Assaut politique : Les Démocrates déchaînés, Trump sous la foudre médiatique
Auteur: Maxime Marquette
Tout vacille, tout gronde, tout s’embrase. Jamais, sur la scène politique américaine contemporaine, la bataille n’a pris un relief aussi tranchant, aussi brutal. Les Démocrates, décomplexés et résolus, frappent sans relâche sur le champ de ruines du trumpisme. Fini le temps des formules feutrées, des accords mièvres : chaque intervention de la Maison Bleue est un uppercut, chaque déclaration une déflagration calculée. Donald Trump, longtemps maître de l’offensive, plie sous une avalanche de critiques, d’attaques symboliques et d’investigations publiques. Ce qui semblait, hier encore, impensable – voir la machine démocrate aussi disciplinée, aussi vindicative – devient aujourd’hui le spectacle ordinaire du débat national. Les responsabilités volent, les accusations percent la chair du pouvoir, la société américaine regarde, hébétée, ce combat à ciel ouvert qui ne promet qu’une issue : la fureur ou l’effondrement.
L’unité démocrate se forge dans la polémique
Les ambitions se redessinent à la lumière des crises. Un front uni se dresse chez les Démocrates, rares fissures apparaissent malgré la diversité des tendances internes. De la gauche progressiste jusqu’au centre aguerri, tous convergent sur la nécessité de maintenir la pression, de refuser la banalisation des scandales et la violence du langage trumpien. La discipline de parti, souvent objet de raillerie, trouve un nouvel aiguillon : l’hostilité partagée contre la politique de « grande facture » et les décisions perçues comme désastreuses du président. La rhétorique collective s’appuie sur la précision des attaques thématiques : inflation, gestion des dossiers sensibles, politique étrangère bancale… Rien n’est laissé à l’écart.
Conteurs aguerris, les leaders démocrates orchestrent des campagnes médiatiques ciblées, utilisant chaque faille, chaque hésitation présidentielle pour reconsolider l’image de parti du peuple. En off, les spin doctors travaillent la stratégie du fer à repasser : écraser l’image d’efficacité du rival, répéter – quitte à marteler d’outrance – la dénonciation du cynisme trumpiste, de la fracture sociale, de la protection de l’élite contre le délitement social. La lutte est d’abord un spectacle de récits, mais aussi une quête patiente de la confiance populaire – et tous le savent.
Les scénaristes de la Maison Bleue comprennent enfin que seuls les coups d’éclat, multipliés et savamment orchestrés, peuvent créer la dynamique que l’électorat attend. En simultané, le Congrès, la DNC, les médias alliés, tous s’alignent pour frapper en cadence, imposant leur tempo, surfant sur la fatigue de l’Amérique profonde. Ici, la guerre d’usure devient une arme de dissuasion massive.
Le dossier Epstein, catalyseur du ressentiment démocrate
L’affaire Epstein agit, pour le camp démocrate, comme une poudrière. La révélation tardive – ou l’absence totale de révélation, selon leurs termes – suscite la fureur : la promesse, sans cesse renouvelée par Trump, de faire tomber l’omerta sur le scandale, s’effondre dans le cloaque des calculs électoraux. Les Démocrates multiplient meetings, déclarations, dossiers et communiqués pour rappeler les ambiguïtés, souligner les incohérences, pointer du doigt l’éternelle valse-hésitation du sommet de l’État. Aux yeux de la base bleue, la gestion opaque du « Epstein file » devient une métaphore du malaise démocratique, du sentiment d’impunité des puissants et de l’opacité de la gouvernance trumpiste.
L’opération offensive ne se limite plus à la dénonciation morale. Les commissions du Congrès pilotées par des figures comme Jamie Raskin ou Hakeem Jeffries alimentent l’enquête : ils réclament transparence, publication complète des documents, audition des responsables sécuritaires. La Maison Blanche, prise de court, répond par le mépris, l’ironie, mais la mèche reste allumée. Dans les rangs démocrates, tous s’enhardissent : la fin de la loyauté aveugle ouvre la porte à toutes les revendications, à toutes les diversions stratégiques.
Une nouvelle rhétorique émerge : « Trump protège les élites, trahit les travailleurs, sacrifie l’éthique publique pour ses alliés. » L’attaque est sauvage, frontale, obsédante. L’affaire Epstein, catalyseur du doute, permet d’agréger tous les griefs – de l’économie à la morale.
