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Le champion inattendu des déchetteries : ce champignon amazonien dévore littéralement le plastique dans l’obscurité totale
Credit: Adobe Stock

Imaginez un instant… vous vous réveillez demain matin et les millions de tonnes de plastique enfouis dans nos décharges se transforment en compost inoffensif. Science-fiction ? Plus vraiment. Une découverte extraordinaire faite dans les profondeurs de la forêt amazonienne équatorienne pourrait bien révolutionner notre approche du problème plastique mondial. Des étudiants de l’université de Yale ont identifié une espèce de champignon endophyte qui possède une capacité jusqu’alors inégalée : décomposer efficacement le polyuréthane – l’un des plastiques les plus résistants au monde – même dans un environnement totalement dépourvu d’oxygène.

Le Pestalotiopsis microspora n’est pas qu’un simple décomposeur de matière organique classique. Cette espèce fongique démontre une adaptation métabolique stupéfiante : elle peut utiliser le polyuréthane comme unique source de carbone pour sa survie et sa croissance. Autrement dit, ce champignon peut littéralement se nourrir exclusivement de plastique, sans aucun autre apport nutritionnel. Cette caractéristique unique en fait un candidat révolutionnaire pour la bioremédiation des déchets plastiques dans des conditions où les approches conventionnelles échouent lamentablement.

L’exception anaérobie qui change tout

Là où cette découverte devient véritablement révolutionnaire, c’est dans la capacité du Pestalotiopsis microspora à opérer en conditions anaérobies – c’est-à-dire sans oxygène. Cette propriété est cruciale car la majorité des déchets plastiques finissent enfouis dans les couches profondes des décharges, où l’oxygène est quasiment absent. Traditionnellement, les microorganismes capables de dégrader les polymères synthétiques nécessitent de l’oxygène pour leurs processus métaboliques, ce qui limite drastiquement leur efficacité dans les environnements réels de stockage des déchets.

Les recherches menées par l’équipe de Yale ont démontré que deux isolats distincts de Pestalotiopsis microspora (E2712A et E3317B) maintiennent des taux de dégradation équivalents du polyuréthane, qu’ils évoluent en présence ou en absence d’oxygène. Cette adaptation métabolique exceptionnelle s’explique par la capacité du champignon à utiliser des accepteurs d’électrons alternatifs tels que le dioxyde de carbone, les sulfates, les nitrates, le fer et le manganèse lors de la biodégradation en conditions anaérobies.

Mécanismes enzymatiques de la dégradation plastique

La machinerie enzymatique développée par ce champignon amazonien constitue un véritable arsenal biochimique contre les polymères synthétiques. Le Pestalotiopsis microspora sécrète principalement deux types d’enzymes dégradatives : la sérine hydrolase pour décomposer le polyuréthane et la PETase pour s’attaquer au polytéréphtalate d’éthylène (PET). Ces enzymes ciblent spécifiquement les liaisons chimiques qui confèrent leur résistance aux plastiques.

Le processus de dégradation se déroule en plusieurs étapes séquentielles. Initialement, la présence du polymère plastique induit le champignon à sécréter ses enzymes dégradatives qui agissent séquentiellement sur le polymère. Ces enzymes brisent les chaînes moléculaires complexes en oligomères polaires de faible poids moléculaire et en monomères qui peuvent pénétrer à travers la membrane cellulaire du champignon. Une fois absorbées, ces molécules sont ensuite décomposées par des processus intracellulaires, produisant finalement des composés organiques biodégradables et inoffensifs pour l’environnement.

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