Chronique : 1 170 soldats russes perdus : le coût humain que Moscou refuse de compter
Auteur: Maxime Marquette
6 novembre 2025: 1 170 pertes en 24 heures, 1 147 740 au total depuis février 2022
Selon le communiqué officiel de l’État-major général des Forces armées d’Ukraine publié sur Facebook le 6 novembre 2025 et relayé par Ukrinform, Ukrainska Pravda, Mezha.net et RBC-Ukraine: la Russie a perdu 1 170 soldats tués ou blessés dans les dernières 24 heures. Cela porte le total des pertes russes à «approximativement 1 147 740» depuis le début de l’invasion complète le 24 février 2022 selon le rapport officiel.
Et ce n’est pas seulement des hommes que la Russie perd. Le même rapport détaille: 6 véhicules blindés détruits, 15 systèmes d’artillerie détruits, 172 drones tactiques abattus, 84 véhicules et camions-citernes détruits, 1 pièce d’équipement spécial détruite selon Ukrinform et Pravda du 6 novembre. En une seule journée. Une seule. Et cela se répète. Jour après jour. Semaine après semaine. Mois après mois.
Pour contextualiser: 1 170 pertes en une journée, c’est l’équivalent d’un bataillon entier éradiqué en 24 heures. C’est plus que la totalité des forces armées actives de plusieurs pays européens. Et c’est désormais la «normale» pour la Russie en novembre 2025.
Octobre 2025: hausse continue des pertes après une brève accalmie
Selon le rapport du Ministère de la Défense britannique publié le 4 novembre 2025 et cité par Defence-UA et Euromaidan Press: le taux de pertes quotidiennes moyen de la Russie en octobre 2025 était de 1 008 soldats. C’est une augmentation par rapport à septembre (950 par jour) et la deuxième augmentation mensuelle consécutive selon le rapport britannique.
Et voici le détail qui tue: «Entre le 5 et le 12 octobre, la Russie a dépassé 1 000 pertes quotidiennes chaque jour» selon le Ministère de la Défense britannique. La tendance à la baisse observée en août et septembre — où les pertes étaient tombées à environ 930 par jour — s’est inversée brutalement. La Russie retourne vers ses niveaux de pertes catastrophiques du printemps 2025, quand elle perdait 1 300 soldats par jour en moyenne en mars et avril.
En 2025 seulement — du 1er janvier au 12 octobre — la Russie a perdu environ 353 000 soldats selon le Ministère de la Défense britannique du 14 octobre cité par Defence-UA. Trois cent cinquante-trois mille en dix mois! C’est 35 000 par mois. C’est 1 160 par jour en moyenne. C’est l’anéantissement progressif d’une génération entière.
Le total cumulatif: 1 147 740 depuis le début, dont 332 000 en 2025
Si on additionne correctement: 1 147 740 total moins environ 353 000 en 2025 égale environ 795 000 pertes entre février 2022 et décembre 2024. Cela signifie que 2025 a été l’année la plus meurtrière de toute la guerre pour la Russie — avec presque autant de pertes en dix mois qu’en deux ans et dix mois combinés.
Et ce qui rend cela encore plus choquant: la Russie n’avance presque pas. En 2025, selon les analyses de Russia Matters et Institute for the Study of War, la Russie a capturé en moyenne 168 kilomètres carrés par mois. Si on divise 353 000 pertes par environ 1 680 kilomètres carrés conquis en 2025, cela donne environ 210 soldats perdus par kilomètre carré. Deux cent dix! C’est un coût humain absolument insoutenable pour des gains territoriaux minuscules.
Les sources indépendantes confirment: entre 200 000 et 220 000 morts russes identifiés
Et il y a les sources indépendantes qui comptent les morts identifiables par nom. Selon BBC News Russian et Mediazona — deux organisations qui vérifient chaque décès individuellement par des avis de décès, des registres funéraires, des documents judiciaires — 143 087 soldats russes sont morts et identifiés au 31 octobre 2025 selon Wikipedia citant BBC et Mediazona.
