquiète.
Un axe du mal 2.0 : la géopolitique de l’ombre

Des alliances mouvantes, des intérêts convergents
Ce nouvel axe du mal n’est pas figé, il évolue, il s’adapte. La Chine avance masquée, l’Iran frappe dans l’ombre, la Corée du Nord s’affirme, la Russie orchestre. Chacun a ses raisons, ses objectifs, ses faiblesses. Mais tous partagent un même ennemi : l’Occident, ses valeurs, ses alliances, son modèle. Les forums internationaux deviennent des champs de bataille diplomatiques, les sanctions des armes de guerre, les technologies des leviers de puissance. L’axe se nourrit de la faiblesse de ses adversaires, de la division de l’Europe, de l’essoufflement américain.
La guerre hybride, la guerre totale
Ce n’est plus seulement une guerre de chars, de missiles, de drones. C’est une guerre hybride, une guerre totale, une guerre de l’information, de l’économie, de la psychologie. Les cyberattaques se multiplient, les campagnes de désinformation aussi. Les sociétés occidentales doutent, hésitent, se divisent. L’axe du mal 2.0 exploite chaque faille, chaque hésitation, chaque faiblesse. Il ne cherche pas la victoire militaire, il cherche l’effondrement moral, la lassitude, la résignation.
L’Occident face au défi
Face à cette menace, l’Occident tâtonne, hésite, réagit plus qu’il n’anticipe. Les alliances se fissurent, les opinions publiques s’essoufflent, les ressources s’épuisent. Mais la prise de conscience s’accélère : il ne s’agit plus seulement de défendre l’Ukraine, il s’agit de défendre un modèle, une idée, une certaine conception du monde. La guerre en Ukraine n’est plus un conflit régional, c’est le laboratoire de la guerre globale, le miroir de nos faiblesses, le test ultime de notre résilience.
Je regarde l’Occident, je sens sa fatigue, son doute, sa peur. Mais je sens aussi, parfois, une forme de sursaut, de réveil, d’orgueil. Peut-être que cette guerre, aussi terrible soit-elle, nous oblige à regarder en face nos faiblesses, à repenser nos certitudes, à réinventer nos alliances. Je ne sais pas si nous serons à la hauteur, je ne sais pas si nous saurons résister à la tentation du repli, du cynisme, de l’indifférence. Mais je veux croire qu’il reste, quelque part, une capacité à s’unir, à se battre, à défendre ce qui fait notre force.
Conclusion : l’aube d’un monde fracturé

Les pièces se mettent en place, le puzzle s’assemble, l’axe du mal version 2025 s’impose comme la nouvelle réalité géopolitique. Russie, Chine, Iran, Corée du Nord : quatre puissances, quatre ambitions, une même volonté de défier l’Occident, de remodeler le monde à leur image. La guerre en Ukraine n’est plus un simple conflit, c’est le théâtre d’une recomposition globale, le champ de bataille d’une guerre de l’ombre, d’une guerre des nerfs, d’une guerre des alliances. Rien n’est joué, rien n’est figé. Mais une chose est sûre : le monde d’hier est mort, et celui de demain sera plus dangereux, plus imprévisible, plus fragmenté. Il nous appartient, à nous tous, de refuser la fatalité, de rester lucides, de défendre la lumière face à l’ombre qui s’étend.