Martelage constant : le pouvoir des répétitions ciblées
La stratégie démocrate ne laisse aucun répit. Tous les leviers médiatiques sont actionnés, chaque conférencier récite en boucle les mêmes accusations : « La réforme Trump, c’est la casse de la classe moyenne », « Project 2025 est une menace directe sur nos institutions », « La Justice sous Trump a failli. » Les têtes d’affiche s’en donnent à cœur joie : Kamala Harris cite les conséquences délétères de Project 2025, Michelle Obama martèle sur la disparition du Département d’État, Biden ironise sur l’illettrisme officiel et la bêtise assumée du camp adverse. Même les élus d’États traditionnellement conservateurs s’alignent sur la charge, réactivant une ferveur militante que l’on croyait dissoute.
Les campagnes d’affichage, les vidéos virales, les hashtags fleurissent : il n’est plus rare de voir les profils progressistes sur Reddit, Twitter, TikTok relayer massivement les slogans anti-Trump. Cette occupation permanente de l’espace digital pousse le camp adverse à la défensive, multiplie les contresens, fissure le socle électoral du président. Les Démocrates, jadis qualifiés de « faiblards », adoptent les codes du harcelement numérique, n’hésitant plus à jurer, à casser les codes, à viser l’authenticité.
Loin de s’effriter, la dynamique s’intensifie : la répétition – le « martelage » méthodique – devient leur meilleure arme. Ce qui, hier, pouvait lasser, rassure à présent une population fatiguée des volte-face présidentielles.
La grande bascule : quand la confiance s’effondre dans l’Amérique de Trump

L’usure du crédit présidentiel : un constat alarmant
Sur tout le territoire, les derniers sondages révèlent une pente longue et dangereuse pour le locataire de la Maison Blanche. Moins de la moitié des Américains jugent positives ses politiques sur l’économie, la santé, ou l’immigration. Même chez les républicains « historiques », la confiance s’effrite, la rhétorique du sauveur ne fait plus recette. L’indice d’adhésion à Trump, si longtemps dopé à la peur de l’alternance et aux mythologies du « système corrompu », tombe en-dessous des 50 % sur tous les critères cruciaux : prix, impôts, sécurité, emploi. La magie recule, la fatigue s’installe.
L’explication réside dans la fracture de perception. Longtemps, l’électorat a toléré la brutalité du style, à condition que la courbe économique soit ascendante. Mais la nouvelle réalité – prix des biens courants en hausse, impact des tarifs douaniers, inquiétudes sur la couverture Medicaid – déploie ses effets ravageurs. Dans les zones rurales et dans les bassins ouvriers, des miles de terre battue témoignent d’un désespoir : « Nous avons joué la carte Trump, mais la vérité ne correspond plus au récit. » Un quart à peine de la population se dit « bénéficiaire » des décisions présidentielles.
À la défiance s’ajoute la lassitude : le sentiment diffus que le spectacle clientéliste ne résout rien, que les grandes « victoires » galvaudées masquent mal l’inflation galopante ou l’insécurité. Chez les indépendants, la fuite est massive : la balance électorale flanche.
L’effet Epstein : confiance en chute libre
Ce dossier concentre, à lui seul, la défiance. La promesse de lever le voile s’effondre sur le déni officiel : aucune révélation, aucune justice apparente, « rien à voir ici » comme l’a martelé la procureure Bondi. Mais l’Amérique attendait la publication des noms, la déclassification totale. Chaque reculade renforce la conviction que l’État protège les puissants au détriment de la vérité. Chez les ex-MAGA, l’idée fait son chemin : « Trump protège les élites, pas les nôtres. » Un tsunami de diffidence balaye la sphère conservatrice.
Pour les Démocrates, la faille est une autoroute : capitaliser sur le soupçon, le lier à toutes les zones d’ombre de la présidence. « Après tout, s’il a menti sur ça, que cache-t-il d’autre ? » disent les nouvelles campagnes. Les éditorialistes relaient la défiance, la transforment en verdict : si le chef trahit sa base pour protéger sa caste, alors tout peut vaciller. Même les alliés financiers prennent leurs distances, dans une atmosphère de malaise généralisé.
Ce divorce est historique : la perte de confiance, rarement visible à si grande échelle, entraîne des lendemains électoraux implacables. La faille Epstein n’est plus une polémique : c’est le cœur d’une crise de légitimité.
