Trump sème la tempête sur la Fed : quatre candidats en lice, la politique monétaire américaine sur un fil
Auteur: Maxime Marquette
Dans les coulisses du pouvoir, un fauteuil brûlant qui livre la guerre des nerfs
Un ballet d’égo, de peur et d’espoirs. Donald Trump, président revenu à la Maison Blanche comme un cyclone, vient de resserrer son choix pour la succession du très contesté Jerome Powell à la tête de la Réserve fédérale américaine. Pas moins de quatre noms survivent encore à la purge, quatre silhouettes qui cristallisent toutes les craintes des marchés, des banques centrales et d’un public américain encore groggy après dix-huit mois de turbulences inflationnistes et de remous électoraux. Mais l’annonce fracassante, c’est l’écartement de Scott Bessent, actuel secrétaire au Trésor et figure modérée – par choix et par lassitude. « Je veux rester là où je suis, avec vous, pas la Fed », aurait soufflé Bessent à Trump, qui s’est empressé de le rayer de la liste. Ce refus, cet aveu de fatigue ou de lucidité, bouleverse toutes les spéculations. Il laisse place à une angoisse plus grande encore : qui s’assiéra sur le volcan de la politique monétaire alors que le président exige un alignement total ?
Le monde scrute l’Amérique, chaque minute compte. Le suspense est total, le bras de fer devient rite initiatique pour une puissance qui ne sait plus si elle se dirige vers la prudence exaspérée ou la rupture spectaculaire. C’est la valse des titans, mais entre improvisation et manœuvres feutrées, le chaos n’est jamais loin. Les places financières dansent sur un fil, chaque nom murmuré créant une onde de choc jusque dans les bureaux feutrés des banques centrales de Francfort à Shanghai.
Le choix imminent d’un successeur n’est pas seulement une formalité institutionnelle. C’est une bataille pour l’âme même de l’économie américaine et, par ricochet, pour la stabilité du système financier mondial.
Scott Bessent s’efface, la Fed bascule vers l’inconnu
Il était pressenti, adoubé, aguerri aux tourments des marchés : Scott Bessent, ex-roi des hedge funds et homme de confiance du président, dit non au “trône” de la Fed. À peine le ton posé que Trump panse déjà le coup public, le dissèque en direct chez CNBC, louant “son travail phénoménal au Trésor”, mais validant son retrait du casting le plus stratégique de la décennie. Ce refus n’est pas neutre. Bessent, vu comme un point d’équilibre entre l’orthodoxie monétaire et la docilité attendue par Trump, laisse un espace béant que le pouvoir exécutif pourrait combler avec des profils bien plus alignés, bien plus tranchants, bien plus marqués politiquement.
En coulisses, Bessent le diplomate s’efface, laissant entendre qu’il préfère jouer les stratèges dans l’ombre, rester “là où il est utile”. Mais le message à ses homologues du G7 est limpide : la tempête à venir pourrait balayer toute la distance qui sépare encore la politique monétaire indépendante d’un instrument présidentiel muselé. Le séisme est là, invisible mais palpable, rendant les marchés fébriles, les experts inquiets et les conseillers du président nerveux devant le saut dans l’inconnu.
Bessent out, la Fed se retrouve à la merci d’un casting improvisé, entre fidélité absolue et expérience incertaine. Le risque est maximal, l’effet domino certain.
Quatre prétendants et une promesse de rupture : qui demain à la Fed ?
Sur la short-list, deux noms filtrent, surnagent, polarisent : Kevin Warsh, fantasque ex-gouverneur fédéral, proche des cercles de Wall Street et perçu comme le “bousculateur” de l’establishment ; Kevin Hassett, actuel chef du Conseil économique national, champion du trumpisme économique. Autour d’eux, deux figures gardées secrètes, peut-être par pure tactique ou par peur de voir les marchés chanceler s’ils sont connus trop tôt. Trump, en showman consommé, refuse pour l’instant de lever le voile, mais glisse, goguenard, “d’autres profils brillants seraient sur la table”.
Ce casting est tout sauf apaisant. Warsh, ardent critique de l’immobilisme de la Fed, prône une refonte du temple monétaire ; Hassett, fidèle soldat du président, miroite la promesse d’une Fed alignée sur la volonté présidentielle, quitte à tordre l’indépendance historique de l’institution. Les deux autres prétendants, murmurés mais jamais confirmés publiquement, pourraient représenter soit la continuité, soit la rupture radicale, soit un équilibre fictif pour rassurer l’opinion et Wall Street. Mais la musique de fond reste anxiogène : la Fed, autrefois gage de stabilité, pourrait bientôt devenir le prolongement naturel du Bureau ovale.
