La Russie frappe le réseau électrique ukrainien pendant que Trump arme Kiev de Tomahawks
Auteur: Maxime Marquette
Un double coup de tonnerre qui change tout
Le 12 octobre 2025, deux événements majeurs secouent l’échiquier géopolitique mondial avec une violence inédite. D’un côté, la Russie lance une vague massive de frappes contre l’infrastructure électrique ukrainienne — un retour aux tactiques de l’hiver précédent qui avaient plongé des millions de civils dans le noir et le froid. De l’autre, Moscou exprime une inquiétude extrême face aux révélations concernant la livraison potentielle de missiles de croisière Tomahawk américains à l’Ukraine… Des armes capables de frapper jusqu’à 1 600 kilomètres de distance. C’est la confrontation directe entre deux escalades symétriques, deux paris sur l’intimidation, deux façons de dire : nous n’abandonnerons jamais. Et entre ces deux forces titanesques, un peuple ukrainien pris en otage, privé d’électricité pendant que les chancelleries s’affolent.
Une stratégie russe qui revient hanter l’hiver
Les attaques contre le réseau énergétique ne sont pas nouvelles — elles ont marqué l’hiver 2022-2023 avec une brutalité calculée. Mais leur retour en force maintenant, alors que les températures commencent à chuter, révèle une intention claire : briser le moral ukrainien avant l’arrivée du froid. Les missiles russes, drones Shahed et frappes de précision visent transformateurs, centrales thermiques, sous-stations électriques. Tout ce qui maintient les lumières allumées, les hôpitaux fonctionnels, les chauffages actifs. C’est une guerre d’usure portée contre les civils, une stratégie que Moscou refuse d’admettre mais que chaque explosion confirme. Les chiffres parlent : des dizaines de frappes en quelques heures, des coupures massives dans plusieurs régions, des équipes de réparation mobilisées sous le feu (parfois littéralement). Et pendant ce temps… Washington sort une carte inattendue de son jeu.
Des Tomahawks qui affolent le Kremlin
Quand le New York Times révèle que l’Ukraine aurait demandé des missiles Tomahawk dans son plan de victoire présenté à Biden, le Kremlin réagit comme si on venait de franchir une ligne rouge supplémentaire. Pourquoi cette réaction si intense ? Parce que les Tomahawk changent radicalement la donne. Ces missiles de croisière, lancés depuis des plateformes terrestres ou maritimes, peuvent atteindre des cibles stratégiques russes bien au-delà de la zone de front — bases militaires en Crimée, centres de commandement, dépôts logistiques profondément ancrés en territoire occupé, voire en Russie même. Moscou parle d’escalade inacceptable, de provocation directe, de risque de guerre généralisée. Les porte-paroles du Kremlin multiplient les avertissements sombres, évoquant des conséquences imprévisibles. Mais derrière cette rhétorique… une peur très concrète que l’Ukraine acquière enfin la capacité de frapper où ça fait vraiment mal.
L'offensive russe contre le réseau électrique

Une campagne méthodique de destruction
Les frappes russes contre l’infrastructure énergétique ukrainienne suivent un schéma précis, presque scientifique dans sa cruauté. Les analystes militaires identifient plusieurs phases : d’abord, reconnaissance par drones pour identifier les points névralgiques du réseau. Ensuite, frappes combinées utilisant missiles balistiques Iskander, missiles de croisière Kalibr, et essaims de drones Shahed-136 iraniens. L’objectif ? Saturer les défenses aériennes ukrainiennes, forcer Kiev à choisir quelles cibles protéger. Les transformateurs à haute tension deviennent des priorités absolues — leur destruction paralyse des régions entières pendant des semaines. Les centrales thermiques subissent des dommages répétés, obligeant l’Ukraine à importer massivement d’électricité depuis l’Union européenne. Certaines estimations parlent de 30 à 40% des capacités de production détruites ou endommagées depuis le début de la guerre. Et chaque réparation devient une course contre la montre… avant la prochaine salve.