Meduza, un média indépendant russe en exil, estime qu’entre 200 000 et 220 000 soldats russes étaient morts à la mi-2025 selon son analyse du 3 novembre 2025. Ce chiffre exclut les ressortissants étrangers combattant pour la Russie et les personnes disparues sans certificat de décès officiel. Donc le nombre réel de morts est probablement beaucoup plus élevé.
Et voici le détail glaçant: selon Meduza, en 2025, environ 300 soldats russes sont morts chaque jour en moyenne — une augmentation par rapport à 200-250 par jour en 2024. Trois cents morts. Par jour. Pas blessés. Morts. C’est l’équivalent d’un crash d’avion commercial quotidien.
Les pertes par catégorie: qui meurt sur le front russe?
Selon l’analyse de BBC News Russian et Mediazona des 143 087 morts russes identifiés au 31 octobre: 4,2% étaient des officiers (5 962), 9,1% étaient des troupes motorisées (13 013), 2,8% étaient des parachutistes VDV (3 961) selon Wikipedia citant BBC et Mediazona. 11% étaient des mobilisés (15 684), et 13,2% étaient des condamnés recrutés dans les prisons (18 836).
Donc plus d’un soldat russe mort sur dix était un prisonnier recruté de force. Plus d’un sur dix était un mobilisé arraché à sa vie civile. Ce sont les pauvres, les marginaux, les prisonniers — pas l’élite moscovite — qui meurent par milliers dans les champs ukrainiens.
Contexte historique: l'escalade mortelle depuis 2022
2022-2023: entre 500 000 et 700 000 pertes dans les deux premières années
Revenons en arrière pour comprendre l’accélération. En septembre 2022, le Ministère de la Défense russe admettait seulement 5 937 soldats morts selon Wikipedia. Un mensonge évident. En février 2023, des documents de renseignement américains fuités citaient le FSB russe estimant que les forces russes avaient subi 110 000 pertes au 28 février 2023 — un an après l’invasion.
Yevgeny Prigozhin, chef du groupe Wagner, affirmait en juin 2023 que la Russie avait perdu 120 000 morts au total — et il accusait le Ministère de la Défense de minimiser systématiquement les pertes selon Wikipedia. Prigozhin lui-même admettait que Wagner avait perdu plus de 20 000 hommes tués au 25 mai 2023.
Donc en 2022-2023, les pertes russes étaient déjà massives — probablement entre 500 000 et 700 000 tués et blessés combinés selon les estimations occidentales de l’époque.
2024: l’année où les pertes ont explosé — décembre 2024 atteint 1 570 par jour
Mais 2024 a marqué une escalade dramatique. Selon le Ministère de la Défense britannique: décembre 2024 a enregistré le taux de pertes quotidiennes le plus élevé de toute la guerre — 1 570 soldats par jour en moyenne selon le rapport du 14 octobre 2025 cité par Defence-UA.
Mille cinq cent soixante-dix par jour! C’est presque deux bataillons entiers anéantis quotidiennement. Et pourquoi? Parce que la Russie lançait des offensives massives à Avdiivka, à Bakhmut, partout dans le Donbass — sacrifiant des vagues d’hommes pour gagner quelques kilomètres.
Selon les officiels de l’OTAN cités par Wikipedia: environ 1 200 soldats russes étaient tués ou blessés chaque jour en moyenne en mai et juin 2024. Et cela a continué à s’aggraver jusqu’à la fin de l’année.
Les comparaisons historiques: pire que l’Afghanistan soviétique
Pour contextualiser historiquement: l’Union soviétique a perdu environ 15 000 soldats tués pendant toute la guerre d’Afghanistan de 1979 à 1989 — dix ans selon les données historiques. La Russie moderne perd 15 000 soldats tués en moins de deux mois au rythme actuel.
C’est une guerre d’attrition d’une brutalité inégalée depuis la Seconde Guerre mondiale. Et la Russie continue. Parce que Poutine refuse d’admettre l’échec. Parce que l’appareil militaire russe broie les hommes sans compter. Parce que personne en Russie n’a le pouvoir d’arrêter la machine.