Les observateurs ne s’y trompent pas : le choix final dira mieux que tous les discours le visage de la démocratie économique américaine pour dix ans.
Un jeu à très haut risque pour l’économie américaine… et mondiale

Trump, Powell et le grand divorce : une rupture sur fond de taux
Le fond de l’affaire, c’est la relation bousculée entre Donald Trump et Jerome Powell. Le président ne cache pas son hostilité au président sortant de la Fed, qu’il accuse d’inaction, d’être “trop politique” et de refuser de suivre sa ligne dure sur la réduction des taux d’intérêt. Depuis des mois, Trump multiplie les attaques frontales sur la neutralité d’une institution souvent vue comme le dernier bastion d’indépendance à Washington. Il réclame, obstinément, une baisse spectaculaire du coût du crédit, dénonçant une stratégie “pénalisante pour le peuple”.
Impossible, pourtant, de le limoger sans motif grave : Powell tient jusqu’à la fin de son mandat, mai 2026. Cela n’empêche pas le locataire de la Maison Blanche de préparer activement la suite. Les marchés n’aiment ni la revanche, ni la volatilité. Or, la succession à la Fed, dans ce contexte, devient l’aiguillon d’une guerre idéologique entre partisans d’une monnaie stable et ceux qui veulent relancer la croissance à tout prix avant la prochaine élection. Chaque tweet, chaque pique, chaque nomination fait grimper la tension, comme un baromètre au milieu de l’ouragan.
La promesse de voir la Fed basculer du côté du politique fascine autant qu’elle terrifie : jamais la banque centrale n’a semblé aussi proche d’être une succursale de la stratégie présidentielle, jamais elle n’a été autant surveillée par le monde entier.
La pression des marchés : l’œil du cyclone sur Wall Street
Dans les tours de Manhattan, la fébrilité est à peine contenue. Les traders, les gérants de fonds, les économistes bénévoles se perdent en hypothèses, tremblant à chaque nom lancé, à chaque fuite organisée. Le positionnement de Trump ravive la crainte d’un basculement extrême : nomination d’un “tueur de taux”, nouvelle ère de laxisme monétaire, explosion du crédit… ou, à l’inverse, retour du protectionnisme monétaire à la moindre alerte. L’incertitude vire à la folie : les fonds d’investissement ajustent en urgence leurs stratégies, craignant de se réveiller un matin avec un président de la Fed prêt à dynamiter l’indépendance et rassurer les électeurs dans la foulée.
Les sociétés multinationales scrutent le dollar, tablent sur l’inconnu, réinventent de nouveaux scénarios pour l’inflation ou le chômage. Tous savent, à voix basse, que cette succession est plus qu’un dossier technique. C’est le révélateur d’un nouveau désordre mondial où la politique prend le pas sur la raison, où le marché devient sujet de la Maison Blanche plus qu’acteur souverain de son propre destin.
La mainmise potentielle sur la Fed, vraie ou fantasmée, électrise le débat mondial. La salle de marché est à la fois tribunal, théâtre et ring de boxe politique. Là, se joue sans doute le vrai prix de cette nomination à venir.
Indépendance de la Fed sur la sellette, alerte rouge sur la gouvernance
Experts, anciens banquiers centraux, prix Nobel et commentateurs sonnent l’alarme. Si la Fed bascule aux mains d’un président “servile”, ou même d’un allié idéologique du pouvoir, la confiance dans la monnaie américaine, dans la capacité du pays à affronter ses défis, serait compromise. L’enjeu, soulignent-ils, n’est pas seulement le montant du taux directeur, mais la pérennité de l’écosystème financier mondial — marché du Trésor, dette américaine, placements étrangers, stabilité géopolitique. Les annonces de Trump résonnent jusque dans les halls de la BCE et de la Banque du Japon.
Toute l’histoire monétaire récente joue ici : 2008, la crise de confiance, la volatilité de la gouvernance, la crainte d’un krach importé par l’arbitraire ou le caprice politique. La nomination prochaine doit donc rassurer, apaiser, convaincre que l’État de droit économique, si fragile, n’est pas mort. Or, tout dans le style du président sortant/entrant laisse planer le doute. Les chiens de garde de l’orthodoxie sont sur le qui-vive. Le monde entier retient sa respiration.
La Fed ne peut pas être un jouet. Mais qui, aujourd’hui, pense encore que la frontière n’a pas déjà été franchie ?