L’épreuve du terrain : rejet, frustration et exils symboliques
Loin des caméras, la colère se lit sur les visages. Meeting après meeting, les soutiens des premiers jours désertent ; les comités locaux MAGA refusent d’accueillir les envoyés du président. Sur les forums, la défiance explose, se mue en attaques croisées. Chassés de leur terre natale, les radicaux se réagglutinent en groupes restreints, refusent la discipline imposée, multiplient les ultimatums : « Publiez, ou partez. » Certains vont plus loin : menaces de scission, démissions en chaîne, boycott de la primaire.Trump se retrouve esseulé, cerné par l’hostilité de ses propres anciens compagnons de route.
Le spectacle de l’usure présidentielle est visible jusque dans les files d’attente devant les permanences : dégoût, résignation, ironie amère. Plus un électeur ne s’aventure à défendre les décisions économiques sans trembler. Ceux qui resteraient, peut-être, pour la stabilité dérivent peu à peu vers l’abstention. La confiance, une fois fracturée, crée des ondes de choc qui désintègrent le tissu électoral.
Les Démocrates l’ont compris : là où la rancœur s’installe, la reconquête devient possible. Là où la base gémit, l’alternative s’invite – avec frontières vagues mais tendances lourdes. La défaite n’est plus une aberration, mais un scénario plausible.
La nouvelle stratégie démocrate : offensive sans fioriture

Mobilisation tout-terrain : du Congrès au digital
Les armes du combat sont multiples, affûtées. Les Démocrates, attentifs à ne pas reproduire les erreurs de 2024, multiplient les campagnes terrain : porte-à-porte, réunions locales, interventions sur les ondes rurales, animation des réseaux sociaux, tout est mis en œuvre pour « ramener à la maison » indépendants déçus et conservateurs hésitants. Le renouvellement profond des méthodes, qui relègue les vieilles conférences télévisées au second plan, privilégie l’action sur le terrain.
En simultané, les story-tellers numériques matraquent images, clips, podcasts percutants. On croirait parfois à une réplique de la stratégie trumpiste 2016-2020 : attaque frontale, humour acide, dérision méthodique, récupération de tous les signaux faibles venus de la base adverse. Plus question, pour le camp bleu, de rester sur la défensive : la reconquête de l’opinion se joue sur la rapidité, la justesse et la créativité des campagnes.
L’intelligence de la démarche n’échappe à personne : chaque crise, chaque rumeur exploitée, chaque hésitation présidentielle sont exploitées en temps réel. Quand un canal sature, un autre ouvre la vanne. L’offensive est totale, sans relâche, presque fatigante à observer, tant elle multiplie les couches d’argument.
Rhétorique de rupture : voix hautes, langage cru
Le langage évolue. Party leaders jurent, haussent le ton, n’hésitent plus, devant micro et caméra, à utiliser mots durs, punchlines, invectives directes. La soft communication, reléguée. La nouvelle règle : faire entendre le ras-le-bol du peuple, traduire l’exaspération sans détour. Les interventions de Barack Obama, d’anciens sénateurs et de stars du Midwest martèlent la même illusion : « Il n’y a plus de place pour les compromis mous, pas face au cynisme. »
Cette évolution, fascinante, donne à la campagne une tonalité quasi-pugilistique : la violence n’est plus dissimulée, le combat frontal est assumé. Même les personnalités les plus modérées, longtemps prêtes à négocier, mimétisent la stratégie du clash. L’authenticité, même brouillonne, emporte tout sur son passage, rendant les discours fades suspects, les appels à l’unité trop propres.
Cette nouvelle grammaire démocrate, qui mélange l’urgence des revendications de l’aile gauche et l’efficacité pragmatique du centre, revisite l’histoire du parti : fini le consensus, l’heure est aux alliances de combat – quitte à secouer, brutaliser, humilier parfois ses propres rangs. On ne s’ennuie plus : on s’affole, on s’accroche, on ose.
L’agenda Project 2025 : laboratoire d’une riposte sur-mesure
Rarement un projet politique n’a autant cristallisé la colère. Les Démocrates, flairant la menace du « Project 2025 », n’ont de cesse de décrire ce plan comme un texte de démantèlement systématique de l’État social, une feuille de route pour la revanche réactionnaire. À la tribune, Kamala Harris brandit le document, le réduit en miettes : « Ils veulent abolir le Département de l’Éducation, supprimer toute forme de protection sociale… Comment peut-on tolérer une telle régression ? ». Les experts mobilisés dissèquent point par point les doctrines : fiscalité à plat, loi martiale, privatisation du bien public.