L’impact humanitaire catastrophique
Derrière les statistiques froides se cache une réalité humaine dévastatrice. Des millions d’Ukrainiens vivent désormais avec des coupures d’électricité quotidiennes — parfois 12, 18, même 20 heures sans courant. Les hôpitaux fonctionnent sur générateurs, rationnant leur carburant pour les urgences vitales. Les écoles ferment. Les commerces ne peuvent plus réfrigérer leurs stocks. Les pompes à eau s’arrêtent, privant des quartiers entiers d’eau courante. Et quand l’hiver arrive vraiment… c’est le chauffage qui devient impossible. Les familles se regroupent dans une seule pièce, brûlent ce qu’elles trouvent, espèrent que les températures ne descendront pas trop bas. Les personnes âgées, les malades chroniques, les enfants en bas âge deviennent des victimes potentielles de cette guerre énergétique. Moscou le sait. Moscou le calcule. C’est précisément pour ça que la stratégie persiste — briser la volonté de résistance en rendant la vie quotidienne insupportable.
Les réponses ukrainiennes et internationales
Face à cette offensive systématique, l’Ukraine déploie une résilience remarquable. Les équipes de réparation travaillent jour et nuit, souvent sous menace de nouvelles frappes. Le gouvernement met en place des centres de chauffage collectifs dans les grandes villes, des points de recharge pour téléphones et appareils médicaux. L’opérateur énergétique national DTEK investit massivement dans la décentralisation du réseau — créer des micro-réseaux plus difficiles à paralyser d’un seul coup. L’aide internationale afflue : transformateurs, générateurs, systèmes de défense aérienne supplémentaires. L’Union européenne accélère l’intégration du réseau ukrainien au sien, permettant des imports massifs. Mais tout cela reste un pansement sur une blessure qui continue de saigner. Parce qu’à chaque réparation, Moscou peut revenir frapper. C’est une guerre d’attrition où l’agresseur conserve l’initiative, choisit le moment, choisit la cible. Et l’Ukraine… encaisse, répare, résiste.
Les missiles Tomahawk et la panique russe

Une arme qui change les règles du jeu
Le missile de croisière BGM-109 Tomahawk représente une classe à part dans l’arsenal américain. Développé depuis les années 1970 et constamment modernisé, il combine portée exceptionnelle (jusqu’à 1 600 kilomètres pour certaines variantes), précision redoutable (quelques mètres d’erreur grâce au GPS et à la navigation terrain), et capacité à voler à très basse altitude pour éviter les radars. Contrairement aux missiles balistiques qui suivent une trajectoire prévisible, le Tomahawk peut contourner les défenses, ajuster son trajet en vol, frapper depuis des angles inattendus. Pour l’Ukraine, acquérir de telles armes signifierait pouvoir menacer des cibles jusqu’alors intouchables : le pont de Crimée (encore), les bases aériennes de Crimée profonde, les centres de commandement russes à Rostov-sur-le-Don, les dépôts de munitions bien à l’arrière du front. C’est une projection de puissance que Kiev n’a jamais possédée — et que Moscou redoute par-dessus tout.
La réaction hystérique du Kremlin
Quand les révélations sur les demandes ukrainiennes de Tomahawks ont filtré, le Kremlin a explosé. Les porte-paroles officiels ont multiplié les déclarations alarmistes : Maria Zakharova parle d’escalade dangereuse, Dmitri Peskov évoque des conséquences imprévisibles, les députés de la Douma menacent de frappes nucléaires tactiques. Les médias d’État russes diffusent des analyses apocalyptiques montrant comment des Tomahawks pourraient atteindre Moscou elle-même (techniquement faux depuis le territoire ukrainien, mais qu’importe la vérité). Cette réaction disproportionnée révèle une anxiété profonde : Moscou sait que sa supériorité militaire repose en grande partie sur sa capacité à frapper l’Ukraine en profondeur tout en gardant son propre territoire sanctuarisé. Si cette asymétrie disparaît… toute la logique de la guerre change. Soudain, les généraux russes devraient défendre leurs propres bases, disperser leurs forces, protéger leurs lignes d’approvisionnement. C’est un cauchemar logistique et stratégique que le Kremlin refuse même d’envisager.
Les hésitations américaines
Mais Washington n’a jamais confirmé la livraison de Tomahawks à l’Ukraine. Pourquoi cette prudence ? Plusieurs raisons s’entremêlent. D’abord, le coût : chaque missile Tomahawk vaut environ deux millions de dollars, et les stocks américains ne sont pas infinis. Ensuite, la complexité : ces armes nécessitent une formation poussée, une infrastructure de lancement spécifique, une chaîne logistique sophistiquée. Mais surtout… la peur de l’escalade. L’administration Biden marche sur un fil depuis le début du conflit : aider l’Ukraine suffisamment pour qu’elle résiste, mais pas au point de provoquer une réaction russe catastrophique. Les Tomahawks représentent précisément cette ligne rouge que Washington hésite à franchir. Chaque nouvel armement suit le même schéma : d’abord refusé (chars Abrams, F-16, missiles ATACMS), puis finalement livré après des mois de débat. Les Tomahawks suivront-ils ce chemin ? Peut-être. Probablement. Mais pas maintenant. Pas encore.
