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Kharkiv en flammes : quand le ciel s’effondre sur les vivants
Credit: Adobe Stock

Les sirènes dans la brume du matin

Ce matin-là, Kharkiv s’est dressée dans le semi-jour, comme emmitouflée dans un drap gris. Les sirènes ont jailli, brisaant le silence, transperçant la torpeur. Ce n’était pas une fiction, ni le souvenir d’une vieille guerre. C’était la réalité, brute, sans pitié. Les gens se sont éveillés trop tard pour fuir. Les bombes russes, guidées, astucieuses et terriblement indifférentes, se sont abattues, réduisant en fragments ce qui, la veille encore, portait le nom de maison, de magasin, d’école. Je pourrais vous décrire le son, cette vibration sourde, ce tremblement de la terre, mais il faudrait des mots plus puissants, presque gutturaux, criés plus qu’écrits, pour saisir la violence de l’instant. Le ciel, déchiqueté. Et sur le bitume : l’effroi, l’urgence et la poussière mêlée de sang.

Explosion et dévastation : les premières minutes

La ville a vacillé. Deux bombes planantes KAB, larguées par un Su-34 russe, ont frappé le quartier Shevchenkivskyi, ciblant sans discernement un immeuble résidentiel et une entreprise civile. Le fracas a fait voler en éclats les vitres, a éventré les façades, a mis le feu à des dizaines de voitures. Les rues se sont emplies d’un chaos confus, d’enfants hurlant, de mères agrippant leurs petits. Aucun répit, pas même ce bref silence après la tempête : juste des flammes, du verre, une épaisse fumée noire qui masquait la lumière du jour. Un matin, ordinaire puis brisé. Kharkiv écrit, une fois de plus, sa tragédie sur les murs noircis par la guerre.

Le décompte des blessés : chiffres et visages

On égrène les statistiques comme on compte les battements d’un cœur fatigué. Trente-sept blessés recensés, dont un nourrisson de 28 jours. Une fillette de 10 ans. Un adolescent, 17 ans, la tête en sang. Une femme de 33 ans, entre la vie et la mort. Les services d’urgence s’affairent dans la poussière, tentant d’extirper parfois encore des cris sous les gravats. D’après le maire Ihor Terekhov, 20 immeubles résidentiels ont été touchés, des centaines de fenêtres soufflées, la nuit qui entre chez tout le monde. Ce n’est pas une statistique : c’est la vie, mutilée, suspendue, sous perfusion d’espoir et de traumatisme. Et dehors, à l’entrée des abris, des chats, des jouets éventrés, des lambeaux d’habits sur le goudron fondu, mémoire instantanée d’une matinée qui restera, pour longtemps, inracontable sans trembler.

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