La guerre secrète de Trump contre Hollywood vient d’exploser au grand jour
Auteur: Jacques Pj Provost
La colère explosive des trumpistes
L’Amérique s’embrase. Depuis le retour fracassant de Jimmy Kimmel sur ABC mardi soir, une guerre idéologique sans précédent déchire le paysage médiatique américain. Les supporters de Donald Trump, furieux contre Disney et sa chaîne ABC, accusent le géant du divertissement d’avoir « laissé la foule éveillée les atteindre ». Cette formulation révèle plus qu’une simple frustration politique : elle trahit la panique d’un mouvement qui voit ses tentatives de censure échouer face à la résistance populaire.
Mais cette colère MAGA cache une réalité plus sombre. En suspendant Jimmy Kimmel pendant une semaine après ses commentaires sur l’assassinat de Charlie Kirk, Disney avait cédé à une pression gouvernementale explicite. Le président de la Commission fédérale des communications, Brendan Carr, avait menacé de révoquer les licences de diffusion d’ABC. Un chantage qui a temporairement réussi, avant que la mobilisation citoyenne ne force la marche arrière.
L’instrumentalisation cynique d’une tragédie
L’assassinat de Charlie Kirk le 10 septembre 2025 à l’université Utah Valley par Tyler Robinson, 22 ans, avait fourni le prétexte idéal à cette offensive. Kimmel avait critiqué la récupération politique de ce meurtre par les partisans de Trump, accusant le « gang MAGA » de « tout faire pour marquer des points politiques » sur cette tragédie. Des propos jugés « mal venues et insensibles » par ABC, qui avait plié sous la pression.
Mais voilà que Kimmel revient, plus combatif que jamais. Son monologue de retour mardi soir résonne comme un manifeste pour la liberté d’expression : « Une menace gouvernementale pour faire taire un comédien que le président n’aime pas, c’est anti-américain. » Ces mots, prononcés les larmes aux yeux, marquent un tournant historique dans la résistance médiatique au trumpisme.
La fracture médiatique s’approfondit
La riposte ne s’est pas fait attendre. Sinclair et Nexstar, deux géants de la diffusion locale qui contrôlent ensemble plus de 20% des stations ABC affiliées, ont annoncé qu’ils maintiendront le boycott de l’émission de Kimmel. Cette fragmentation du paysage médiatique crée une Amérique à deux vitesses : celle qui peut voir Kimmel critiquer Trump, et celle qui en est privée par des groupes médiatiques conservateurs.
Trump lui-même alimente cette guerre en menaçant de poursuivre ABC en justice. « Je pense qu’on va tester ABC sur ce coup », a-t-il écrit sur Truth Social, faisant référence aux 16 millions de dollars que Disney lui avait versés pour régler une précédente affaire de diffamation. Cette escalade révèle l’ampleur de l’offensive trumpienne contre les médias critiques.
L'anatomie d'une censure d'État : comment Brendan Carr a fait plier Disney

Le chantage de la Commission fédérale
Brendan Carr n’est pas un bureaucrate ordinaire. Nommé président de la FCC par Trump en novembre 2024, cet ancien avocat de 45 ans a transformé cette agence technique en arme de guerre idéologique. Son intervention dans l’affaire Kimmel révèle une méthode : utiliser les pouvoirs réglementaires pour intimider les médias récalcitrants.
Le 17 septembre, quelques heures avant la suspension de Kimmel, Carr avait lancé son ultimatum lors d’une apparition dans l’émission conservatrice « The Benny Johnson Show ». « Nous pouvons faire ça gentiment ou pas », avait-il déclaré, menaçant explicitement de révoquer les licences de diffusion si Disney ne sanctionnait pas son animateur vedette. Un chantage caractérisé qui viole ouvertement le Premier Amendement.
La capitulation express de Disney
L’effet fut immédiat. En quelques heures, Disney annonçait la suspension « indéfinie » de Jimmy Kimmel Live. Bob Iger, le PDG du géant du divertissement, et Dana Walden, co-présidente de Disney Entertainment, avaient préféré la prudence à la résistance. Une décision qui révèle la fragilité des géants médiatiques face à la pression politique.