La doctrine de l'escalade contrôlée

Moscou teste les limites occidentales
La stratégie russe depuis février 2022 suit une logique d’escalade graduelle : franchir des seuils progressivement, observer les réactions occidentales, ajuster en conséquence. D’abord l’invasion elle-même (seuil franchi). Puis les frappes contre les civils (franchi). Puis les annexions illégales (franchi). Puis les menaces nucléaires répétées (brandir sans utiliser). Chaque fois, Moscou attend de voir si l’Occident réagit avec des sanctions supplémentaires, des livraisons d’armes accrues, une implication directe. Et chaque fois que la réponse reste mesurée, le Kremlin en conclut qu’il peut aller un cran plus loin. Les attaques contre l’infrastructure énergétique s’inscrivent dans cette logique : techniquement des crimes de guerre selon le droit international, mais sans conséquences immédiates pour Moscou. Poutine calcule que l’Occident ne franchira jamais le Rubicon de l’intervention directe — et jusqu’ici, il a raison. Cette guerre devient un jeu d’échecs où chaque joueur teste les limites de l’autre, sachant qu’un faux pas pourrait déclencher l’apocalypse.
L’Occident pris au piège de ses propres peurs
Face à cette escalade russe, les capitales occidentales sont paralysées par le dilemme du prisonnier. Chaque pays sait qu’aider davantage l’Ukraine serait moralement juste et stratégiquement sensé — affaiblir la Russie maintenant évite des conflits futurs. Mais chacun craint aussi d’être celui qui provoquera la riposte fatale. Et si fournir des Tomahawks poussait Poutine à utiliser l’arme nucléaire ? Et si autoriser des frappes en profondeur en Russie déclenchait des attaques contre l’OTAN ? Ces questions hantent les décideurs occidentaux, les condamnant à une prudence excessive. Résultat : l’aide arrive toujours trop tard, en quantités insuffisantes, avec des restrictions d’emploi frustrantes. L’Ukraine reçoit des F-16 mais ne peut pas frapper les aérodromes russes d’où décollent les bombardiers. Elle obtient des HIMARS mais pas assez de munitions. Elle demande des Patriot et en reçoit quelques batteries — juste assez pour protéger Kiev, pas assez pour couvrir l’ensemble du pays. C’est une stratégie qui garantit une guerre longue, coûteuse, meurtrière… mais qui évite (espère-t-on) le pire absolu.
Les signaux contradictoires de Washington
L’administration américaine envoie des messages schizophrènes depuis des mois. D’un côté, Biden affirme que les États-Unis soutiendront l’Ukraine aussi longtemps que nécessaire. De l’autre, Washington refuse systématiquement les demandes d’armements les plus efficaces. Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale, répète que l’objectif est d’aider l’Ukraine à négocier depuis une position de force — mais comment négocier en position de force quand on manque de munitions, d’avions, de missiles à longue portée ? Cette contradiction reflète les divisions internes américaines : le Pentagone veut affaiblir la Russie durablement, le Département d’État craint l’escalade nucléaire, le Congrès est tiraillé entre bellicistes républicains et isolationnistes trumpistes. Et pendant que Washington débat… les Ukrainiens meurent, les infrastructures brûlent, Poutine consolide ses gains territoriaux. Le temps joue contre Kiev, et Moscou le sait.
Les conséquences géopolitiques immédiates

L’Ukraine coincée entre espoir et désespoir
Pour Kiev, ces développements simultanés créent une situation surréaliste. D’un côté, l’espoir que l’Occident finisse par fournir les armes nécessaires pour changer le cours de la guerre — les Tomahawks deviennent un symbole de cette possibilité. De l’autre, la réalité brutale des frappes énergétiques qui plongent le pays dans l’obscurité et rappellent que la guerre est loin d’être gagnée. Zelensky multiplie les appels désespérés : donnez-nous les outils, et nous finirons le travail. Mais chaque nouveau discours sonne un peu plus amer, un peu plus fatigué. L’euphorie de la contre-offensive de 2023 s’est dissipée. Le front s’est stabilisé. La Russie tient toujours 20% du territoire ukrainien. Et maintenant, alors que l’hiver approche, c’est encore la population civile qui va souffrir — pendant que les chancelleries occidentales débattent philosophiquement de ce qu’il convient de faire. Cette dissonance entre l’urgence ukrainienne et la lenteur occidentale crée une frustration toxique qui pourrait, à terme, fissurer l’unité du camp pro-Kiev.