Le chantier monétaire, un enjeu de survie pour les institutions américaines

Les périls d’une banque centrale politique : le précédent Trump
Jamais le mot “dépendance” n’a été autant amalgame par le public. Dans les groupes WhatsApp des investisseurs, dans les dîners des cadres dirigeants, on rumine la même inquiétude : la possibilité réelle que le prochain président de la Fed soit “au service exclusif” de l’agenda de Trump. La perspective inquiète jusqu’aux alliés historiques – banquiers européens, fonds souverains asiatiques et partenaires du FMI.
À quoi ressemblerait une Fed alignée ? Taux débranché des fondamentaux réels, bouquets de liquidités mal calibrés, coups de barre anti-inflationnistes suivis de relances surprises, dette publique remisée au second plan – l’hypothèse est effrayante. Mais ce qui frappe, c’est la plasticité du système américain, sa capacité à tourner le dos, du jour au lendemain, à des décennies de doctrine non écrite.
Le choix à venir n’est plus seulement un geste institutionnel – il pourrait décider du statut du dollar, de l’avenir de l’épargne mondiale, des marges de manœuvre d’une Amérique désormais leader… ou paria monétaire.
Nouveaux visages, anciens enjeux : Warsh, Hassett et les inconnues
Kevin Warsh, ultra-réactif, critique inlassable du statu quo, prône un aggiornamento monétaire, une Fed “plus vive”, “plus pragmatique”, capable de résister aux schémas post-2008. Kevin Hassett, lui, incarne la fidélité professée au trumpisme économique, la promesse d’une Fed plus attentive aux besoins immédiats du président qu’à la discipline de long terme. Alicia Munnell, Christopher Waller ou Michelle Bowman sont parfois cités, dans l’ombre, comme des alternatives paradoxalement rassurantes tant elles paraissent “mainstream”.
Le choix entre le choc, la docilité ou la continuité n’est jamais évident dans l’œil de la tempête. Mais chacun sait que Warsh et Hassett, “les deux Kevins”, symbolisent les fractures de l’Amérique de 2025 : la tentation du coup d’État soft (par la nomination) et celle de la réelle démocratie pluraliste.
Rien n’est joué, tout peut encore basculer. Les insiders, eux, regardent déjà ce qui résistera au lendemain du choix… ou ce qui en restera.
Le rôle inédit de la Fed dans la campagne à venir
L’ombre de 2026 et de la présidentielle à rallonge pèse sur tout le processus. Le futur président de la Fed n’aura pas seulement à arbitrer la prochaine crise, à surveiller l’inflation ou à réamorcer l’emploi. Il devra, avant tout, convaincre l’opinion, le Congrès, les partenaires étrangers qu’il est l’homme ou la femme du consensus. Or, dans une Amérique fractionnée, chaque décision de taux, chaque communication, chaque minute d’audition devant le Sénat sera scrutée, commentée, détournée à la moindre hésitation. La Fed n’a plus l’apanage du secret, elle est l’épicentre de la prochaine campagne, le miroir grossissant d’une démagogie économique sans limite.
Le mandat à venir sera, pour l’élu(e), une traversée du désert… ou un marathon sur une vitre brisée. L’histoire, parfois, se rappelle à nous pour rappeler le prix de la légèreté politique. C’est sans doute ce que ce choix dit, aujourd’hui, à l’Amérique et au monde.
La question n’est plus “qui ?”, mais “pourquoi” ? Et “à quel prix” ?
Conclusion – La Fed en sursis : symbole, prétexte ou bouc émissaire ?

Dernier mot avant le saut : choisir la Fed, c’est choisir l’Amérique de demain
La Réserve fédérale se trouve à un carrefour historique, bousculée par un président plus déterminé que jamais à remodeler chaque organe du pouvoir à sa main. L’écartement de Scott Bessent, la montée d’hommes liges ou de technocrates frondeurs, l’intention affichée de peser sur tous les arbitrages, cristallisent une juronction capitale : la Fed sera-t-elle, demain, la digue de la raison économique ou le paravent ultime des ambitions élyséennes ? L’enjeu dépasse la nomination – il en va du monde que nous construirons, du dollar que nous dépenserons, de la confiance que nous accorderons à la plus vieille démocratie du capitalisme.
L’histoire de la Fed ne s’écrit pas tous les matins. Mais aujourd’hui, c’est à chaque minute qu’elle peut, dans l’ombre d’une salle de la Maison Blanche ou d’un hall de trading, basculer dans l’inconnu. L’Amérique doit choisir : survivre à ses passions, ou les faire régner jusque dans le temple de sa monnaie. La réponse, cette fois, n’a jamais paru aussi bruyante… ni aussi incertaine.