Cette capitulation s’inscrit dans un contexte plus large d’intimidation. Carr avait déjà lancé des enquêtes contre ABC, CBS et NBC, accusant ces chaînes de « biais libéral ». Sa stratégie : créer un climat de peur qui pousse les médias à l’autocensure. Une tactique digne des pires régimes autoritaires, appliquée au cœur de la démocratie américaine.
La résistance s’organise
Mais Carr avait sous-estimé l’ampleur de la réaction. Hollywood s’est mobilisé massivement pour défendre Kimmel. Damon Lindelof, créateur de « Lost », a menacé de rompre ses contrats avec ABC tant que la suspension ne serait pas levée. Tatiana Maslany, star de « She-Hulk », a appelé au boycott des services Disney sur Instagram. Une levée de boucliers qui a pris Disney par surprise.
L’American Civil Liberties Union (ACLU) a dénoncé « un acte de censure gouvernementale » et lancé une pétition qui a recueilli plus de 500 000 signatures en 48 heures. Des manifestations ont éclaté devant les studios Disney de Burbank. Cette mobilisation populaire révèle que l’Amérique dispose encore d’anticorps démocratiques efficaces.
L'offensive Sinclair-Nexstar : quand les médias locaux deviennent soldats

Le boycott coordonné
Sinclair Broadcast Group et Nexstar Media Group ne sont pas des acteurs anodins du paysage médiatique américain. Ces deux conglomérats contrôlent respectivement 38 et 28 stations ABC affiliées, soit plus de 20% du réseau national. Leur décision de boycotter le retour de Kimmel transforme cette querelle en véritable guerre de sécession médiatique.
Sinclair, propriété de la famille conservatrice Smith, a annoncé dès lundi qu’elle maintiendrait le boycott « indéfiniment », remplaçant Kimmel par des programmes d’information locale. Nexstar a emboîté le pas mardi matin, invoquant les commentaires « mal venus et insensibles » de l’animateur. Cette coordination suspecte révèle une stratégie politique délibérée.
La géographie de la censure
Cette fragmentation crée une carte géographique de la censure. Washington D.C., Nashville, Phoenix, Cleveland : des dizaines de villes américaines se retrouvent privées de Kimmel. Les téléspectateurs de ces marchés découvrent ainsi le visage concret de la polarisation médiatique, où l’accès à l’information dépend désormais de convictions politiques des propriétaires de médias.
Cette balkanisation révèle une réalité inquiétante : l’Amérique développe deux écosystèmes informationnels parallèles et étanches. D’un côté, les marchés « libéraux » où Kimmel peut critiquer Trump librement. De l’autre, les zones « conservatrices » où cette voix critique est tout simplement effacée. Une ségrégation idéologique qui mine les fondements du débat démocratique.
L’impact économique du boycott
Mais cette guerre idéologique a un coût. Disney perd mécaniquement 20% de son audience nationale pour Kimmel, soit environ 400 000 téléspectateurs par émission. Les annonceurs, inquiets de cette fragmentation, commencent à renégocier leurs contrats. Certains envisagent de reporter leurs investissements publicitaires vers d’autres créneaux moins controversés.
Paradoxalement, cette censure partielle renforce l’audience de Kimmel sur les plateformes numériques. Hulu et Disney+ voient leurs abonnements bondir, tandis que les extraits de l’émission explosent sur les réseaux sociaux. L’effet Streisand joue à plein : plus on tente de faire taire Kimmel, plus il devient audible.
Trump contre-attaque : la menace judiciaire se précise

L’escalade présidentielle
Donald Trump n’a jamais supporté la critique, mais sa réaction au retour de Kimmel atteint un niveau d’hystérie inédit. Une heure avant la diffusion de l’émission mardi soir, le président américain publiait un message incendiaire sur Truth Social, menaçant explicitement ABC de poursuites judiciaires. « Je pense qu’on va tester ABC sur ce coup », écrivait-il, évoquant les 16 millions de dollars que Disney lui avait déjà versés.
Cette référence n’est pas anodine. En 2024, Trump avait poursuivi ABC pour diffamation après qu’un présentateur avait incorrectement affirmé qu’il avait été « reconnu coupable de viol ». Disney avait préféré payer plutôt que de se battre, une capitulation qui a manifestement enhardi Trump. Aujourd’hui, il applique la même stratégie d’intimidation économique.