La Russie confortée dans sa stratégie
Moscou observe ces hésitations occidentales avec une satisfaction calculée. Chaque débat public sur les Tomahawks, chaque article analysant les risques d’escalade, chaque déclaration prudente de Biden confirme au Kremlin que sa stratégie fonctionne. L’Occident a peur. L’Occident est divisé. L’Occident ne franchira jamais certaines lignes. Fort de cette analyse, Poutine peut continuer à intensifier ses frappes contre les infrastructures civiles, sachant qu’il ne subira que des condamnations verbales. Les sanctions économiques mordent, certes — l’économie russe souffre, les budgets régionaux s’effondrent, la classe moyenne s’appauvrit. Mais le régime tient. La répression intérieure fonctionne. Et tant que les élites restent fidèles (ou terrorisées), Poutine peut se permettre de mener une guerre d’usure indéfiniment. Le temps, croit-il, joue en sa faveur : l’Ukraine s’épuise, l’Occident se lasse, Trump pourrait revenir au pouvoir et couper l’aide américaine. Attendre, frapper, tenir — c’est toute la doctrine russe résumée en trois mots.
L’Europe tiraillée entre solidarité et fatigue
Du côté européen, les fissures commencent à apparaître. Les pays baltes, la Pologne, les nations nordiques restent fermement pro-Ukraine, prêts à augmenter l’aide militaire et financière. Mais ailleurs… la lassitude s’installe. L’Allemagne hésite à livrer des Taurus par peur de provoquer Moscou. La France parle beaucoup mais livre peu. La Hongrie d’Orbán bloque systématiquement les décisions européennes nécessitant l’unanimité. Et dans plusieurs pays, la montée de partis populistes pro-russes menace de faire basculer les majorités parlementaires. Les opinions publiques européennes, fatiguées par l’inflation partiellement causée par la guerre, commencent à se demander combien de temps encore il faudra soutenir Kiev. Cette érosion progressive de la solidarité européenne est exactement ce que Poutine espère — et ce que les frappes contre l’infrastructure énergétique visent à accélérer. Créer une crise humanitaire assez grave pour que l’Europe soit submergée de réfugiés ukrainiens, assez coûteuse pour que les contribuables européens se rebellent. C’est une guerre totale, menée sur tous les fronts — militaire, économique, informationnelle, psychologique.
Les scénarios d'escalade possibles

Si les Tomahawks sont livrés
Imaginons que Washington franchisse finalement le pas et livre des Tomahawks à l’Ukraine. Les conséquences seraient immédiates et multiples. D’abord, sur le plan militaire : Kiev pourrait enfin frapper en profondeur les bases aériennes russes, détruire les centres de commandement, paralyser les lignes logistiques ennemies. Le pont de Crimée, cible obsessionnelle depuis des mois, deviendrait vulnérable. Les dépôts de munitions à Rostov, Belgorod, même Koursk pourraient être touchés. La Russie serait contrainte de disperser ses forces, d’augmenter drastiquement ses dépenses en défense aérienne, de repenser toute sa stratégie offensive. Mais… Moscou riposterait. Comment ? Impossible à prédire précisément. Peut-être des frappes massives contre le centre de Kiev. Peut-être des sabotages contre des infrastructures critiques en Europe. Peut-être — scénario cauchemardesque — une démonstration d’arme nucléaire tactique en mer Noire ou au-dessus de la zone d’exclusion de Tchernobyl. Poutine a répété qu’il utiliserait tous les moyens nécessaires pour défendre ce qu’il considère comme le territoire russe (incluant les régions annexées illégalement). Le prend-on au sérieux ? Devrait-on ?
