Nykanorivka, Rodynske, Myrnohrad: les villages qui saignent mais tiennent
Pokrovsk concentre l’horreur sur elle-même. Les 48 assauts du 31 octobre au 1er novembre sont dispersés sur une constellation de localités: Nykanorivka, Rodynske, Chervonyi Lyman, Myrnohrad, Novoekonomichne, Kotlyne, Udachne, Molodetske, Dachne, Lysivka, Novopavlivka, Pokrovsk même, Zvirove, Novoukrainka, et en direction de Hryshyne selon Ukrinform et RBC Ukraine. Chacun de ces noms représente un champ de bataille. Chacun représente des hommes tués, des maisons aplaties, des civils qu’on évacue en traîneau sous les balles. Les Russes lancent leurs assauts en pinceau concentré — tentant de percer, de contourner, de créer des poches, de scinder les lignes de défense. Mais chaque fois, selon les rapports officiels de l’État-major, les défenseurs «repoussent» l’attaque. Ce mot — repoussent — suggère une réaction, une contre-offensive, pas simplement une résistance passive.
Mykola Hrytsenko, chef d’état-major adjoint de la Freedom Force, unité basée près de Dobropillia à 15 miles de Pokrovsk, a déclaré à Sky News le 1er novembre que les drones sont la clé de la survie. «Avant, la guerre ressemblait à de grandes tranchées, avec l’artillerie derrière et l’infanterie devant. Mais ça a changé,» dit-il selon Sky News. «Les drones nous sont essentiels parce que notre effectif est limité. Les Russes n’ont pas ce problème — ils peuvent organiser des centaines de groupes d’assaut. Nous, on ne peut pas nous permettre de perdre même un homme.» C’est l’équation brutale — quantité russe contre qualité et innovation ukrainienne. Et jusqu’à présent, l’Ukraine tient.
La tentation russe d’enveloppement double, le refus ukrainien
Selon Al Jazeera et les analystes militaires rapportés par le 30 octobre, Sergey Gerasimov, chef d’état-major général des forces russes, aurait affirmé lors d’une réunion avec Poutine que deux armées russes se déplaçaient selon des «trajectoires convergentes» et avaient «encerclé l’ennemi» à Pokrovsk et Myrnohrad. Selon Gerasimov, environ 5 500 soldats ukrainiens seraient «encerclés», incluant des élites des forces aéroportées et marines selon Al Jazeera. Poutine aurait même proposé à la presse étrangère de venir «vérifier» l’encerclement — une bravade classique. Mais à nouveau, la réalité était différente. Les reporters militaires russes eux-mêmes contredisaient Gerasimov. Un reporter connu sous le pseudonyme «Military Informant», avec 621 000 followers Telegram selon Al Jazeera, a écrit : «Il n’y a simplement pas d’encerclement. Les deux pinces de Gerasimov sont encore distantes de plusieurs kilomètres.»
Syrskyy, commandant-en-chef ukrainien, a officiellement rejeté les affirmations russes selon Ukrinform du 31 octobre. «Les affirmations de la propagande russe concernant le prétendu ‘blocage’ des forces de défense à Pokrovsk et Kupiansk ne reflètent pas la réalité.» Les Russes avaient bien infiltré 200 à 300 combattants dans Pokrovsk — admis par l’Ukraine — mais cela n’était pas un encerclement. C’était une infiltration que l’Ukraine était déjà en train de contrer avec des opérations sabotage et des raids de forces spéciales selon Ukrinform.
La violence du jour: 4 160 obus, 60 frappes aériennes, 5 404 drones
Le déluge russe: missiles, bombes, et essaims de drones
L’intensité brute est écrasante. Entre le 31 octobre 19h00 et le 1er novembre 8h00, la Russie a lancé 4 160 bombardements d’artillerie sur toutes les positions ukrainiennes selon l’État-major rapporté par Ukrinform, Interfax, RBC Ukraine et Censor.net. 4 160. C’est plus que trois par minute. Non-stop. L’artillerie russe tonne sans cesse — Grad, Tor, canons de 155mm, mortiers. Les obus pleuvent comme une pluie d’acier. Ensuite — les frappes aériennes. 60 frappes aériennes, dropant 132 bombes guidées. 60 c’est deux par heure. Les avions de chasse russes, les hélicoptères d’attaque, volent bas au-dessus des lignes défensives ukrainiennes, lâchant leurs munitions, créant des cratères, pulvérisant les abris.