Partout, l’offensive s’organise : diffusion de synthèses accessibles, podcasts explicatifs, campagnes d’information dans les quartiers populaires. L’idée : ne pas se contenter de la critique, mais proposer une analyse accessible, ludique, quitte à caricaturer l’adversaire. Cette volonté de vulgariser la menace permet d’élargir le front : parents d’élèves, travailleurs précaires, retraités, tous sont invités à se sentir ciblés. La riposte, ici, n’est plus seulement idéologique : elle devient éducative, pédagogique… infectieuse.
Ce laboratoire de la stratégie, encore hésitant, révèle la volonté démocrate de transformer la peur sociale en force de mobilisation. L’ennemi a un nom, un projet, une date – il suffit de faire circuler cette évidence pour marquer des points. L’information, arme domestique du moment, ne fait que commencer sa ruée.
Fracas et recalculs : une Amérique bouleversée par la guerre des récits

Médias survoltés : la surenchère de l’instantané
Impossible d’échapper au tourbillon médiatique. Chaque plateau télé, chaque chronique, chaque live sur YouTube participe du grand match. Les éditorialistes alternent invectives, dénonciations, analyses à l’emporte-pièce. Aux heures de grande audience, le débat tourne rarement autour d’idées : il s’agit d’images, de postures, de « moments » volés, recoupés, amplifiés, déformés.
Les chaînes progressistes assument le rôle de relais continu. Les opposants rivalisent d’inventivité pour trouver, dans chaque déclaration, le germe du faux, de l’incohérence, de la trahison. La scène médiatique, fracturée, court-circuite toute tentative d’approfondir. Les démocrates comprennent rapidement que la « petite phrase » fait plus de bruit qu’un argument technique. Ils adaptent leur arsenal : vidéos courtes, extraits-choc, images de colère.
Cette hystérie n’offre aucun espace à la nuance. Pire : elle accélère la désagrégation du débat public. Mais c’est le prix du sprint politique de 2025 – il faut courir plus vite, crier plus fort, frapper plus juste. La compétition, féroce, sacre le bruit sur la durée, la fureur sur la patience.
La contre-attaque trumpiste : victimisation et fuite en avant
Pris au piège de sa propre stratégie de communication, Donald Trump cherche à renverser le récit. Sur Truth Social, il dénonce « l’escroquerie Epstein », accuse l’opposition de comploter, de détourner l’attention de ses « succès ». Il tente la fuite en avant, l’invocation du canular, l’appel aux derniers irréductibles. La parole présidentielle devient floue, fragmentaire, quasi schizophrène : tantôt sur la défensive, tantôt dans la riposte.
Mais la manœuvre trouve ses limites. Les partisans eux-mêmes, fatigués, critiquent un chef qui change de cap à chaque tempête. La victimisation perpétuelle ne convainc plus les « indépendants » ni le Midwest, et la crainte – jadis structurante – devient simple agacement. Les stratèges républicains hésitent : entre suivre la radicalité du chef ou choisir la distance.
L’amenuisement de la force présidentielle saute aux yeux. La gestion au quotidien du ressentiment ne produit plus d’effet d’entraînement. La spirale est engagée : la domination du storytelling cède devant le chaos, l’incertitude, la torpeur. Le bruit de fond s’amplifie, la vision se brouille, la tactique se meurt.
Chiffres en berne, confiance fracassée
Les données du terrain sont implacables. Une majorité d’adultes américains déclarent ne voir aucun bénéfice des politiques trumpistes dans leur vie quotidienne. Les points forts du président – économie, immigration, sécurité – sont contestés. La peur de l’insécurité est devenue routine ; la colère contre l’augmentation des prix, réflexe pavlovien. L’absence d’amélioration tangible, couplée à la désillusion sur le plan du pouvoir d’achat, crée une dissonance mortelle pour l’exécutif fédéral.
Dans les focus groups, les électeurs avouent ne plus chercher de solution dans l’offre présidentielle : ils attendent une alternative crédible, parfois modérée, parfois radicale. La boucle apparaît sans fin : ni confiance, ni espoir, ni colère canalisable. Le champ politique devient dangereux : la décomposition du lien, visible en chiffres, accélère la crise du récit collectif.