Si la stratégie énergétique russe réussit
Autre scénario : les frappes contre l’infrastructure électrique atteignent leur objectif. L’hiver 2025-2026 devient insoutenable pour la population ukrainienne. Des millions de personnes fuient vers l’Europe occidentale, créant une crise migratoire massive. Les hôpitaux ne peuvent plus fonctionner, augmentant drastiquement la mortalité civile. Le moral s’effondre. Zelensky subit des pressions internes croissantes pour négocier, même dans des conditions défavorables. Moscou, sentant l’opportunité, propose un cessez-le-feu gelant les lignes actuelles — gardant la Crimée, le Donbass, une partie de Zaporijia et Kherson. L’Ukraine, épuisée, accepte faute d’alternative. L’Occident, soulagé d’en finir, valide cet accord. Poutine remporte sa guerre… non par victoire militaire éclatante, mais par destruction méthodique de la capacité ukrainienne à continuer. C’est le scénario que redoute Kiev, celui que Moscou espère, celui que certaines capitales occidentales — honteusement — considèrent comme un moindre mal acceptable.
Si le statu quo perdure
Troisième possibilité : rien ne change fondamentalement. Les Tomahawks ne sont pas livrés. Les frappes énergétiques continuent mais sans briser la résistance ukrainienne. Le front reste globalement figé. La guerre s’enlise dans une impasse prolongée, ressemblant de plus en plus à la guerre de Corée — techniquement toujours active depuis 1953, figée sur une ligne d’armistice jamais officiellement transformée en paix. L’Ukraine garde son indépendance et la majeure partie de son territoire, mais abandonne de facto les régions occupées. La Russie conserve ses gains mais au prix d’une économie exsangue, d’un isolement international durable, d’une dépendance totale vis-à-vis de la Chine. L’Europe vit avec une menace russe permanente à ses frontières. Les États-Unis financent indéfiniment la défense ukrainienne, créant des tensions budgétaires domestiques. C’est le scénario du pourrissement général — personne ne gagne vraiment, tout le monde perd un peu, la violence continue à petit feu pendant des décennies. Sombre ? Oui. Plausible ? Malheureusement.
Les leçons stratégiques émergentes

La guerre hybride comme nouvelle norme
Ce conflit redéfinit ce que signifie faire la guerre au XXIe siècle. Ce n’est plus seulement des armées qui s’affrontent sur un champ de bataille. C’est une confrontation multidimensionnelle combinant frappes militaires, guerre informationnelle, sabotage énergétique, manipulation économique, pressions diplomatiques, campagnes de désinformation. La Russie a compris qu’elle ne peut pas vaincre l’Ukraine militairement — pas tant que l’Occident fournit armes et munitions. Alors elle vise le moral, les infrastructures, la capacité de la société ukrainienne à fonctionner normalement. C’est une guerre d’attrition totale où chaque aspect de la vie devient un champ de bataille. Et cette approche va faire école. Les futurs conflits ressembleront à celui-ci : asymétriques, prolongés, hybrides, visant autant les populations que les armées. C’est une révolution dans les affaires militaires dont nous ne mesurons pas encore toutes les implications — mais qui redéfinira la sécurité internationale pour les décennies à venir.
L’importance cruciale de la résilience civile
Si l’Ukraine a tenu jusqu’ici malgré les frappes dévastatrices, c’est grâce à une résilience extraordinaire de sa population. Les Ukrainiens ont développé des mécanismes d’adaptation remarquables : réseaux de solidarité locaux, systèmes d’alerte rapide pour les missiles entrants, décentralisation des services essentiels, préparation psychologique au pire. Cette capacité à encaisser les coups et à continuer devient un facteur stratégique décisif. Moscou calcule mal en pensant que la souffrance brisera la volonté ukrainienne — au contraire, chaque atrocité renforce la détermination à résister. Mais cette résilience a des limites. Elle s’érode avec le temps, avec l’accumulation des pertes, avec l’épuisement physique et moral. La question n’est pas de savoir si les Ukrainiens peuvent tenir — ils le prouvent chaque jour. La question est : combien de temps l’Occident les laissera-t-il tenir seuls ? Combien de souffrance est-on prêt à accepter avant d’agir vraiment ?