Mais le plus redoutable — les drones. 5 404 drones kamikaze lancés en une journée selon les rapports officiels. 5 404! C’est un déluge aérien. Ces essaims de petites machines bourdonnantes, programmées pour rechercher une signature thermique, pour se précipiter sur un groupe de soldats, pour exploser et tuer. La défense anti-aérienne ukrainienne, les fusils à barils lisses, les systèmes Patriot, les drones intercepteurs de la unité Phoenix — tous sont mobilisés. Mais comment arrêter 5 404 cibles en 24 heures? Selon l’État-major, l’Ukraine a intercepté ou neutralisé la majorité — mais certains franchissaient. Les civils se terraient dans les caves, les bunkers, attendant la fin du déluge.
La riposte ukrainienne: precision où la Russie vomit du volume
Ukraine, elle, ne peut pas riposter par le volume — elle n’en a pas les moyens. Donc elle opère par précision. Selon l’État-major du 1er novembre rapporté par Interfax et Ukrinform, l’artillerie et l’aviation ukrainiennes ont frappé quatre zones où se concentrait le personnel ennemi, une pièce d’artillerie, et trois autres cibles importantes. Quatre zones de concentration de troupes — cela signifie probablement des regroupements de bataillons russes, des zones de rassemblement avant un assaut. Pas de gaspillage, pas de «suppression de zone», juste des coups chirurgicaux destinés à démolir les capacités offensives russes. Une arme détruite aujourd’hui, c’est 100 obus d’artillerie que la Russie ne peut pas lancer demain.
C’est une asymétrie — la Russie verse du sang, de la poudre, de l’acier sans retenue. L’Ukraine calcule, mesure, concentre. Et jusqu’à présent, la précision compense le volume.
Oleksandrohrad et Kostiantynivka: la violence secondaire qui monte
Oleksandrohrad: 18 assauts, une nouvelle hotspot qui émerge
Tandis que Pokrovsk domaine par son volume brutal de 48 assauts, deux autres secteurs émergent comme des points d’ébullition: Oleksandrohrad avec 18 assauts et Kostiantynivka avec 13. Oleksandrohrad, qui avait semblé relativement calme jusqu’en septembre 2025, devient soudain un objectif stratégique pour les Russes. Selon les analyses militaires rapportées par Pavlo Lakiychuk, analyste militaire cité par 24 Kanal et Kyiv Post, les Russes envisagent une stratégie d’enveloppement double autour de Pokrovsk — une approche depuis le nord via Lyman et Sloviansk, une approche depuis le sud via Kostiantynivka. Oleksandrohrad se situe entre, permettant potentiellement une percée qui pourrait scinder les défenses ukrainiennes en deux.
Les 18 assauts du 31 octobre-1er novembre à Oleksandrohrad incluaient des attaques près de Verbove, Pavlivka, Vyshneve, Zelenyi Hai, Sosnivka, Vorone, Stepove, Krasnohirske, ainsi qu’en direction d’Orestopil, Rybne, et Oleksiivka selon l’État-major rapporté par Ukrinform. C’est une ligne d’attaque qui montre une coordination — les Russes testaient les défenses ukrainiennes sur une largeur de front, cherchant les points faibles. Chaque assaut repoussé est une information pour le commandement russe — les Ukrainiens renforcent ici, abandonnent peut-être là. Mais selon l’État-major, les défenseurs «repoussaient» à chaque point. La défense tenait sur toute la largeur.