Les Démocrates l’identifient, l’ânonnent, l’exploitent : chaque chiffre négatif est une médaille, chaque plainte une victoire. L’Amérique se prépare à voter contre, bien plus qu’à voter pour. La funambulesque danse électorale se joue maintenant à l’échelle du ressenti, non de la solution.
L’onde de choc internationale : regards inquiets, sarcasmes nerveux

Effondrement de la crédibilité internationale américaine
L’onde de choc ne s’arrête pas aux frontières. En Europe, en Asie, au Moyen-Orient, les chancelleries observent avec anxiété la déliquescence de la cohésion américaine. Les alliés traditionnels peinent à envisager une coopération stable : les alternances brutales entre isolationnisme, interventionnisme et surenchère tarifaire créent une paralysie diplomatique sans précédent. Les observateurs ironisent sur une Maison Blanche à la merci de ses propres dogmes et de ses propres fantômes.
Moscou et Pékin multiplient les offensives symboliques. Les gaffes présidentielles, les hésitations sur l’OTAN, les menaces commerciales à l’encontre du Canada ou de l’Union européenne sont perçues comme des opportunités historiques de recomposer la hiérarchie mondiale. Les Démocrates martèlent cette infirmité géopolitique, rappelant à chaque occasion le déclin de l’influence américaine et l’exil de la parole démocratique sur la scène internationale.
Là encore, le message passe : tout ce qui fait trembler à Washington s’amplifie à l’échelle planétaire. La perte de leadership, réelle ou fantasmée, devient un argument de poids dans l’arsenal électoral démocrate. Plus de place pour l’arrogance : seul subsiste le doute, l’agacement et l’attente d’une alternance pacificatrice.
Le spectre de Project 2025 sur la diplomatie mondiale
Là où la politique nationale inquiète, la projection du plan ultra-conservateur amplifie la crainte. La feuille de route Project 2025, décortiquée jusque dans les institutions européennes, n’inspire que réticences : démantèlement des agences fédérales, retour supposé à la loi du plus fort, menaces explicites sur la diplomatie environnementale. Les dirigeants occidentaux s’interrogent : qui, demain, pourra engager durablement les États-Unis ? À quoi s’attendre en cas de crise internationale ?
Les Démocrates, à travers leurs relais en Commission, orchestrent un vaste travail de pédagogie auprès des médias étrangers, insistant sur le risque de chaos, la montée des périls et la déstabilisation potentielle des alliances historiques. Les marchés financiers traduisent cette fébrilité par une volatilité accrue, chaque annonce présidentielle déplaçant les indices, chaque crise imposant une reconfiguration aggravée de la géopolitique mondiale.
Le spectre de l’échec global n’a jamais été aussi palpable. S’il existe un enjeu transversal à la crise américaine, c’est bien cette crainte de l’irrationnel, ce soupçon de l’effondrement programmé du dialogue international. Les Démocrates y puisent la matière de leur riposte, dénonçant le risque existentiel d’une Amérique hors du monde – ou contre le monde.
Tensions commerciale et naufrage de la diplomatie économique
Les résultats se font sentir partout : les tarifs douaniers contre le Canada font monter au créneau les gouvernements canadiens, qui dénoncent une « menace sérieuse contre l’économie du continent ». Les Démocrates, loin de minimiser la portée des sanctions tarifaires, y voient la marque d’un échec structurel. Ils multiplient les alliances transnationales, défendent des plans alternatifs, jurent de défendre les « travailleurs insultés par la brutalité trumpiste », cultivent l’image d’un parti ouvert et diplomate, en rupture radicale avec l’agressivité actuelle.
Même le Mexique, autrefois canal de décharge des humeurs présidentielles américaines, se permet de menacer de rétorsions, d’organiser des mobilisations. Ce climat de crise permanente désorganise la diplomatie, paralyse les circuits traditionnels du dialogue. Les multinationales freinent les investissements, suspendent les embauches, anticipent de nouvelles convulsions.
Les Démocrates profitent de la pagaille sur tous les fronts : la force du récit ne vient plus des seules promesses, mais aussi des preuves, chiffres à l’appui, que le chaos politique engendre des pertes massives pour l’économie, le prestige, la stabilité. L’offensive, ici, est implacable, méthodique, fondée sur le constat d’un monde devenu imprévisible à cause d’un chef imprévisible.