La redéfinition des alliances globales
Cette guerre accélère un réalignement géopolitique majeur. D’un côté, un bloc occidental renforcé (du moins en apparence) par la menace russe, avec l’OTAN élargie à la Finlande et la Suède. De l’autre, un axe autocratique Russie-Chine-Iran-Corée du Nord qui se solidifie par opposition à l’Occident. Entre les deux… le reste du monde, qui observe avec un mélange de méfiance et d’opportunisme. L’Inde achète du pétrole russe à prix cassé tout en maintenant des liens avec Washington. Les pays du Golfe naviguent entre les deux camps selon leurs intérêts. L’Afrique, la plupart du temps, s’abstient dans les votes ONU condamnant la Russie — reflet d’un anti-colonialisme persistant qui refuse de choisir le camp occidental. Ce nouveau monde multipolaire, fragmenté, imprévisible, ressemble de moins en moins à l’ordre libéral international d’après 1991… et de plus en plus à une nouvelle guerre froide avec des règles encore mal définies. L’Ukraine n’est que le premier champ de bataille de cette confrontation qui nous occupera pour les décennies à venir.
Conclusion

Ce qu’il faut retenir
Le 12 octobre 2025 restera comme un jalon symbolique de cette guerre sans fin apparente. D’un côté, la Russie intensifie ses attaques contre l’infrastructure énergétique ukrainienne — une stratégie de terreur calculée visant à briser le moral civil avant l’hiver. De l’autre, la révélation des demandes ukrainiennes de missiles Tomahawk provoque une panique russe révélatrice : Moscou sait que ces armes changeraient radicalement l’équilibre militaire. Entre ces deux dynamiques, l’Occident hésite, prisonnier de ses propres peurs d’escalade. Mais cette prudence excessive garantit une guerre prolongée, avec son cortège de morts, de destructions, de souffrances. Pendant que nous débattons philosophiquement des risques théoriques, des Ukrainiens réels meurent de froid, sous les bombes, dans l’obscurité. La question centrale reste inchangée depuis février 2022 : jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour défendre les principes que nous prétendons chérir ? Parce que si nous ne sommes pas prêts à prendre des risques pour eux… ces principes ne valent rien.
Ce qui change dès maintenant
L’hiver qui s’annonce sera le troisième de cette guerre — et potentiellement le plus dur. Les réseaux énergétiques ukrainiens, déjà affaiblis par deux années de frappes, sont plus fragiles que jamais. La population, épuisée par le conflit prolongé, fait face à une épreuve supplémentaire. Et les hésitations occidentales sur les Tomahawks signalent à Moscou qu’il peut continuer à escalader sans conséquences majeures. Ce double message — soutien rhétorique mais restrictions pratiques — crée une situation où la guerre s’enlise dangereusement. Chaque jour qui passe sans décision forte de l’Occident est un jour gagné pour Poutine, un jour perdu pour l’Ukraine. Les prochaines semaines seront cruciales : soit Washington franchit enfin le Rubicon et livre les armes nécessaires pour changer le cours du conflit, soit nous nous résignons à une guerre interminable dont personne ne sortira vainqueur… sauf peut-être la mort elle-même.
Ce que je recommande
En tant qu’observateur ayant suivi cette guerre depuis son premier jour, je dis ceci : l’attentisme tue. Chaque mois de retard dans la livraison d’armes efficaces se traduit par des milliers de morts supplémentaires, des infrastructures détruites qui ne seront jamais reconstruites, des traumatismes psychologiques qui marqueront une génération entière. Il faut livrer les Tomahawks — ou des armes équivalentes permettant à l’Ukraine de frapper en profondeur. Il faut lever les restrictions absurdes sur l’utilisation des armements occidentaux. Il faut accepter que la paix ne viendra pas de la prudence excessive, mais de la force suffisante pour convaincre Moscou que la victoire est impossible. Oui, cela comporte des risques. Oui, Poutine pourrait réagir violemment. Mais le risque de l’inaction est garanti : une guerre qui pourrit, qui s’enlise, qui se normalise. Et un jour, nous nous réveillerons dans un monde où l’agression paie, où la force prime le droit, où les démocraties reculent devant les autocrates. Ce monde-là… je refuse d’y vivre. Vous devriez aussi.
Je termine cet article avec un sentiment mêlé de colère et d’impuissance. Colère contre ceux qui instrumentalisent la peur pour justifier l’inaction. Impuissance face à l’énormité de ce qui se joue et le peu de contrôle que nous avons individuellement. Mais je refuse le cynisme. Je refuse d’accepter que la barbarie l’emporte simplement parce que nous avions trop peur de faire ce qu’il fallait. L’Histoire jugera — et son verdict sera sans appel.