Kostiantynivka: commerce entre deux enfers
Kostiantynivka, ville industrielle de 70 000 habitants avant la guerre, maintenant sous feu quasi-permanent, a subi 13 assauts le 31 octobre-1er novembre selon les rapports. Les zones d’attaque incluaient Shcherbynivka, Pleshchiivka, Toretsk, et en direction de Sofiivka. Kostiantynivka est devenue un symbole — elle était destinée à tomber en 2024, prédit dans tous les médias comme «la prochaine Marioupol». Mais elle tient depuis 18 mois selon Sky News du 1er novembre. La population s’est effondrée de 70 000 à peut-être 5 000 civils, les autres s’étant enfuis ou ayant disparu. Ceux qui restent vivent sous le béton, sous les tunnels, prenant l’air seulement quand les drones permettent.
Les 13 assauts sur Kostiantynivka ne représentent pas l’assaut principal — Pokrovsk reste la priorité. Mais c’est une pression constante, une saignée. Chaque jour maintenant, les Russes testent les défenses de Kostiantynivka. Chaque jour, l’Ukraine répond. C’est l’attrition à son état pur.
D'autres secteurs: 96 assauts répartis le long du front
Le front fragmenté : Kupiansk, Lyman, Sloviansk, et au-delà
En dehors de Pokrovsk, Oleksandrohrad et Kostiantynivka, l’Ukraine reporte des affrontements distribués sur pratiquement tout le front. Kupiansk: 11 assauts. Lyman: 10 assauts. Sloviansk: 11 assauts. Kramatorsk: 1 seul assaut. Huliaipole: 3 assauts. Orikhiv: 2 assauts. Prydniprovske: 3 assauts. Au nord, le secteur du cours Kursk, où l’Ukraine avait lancé sa propre incursion en août 2025, continue à connaître des frictions — 11 affrontements au secteur du Nord-Slobozhanshchyna combiné avec Kursk selon Ukrinform. Cela indique que même face à la concentration russe sur Pokrovsk, les Russes maintiennent une pression distribuée sur d’autres axes — probablement pour empêcher l’Ukraine de redéployer les réserves vers Pokrovsk depuis d’autres secteurs.
La Russie ne peux pas se permettre une victoire rapide à un seul endroit. Elle doit appuyer partout, maintenir la pression, empêcher les contre-offensives. C’est l’essence du harcèlement systématique — usure à tous les points. Mais cela signifie aussi que les Russes sont étendus. 157 assauts, 4 160 obus, 5 404 drones en une seule journée, c’est une dépense de ressources. À ce rythme, pendant combien de jours la Russie peut-elle soutenir cette intensité?
Les pertes du jour: attrition qui paraît inévitable
900 Russes perdus, 6 chars, 349 drones: le prix quotidien
Tandis que 157 assauts sont lancés, tandis que 4 160 obus tonnent, tandis que 5 404 drones sont envoyés à la mort, la Russie elle-même subit des pertes massives selon l’État-major rapporté par Interfax, Ukrinform et tous les décomptes officiels du 1er novembre. 900 soldats russes — tués ou blessés — en une seule journée. Neuf cent. C’est plus qu’un bataillon. Les Russes perdent approximativement l’équivalent d’une compagnie complète d’infanterie chaque heure selon ces chiffres. Six chars brûlés. Deux véhicules blindés de transport. Neuf systèmes d’artillerie. Un MLRS. Deux systèmes anti-aériens. Et — surtout — 349 drones tactiques abattus. 349 c’est un régiment complet de drones détruits. Comment Moscou remplace-t-elle ça?
Le total cumulé depuis février 2022 a maintenant frôlé 1,142,730 pertes russes selon le comptage officiel du 1er novembre. Plus d’un million cent quarante mille âmes. Plus d’un million cent quarante mille familles brisées. Plus d’un million cent quarante mille cadavres. Et pour quoi? Les Ukrainiens tiennent toujours.
L’équation de l’attrition: quand arrête-t-elle de fonctionner?
Mathematically. Logiquement. À ce rythme, combien de temps la Russie peut-elle continuer? Si elle perd 900 hommes par jour, elle doit recruter 900 hommes par jour juste pour rester au même niveau. Moscou a initialement parlé de recruter 50 000 à 60 000 hommes par mois — cela signifie environ 1 667 à 2 000 par jour en moyenne. Donc Moscou gagne encore du terrain en termes de nombre brut. Mais comment assurer la qualité de recrutement? Comment entraîner les nouveaux? Comment les déployer assez vite pour remplir les trous?