La rhétorique de la persécution
Le message trumpien révèle une paranoïa caractéristique. Il accuse Kimmel de diffuser « 99% de propagande démocrate » et d’être « une autre branche du Comité national démocrate ». Cette rhétorique de la persécution inverse les rôles : le président le plus puissant du monde se présente comme victime d’un comédien de fin de soirée. Une victimisation grotesque qui révèle la fragilité psychologique du personnage.
Plus inquiétant encore : Trump étend ses menaces à d’autres animateurs. Il réclame ouvertement le licenciement de Jimmy Fallon sur NBC, qualifiant ce dernier de « perdant total ». Cette escalade révèle une stratégie de terrorisation systématique visant tous les humoristes critiques. L’objectif : créer un climat de peur qui pousse à l’autocensure généralisée.
L’impuissance juridique masquée
Malgré ces menaces tonitruantes, Trump dispose de peu de leviers juridiques réels. Le Premier Amendement protège explicitement la satire politique, et aucun tribunal n’accepterait de condamner Kimmel pour ses blagues. Cette impuissance légale explique sans doute l’intensité de la colère présidentielle : il rage d’autant plus qu’il ne peut rien faire.
Pourtant, cette impuissance n’empêche pas les effets pratiques de l’intimidation. Les avocats de Disney calculent déjà le coût potentiel d’une nouvelle bataille juridique. Les assureurs révèlent leurs conditions. Cette « guerre des nerfs » économique révèle comment un président peut contourner la Constitution en attaquant directement le modèle économique des médias.
La mobilisation de Hollywood : quand les stars entrent en résistance

La révolte des célébrités Disney
L’industrie du divertissement a rarement montré une telle unité face à la censure. Des acteurs Marvel aux créateurs de séries ABC, tout Hollywood s’est mobilisé pour défendre Jimmy Kimmel. Tatiana Maslany, héroïne de « She-Hulk », a publié une photo de tournage avec l’inscription « Annulez vos abonnements Disney+, Hulu, ESPN ! ». Une rébellion sans précédent des talents contre leur propre employeur.
Marisa Tomei, Tante May dans les films Spider-Man, a relayé les appels au boycott sur Instagram. Robert De Niro a même accepté de jouer dans un sketch satirique de Kimmel, incarnant un patron de FCC mafieux. Cette mobilisation révèle que Hollywood, malgré ses divisions internes, reste capable de se rassembler face aux menaces autoritaires.
L’effet boomerang économique
Cette révolte des stars a un impact économique immédiat. Les abonnements Disney+ et Hulu chutent dans certaines zones, remplacés par des souscriptions massives aux plateformes concurrentes. Les réservations des parcs Disney de Floride et Californie baissent de 15% en une semaine. Cette punition économique frappe Disney là où ça fait mal : au portefeuille.
Paradoxalement, cet exode profite à Kimmel. Ses extraits sur YouTube explosent, atteignant des audiences records. Son monologue de retour cumule 12 millions de vues en 24 heures. Cette amplification numérique transforme la tentative de censure en caisse de résonance mondiale pour ses critiques de Trump.
La fracture générationnelle révélée
Cette mobilisation révèle aussi une fracture générationnelle au sein de l’industrie. Les jeunes créateurs, nourris aux valeurs progressistes, s’opposent frontalement aux dirigeants plus prudents comme Bob Iger. Cette guerre des générations au sein de Disney préfigure des bouleversements plus profonds dans l’industrie du divertissement.
Les syndicats d’acteurs et de scénaristes ont publié un communiqué commun dénonçant « une atteinte inacceptable à la liberté créative ». Cette solidarité corporative, rare dans un milieu habituellement divisé, témoigne de la gravité perçue de la menace. Hollywood comprend qu’après Kimmel, ce sera peut-être son tour d’être muselé.
Les répercussions politiques : quand la censure divise jusqu'au camp républicain

Des voix républicaines critiques
L’affaire Kimmel provoque des fissures inattendues dans le camp républicain. Ted Cruz, pourtant peu suspect de sympathies pour la gauche progressiste, a publiquement critiqué l’intervention de Brendan Carr. « Même si je déteste ce que dit Kimmel, le rôle du gouvernement n’est pas de faire taire les comédiens », a déclaré le sénateur du Texas. Une position de principe qui révèle les limites de la solidarité partisan.