Scénarios d’épilogue : héritage, espoirs déçus et futur à rebours

Mutations internes et risques de sécession partisane
Dans le sillage de la tempête, le parti républicain ne se relève plus facilement. Les lignes de fractures révélées par la crise Epstein, les fuites de cadres, la contestation des modérés dessinent un archipel éclaté, fragmenté, hostile à toute tentative de réconciliation. Des mouvements de « Never Trumpers » renaissent, des coalitions alternatives prospèrent sur Internet, la promesse d’une ère post-trumpienne commence à grossir dans le cyberespace.
Les Démocrates, pragmatiques, évitent la complaisance. Dans les graphes de comportements électoraux, chaque victoire momentanée équivaut à une bataille à reprendre : la vitalité trumpiste, même blessée, reste résiliente, capable de faire basculer un scrutin, voire une législation au dernier moment. Le spectre de la sécession partisane devient réel, la guerre civile des urnes menace de se transformer en guerre de chapelles, de nouvelles coalitions, de nouveaux leaders.
Le fabuleux chaos américain, imprévisible jusque dans ses cycles de renaissance, rend illusoire toute projection définitive. Mais la tendance est là : l’ancien monde titube, l’ère du combat permanent s’installe. Les Démocrates le savent, s’en réjouissent, le redoutent aussi.
Leçon d’histoire : brutalité, pédagogie, et grandeur blessée
L’intelligence politique ne consiste plus seulement à condamner, à promettre, à détruire. Les stratèges démocrates travaillent d’arrache-pied à créer la mémoire de cette séquence, à raconter – dans les manuels, les instituts, les forums – comment une société démocratique peut survivre à la tempête. Ils caressent l’idée de reconstruire un récit national, d’inscrire la turbulence dans la morphologie même de leur identité politique. L’enjeu : transformer la fureur du présent en marchepied pour une refondation progressive, inclusive, robuste.
Cette mémoire, incertaine, commence à se former. L’histoire écrite par les vainqueurs – s’il s’en trouve – devra intégrer l’ambivalence, la nuance, la complexité. Les Démocrates, même victorieux, devront répondre de leurs propres concessions, de la part de violence assumée, de l’accélération forcée. La brutalité sème toujours l’ambiguïté. Mais elle permet aussi, parfois, la renaissance du commun.
Le pays, épuisé par la valse des illusions, réclame une pédagogie nouvelle. Les leaders le savent, l’espèrent, s’y préparent. La grandeur américaine, blessée, attend son réveil – ou sa rédition.
Le jeu du possible : à quoi ressemblera la suite ?
Nul ne sait comment la crise s’achèvera. Un président diminué, une opposition revigorée mais sans Dieu ni maître, une base électorale aux abois, une jeunesse inquiète, tentée par la radicalité ou le désengagement : tout concourt à former un horizon de brouillard. Les scrutins à venir promettent plus de surprises que de certitudes. La recomposition des alliances, les chassés-croisés de la parole, la volatilité des passions collectives inhibent toute conclusion définitive.
Mais le possible, ici, n’est pas synonyme d’espoir ou de chaos. Il est la promesse, mince mais tangible, d’une démocratie capable de muter, d’affronter ses paradoxes, d’inventer de nouvelles règles à mesure que les anciennes s’effritent. Les Américains, peuple du vertige, du combat, de la survivance, se réinventent déjà dans la débâcle. Le futur, encore fantasmé, sera ce que le conflit aura sculpté : fragile, hésitant, mais peut-être – enfin – authentique.
Ce jeu, ce pari, cette fièvre… y survivront-elles ? L’avenir s’écrit, ici, dans le sang séché des batailles de mots.
Lendemain sans promesse : conclusion d’une Amérique à vif

Derrière chaque joute, chaque invective, chaque promesse déçue, s’étend un pays blessé, têtu, mais encore debout. L’assaut démocrate, sans précédent, a fait vaciller la statue d’airain du trumpisme, mais n’a pas, encore, reconstruit de mythe alternatif. Le brouillard demeure, la guerre continue, sur les plateaux, dans les urnes, dans le moindre recoin du territoire. Peut-être faut-il, pour renaître, effacer totalement l’ancien monde – ou le repenser jusqu’à l’épuisement. Ce qui demeure, c’est l’injure, la peur, le possible et le manque. Et, entre deux angoisses, l’intuition féroce qu’aucune démocratie digne de ce nom ne survit sans passer à l’épreuve du feu – ni du doute.