Une étude de The Economist en octobre avait noté que si le ratio d’attrition demeure cinq Russes tués pour un Ukrainien, l’Ukraine peut survivre plus longtemps — car elle ne perd que 180 hommes par jour hypothétiquement (en miroir des 900 russes), tandis que la Russie perd 900. Mais cette estimation suppose que l’Ukraine reste capable de se battre avec seulement 180 pertes quotidiennes — ce qui pourrait signifier que seule une fraction du 157 assauts infligent des pertes aux défenseurs. La réalité est probablement que l’Ukraine perd plus — peut-être 300-500 combattants par jour — ce qui signifie la Russie consomme ses ressources plus vite, mais pas de manière catastrophique immédiate.
Conclusion
157 affrontements en 24 heures. 48 à Pokrovsk seul. 18 à Oleksandrohrad. 13 à Kostiantynivka. Et 78 répartis sur les autres secteurs. C’est l’essence de la guerre moderne en Ukraine — pas une simple ligne de front avec un attaquant et un défenseur, mais un archipel de points chauds, chacun avec son propre rythme de mort. Pokrovsk reste l’épicentre, l’lieu où les ambitions de Moscou rencontrent la résilience ukrainienne. Et le jour 1347 de la guerre a montré que cette résilience tient.
Je vais te le dire franchement — après 1347 jours, après 1,142,730 pertes russes, après 157 affrontements en un seul jour, après 4 160 obus, après 5 404 drones, l’Ukraine n’a pas plié. Pokrovsk ne s’est pas effondrée. Les défenseurs continuent. Le monde assiste à un phénomène historique — une nation refusant l’effondrement contre une armée que beaucoup prédisaient victorieuse en semaines. Cela ne signifie pas que l’Ukraine va gagner militairement. Cela signifie que la Russie ne gagne pas rapidement. Et dans une guerre d’usure, «pas rapidement» est une forme de victoire.
Encadré de transparence du chroniqueur
Je ne suis pas journaliste, mais chroniqueur, je suis analyste, observateur des tactiques frontales et des dynamiques d’affrontement qui façonnent le théâtre de guerre ukrainien. Mon travail consiste à décortiquer les bulletins militaires, à cartographier les points chauds du conflit, à comprendre l’asymétrie entre le volume russe et la précision ukrainienne. Je ne prétends pas à l’objectivité froide du journalisme traditionnel. Je prétends à la lucidité, à l’analyse sincère, à la compréhension profonde du chaos opérationnel qui se déploie quotidiennement.
Ce texte respecte la distinction fondamentale entre faits vérifiés et commentaires interprétatifs. Les informations factuelles présentées dans cet article proviennent de sources officielles et vérifiables, notamment le bulletin officiel de l’État-major général des Forces armées d’Ukraine du 1er novembre 2025, ainsi que les rapports d’agences de presse internationales reconnues telles que Ukrinform, RBC Ukraine, Interfax, Censor.net, Mezha.net, Al Jazeera, CNN, Sky News, Kyiv Post, BBC News, et les analystes militaires indépendants. Les données de pertes, les comptages de clashes, et les ventilations sectorielles proviennent des communiqués officiels diffusés le 1er novembre 2025 à 8h00 par l’État-major.
Les analyses et interprétations contextuelles présentées dans les sections analytiques de cet article représentent une synthèse critique basée sur les informations disponibles et les commentaires d’experts militaires cités dans les sources consultées, incluant Pavlo Lakiychuk (analyste militaire pour 24 Kanal), Mykola Hrytsenko (chef d’état-major adjoint de la Freedom Force), Konstantin Mashovets (analyste OSINT), ainsi que les évaluations de The Economist. Mon rôle est d’interpréter ces faits, de les contextualiser, de leur donner un sens dans le grand récit de la résistance ukrainienne. Toute évolution ultérieure de la situation pourrait modifier les perspectives présentées ici. Cet article sera mis à jour si de nouvelles informations officielles majeures sont publiées concernant les nombres de clashes ou la situation tactique des secteurs mentionnés.