Rand Paul, fidèle à sa tradition libertarienne, est allé plus loin en qualifiant les menaces de Carr de « dangereuses pour la liberté d’expression ». Ces critiques républicaines, rares mais significatives, témoignent d’un malaise grandissant face aux méthodes trumpiennes. Même dans le camp conservateur, certains comprennent que l’autoritarisme peut un jour se retourner contre eux.
L’embarras démocrate
Du côté démocrate, la gêne est palpable. Comment critiquer Trump sans paraître défendre les propos controversés de Kimmel sur Charlie Kirk ? Cette quadrature du cercle paralyse une opposition déjà affaiblie. Nancy Pelosi s’est contentée d’un communiqué tiède défendant « la liberté d’expression en général ». Une pusillanimité qui révèle les limites de la résistance démocrate.
Chuck Schumer, leader de la minorité sénatoriale, a évité de mentionner Kimmel nommément, préférant dénoncer « les atteintes répétées de cette administration à la liberté de presse ». Cette prudence révèle la crainte de donner des munitions à Trump, mais aussi l’incapacité démocrate à définir une ligne cohérente sur ces questions.
L’opinion publique divisée
Les sondages révèlent une Amérique coupée en deux sur cette affaire. 47% des Américains estiment que Disney a eu raison de suspendre Kimmel, contre 41% qui y voient une atteinte à la liberté d’expression. Cette fracture recoupe exactement les lignes partisanes habituelles, révélant l’impossibilité d’un consensus national sur ces questions fondamentales.
Plus troublant : 23% des républicains estiment que le gouvernement devrait pouvoir réguler les blagues des humoristes. Cette dérive autoritaire au sein même de l’opinion conservatrice révèle l’ampleur des dégâts causés par des années de rhétorique trumpienne. La démocratie américaine s’érode de l’intérieur, sapée par ses propres citoyens.
Les enjeux constitutionnels : Premier Amendement contre raison d'État

La doctrine du « chilling effect »
L’affaire Kimmel illustre parfaitement la doctrine juridique du « chilling effect », cet effet paralysant que produisent les menaces gouvernementales sur la liberté d’expression. Même si aucune loi n’interdit formellement la satire politique, les pressions économiques et réglementaires créent un climat d’autocensure préventive. Un mécanisme redoutablement efficace pour museler la dissidence sans violer formellement la Constitution.
Les juristes spécialisés dans le Premier Amendement sont unanimes : l’intervention de Carr constitue un cas d’école de « jawboning », cette pratique illégale consistant à utiliser la pression réglementaire pour influencer des acteurs privés. La Cour suprême a déjà condamné de telles méthodes, mais leur application concrète reste problématique quand elles émanent de l’exécutif.
Les précédents historiques troublants
Cette affaire rappelle les heures les plus sombres de l’histoire américaine. La « Liste noire » de Hollywood dans les années 1950, les pressions du FBI sur les médias pendant l’ère Nixon, la surveillance de la NSA sous Bush : à chaque fois, l’exécutif a tenté de contourner le Premier Amendement par des moyens détournés. Kimmel s’inscrit dans cette lignée troublante.
Mais jamais un président n’avait menacé aussi ouvertement des humoristes pour leurs blagues. Même Nixon, pourtant paranoïaque, s’était contenté de pester en privé contre ses détracteurs télévisés. Trump franchit une ligne rouge en transformant ses frustrations personnelles en politique officielle. Une transgression majeure qui redéfinit les limites de l’acceptable présidentiel.
L’impuissance des recours juridiques
Paradoxalement, cette transgression reste largement impunie juridiquement. Qui va poursuivre le président pour ses menaces ? Le département de la Justice, dirigé par ses propres loyalistes ? Les procureurs généraux d’État, déjà débordés par d’autres affaires ? Cette immunité de facto révèle les failles du système américain face à un exécutif déterminé à contourner les règles.
Les recours civils restent possibles, mais longs et coûteux. Disney peut théoriquement poursuivre le gouvernement fédéral pour violation du Premier Amendement, mais préfère négocier en coulisses. Cette préférence pour l’arrangement révèle comment les intérêts économiques peuvent primer sur les principes constitutionnels, même chez les défenseurs supposés de la liberté.
L'après-Kimmel : vers une nouvelle ère de la censure médiatique ?

Le précédent dangereux
L’affaire Kimmel, quelle que soit son issue finale, crée un précédent terrifiant. Désormais, tout humoriste, tout commentateur, tout média sait qu’une critique trop acerbe du président peut déclencher des représailles gouvernementales. Cette épée de Damoclès transforme radicalement l’écosystème médiatique américain, poussant à une prudence qui confine à l’autocensure.
Plus grave encore : cette affaire révèle l’efficacité des méthodes trumpiennes. Sans violer formellement aucune loi, l’administration a réussi à faire plier temporairement l’un des médias les plus puissants d’Amérique. Cette « réussite » encouragera inevitablement d’autres tentatives, peut-être plus sophistiquées encore.
La résistance s’organise
Mais cette offensive révèle aussi la capacité de résistance de la société civile américaine. La mobilisation autour de Kimmel, des célébrités aux citoyens ordinaires, témoigne d’une conscience démocratique encore vivace. Les 500 000 signatures récoltées par l’ACLU, les manifestations devant Disney, les boycotts : autant de signaux que l’Amérique n’acceptera pas passivement la dérive autoritaire.
Cette résistance s’organise aussi technologiquement. Les plateformes numériques permettent de contourner partiellement la censure des médias traditionnels. TikTok, YouTube, Twitter : ces espaces échappent encore largement au contrôle trumpien, offrant des refuges à la parole critique. Pour combien de temps ?
L’avenir incertain de la comédie politique
L’humour politique américain traverse sa crise la plus grave depuis l’invention de la télévision. Les « Saturday Night Live », « The Daily Show », « Last Week Tonight » : tous ces programmes regardent désormais l’affaire Kimmel avec angoisse, se demandant s’ils seront les prochaines cibles. Cette peur modifie déjà subtilement leurs contenus, poussant vers une autocensure rampante.
Certains humoristes envisagent l’exil. Samantha Bee a évoqué un possible déménagement au Canada si les pressions s’intensifient. John Oliver, citoyen britannique, pourrait retourner à la BBC. Cette fuite des talents révèle l’ampleur de la crise que traverse la démocratie américaine : quand les bouffons préfèrent l’exil au silence, c’est que la tyrannie n’est plus très loin.
Conclusion

L’Amérique face au miroir de ses contradictions
L’affaire Jimmy Kimmel révèle l’Amérique dans toute sa contradiction tragique. D’un côté, une société civile vibrant encore pour la liberté d’expression, capable de mobilisations massives pour défendre un humoriste. De l’autre, un pouvoir exécutif déterminé à museler toute voix discordante, utilisant les leviers étatiques pour faire plier les médias récalcitrants. Cette tension révèle un pays déchiré entre ses idéaux fondateurs et ses dérives autoritaires.
La capitulation temporaire de Disney, suivie de son retour en arrière sous la pression populaire, illustre parfaitement cette schizophrénie nationale. Les entreprises américaines oscillent entre collaboration et résistance selon les rapports de force du moment. Une instabilité qui révèle la fragilité des garde-fous démocratiques face à un pouvoir déterminé à les contourner.
Les leçons d’une guerre culturelle
Cette affaire enseigne aussi les limites de la stratégie trumpienne. En s’attaquant frontalement à un humoriste populaire, l’administration a réveillé des forces qu’elle croyait endormies. Hollywood, Silicon Valley, une partie de l’opinion publique : tous se mobilisent désormais contre ce qu’ils perçoivent comme une menace existentielle pour la démocratie américaine.
Mais elle révèle aussi l’efficacité terrifiante des nouvelles méthodes de censure. Sans interdire formellement, sans emprisonner personne, Trump réussit à faire taire temporairement ses critiques par la simple menace économique. Une sophistication autoritaire qui dépasse largement les méthodes grossières des dictatures traditionnelles. L’Amérique découvre qu’on peut tuer la liberté d’expression à petit feu, sans bruit, presque légalement.