Informations non confirmées et hypothèses d'enquête
Le nombre réel de morts: 200 000 ou 400 000?
Aucune confirmation officielle n’existe sur le nombre exact de soldats russes morts — par opposition aux blessés. Les enquêteurs indépendants explorent la possibilité que le nombre réel de morts russes soit entre 300 000 et 400 000 — bien au-dessus des 200 000-220 000 identifiés par Meduza et Mediazona. Aucune confirmation. Mais si le ratio typique tués/blessés dans les guerres modernes est de 1:3, et que la Russie a 1 147 740 pertes totales, cela suggérait environ 287 000 morts et 860 000 blessés.
Les disparus: 30 000 à 40 000 soldats officiellement portés disparus
Selon Meduza du 3 novembre 2025: entre 30 000 et 40 000 procédures judiciaires avaient été ouvertes à la mi-2025 pour déclarer officiellement morts des soldats portés disparus. Les enquêteurs explorent la possibilité que beaucoup de ces «disparus» soient en réalité morts mais que le Ministère de la Défense russe refuse de l’admettre pour éviter de payer des compensations aux familles. Aucune confirmation officielle. Mais le pattern suggère une manipulation systématique des statistiques.
Les pertes réelles en 2025: dépassent-elles 400 000?
Aucune confirmation indépendante du total exact des pertes russes en 2025. Les enquêteurs militaires explorent la possibilité que les pertes réelles de 2025 dépassent 400 000 — bien au-dessus des 353 000 rapportés officiellement — si on inclut les blessés graves non comptabilisés et les déserteurs. Aucune certitude. Mais tous les indicateurs pointent vers une sous-estimation massive.
Analyse contextuelle: pourquoi la Russie accepte-t-elle cette saignée?
La stratégie d’attrition: sacrifier les hommes pour gagner du temps
Selon les analystes militaires de l’Institute for the Study of War et du Ministère de la Défense britannique: la Russie mène délibérément une stratégie d’attrition — elle sacrifie des vagues d’hommes pour user l’Ukraine, pour épuiser ses munitions, pour briser son moral. Le calcul du Kremlin est simple: la Russie a 140 millions d’habitants, l’Ukraine 40 millions. Donc la Russie peut «se permettre» de perdre trois fois plus d’hommes.
Mais ce calcul ignore la réalité démographique: la Russie a déjà une crise démographique catastrophique, avec une population déclinante et vieillissante. Perdre plus d’un million d’hommes — principalement âgés de 20 à 40 ans — c’est détruire une génération entière de la population active russe.
Le ratio de pertes: la Russie perd-elle vraiment 5:1 contre l’Ukraine?
Selon l’analyse de The Economist du 17 octobre 2025 citée par Wikipedia: même si le nombre de soldats ukrainiens tués depuis le début de 2025 était le double du chiffre rapporté par le projet UALosses, cela donnerait toujours un ratio d’environ cinq soldats russes tués pour un Ukrainien. Cinq pour un! C’est l’aveu que la stratégie russe est catastrophiquement inefficace.
D’autres analyses citées par The New York Times en janvier 2025 suggèrent un ratio de 2:1 — deux soldats russes perdus pour chaque Ukrainien. Même ce ratio plus conservateur est désastreux pour la Russie. Aucune armée ne peut soutenir de telles pertes indéfiniment.
L’impact démographique: une génération russe décimée
Selon le Général Sir Roland Walker, chef d’État-major de l’armée britannique, cité en juillet 2024 par Wikipedia: au rythme actuel de combat, il faudrait à la Russie cinq ans pour contrôler les quatre régions qu’elle revendique — et cela coûterait entre 1,5 et 1,8 million de pertes. «Il n’y a pas de gagnants dans l’invasion russe de l’Ukraine. C’est une dévastation totale pour les deux côtés et des générations perdues», déclarait-il.
Et il a raison. Si la Russie continue au rythme actuel — 1 000+ pertes par jour — elle atteindra 2 millions de pertes d’ici 2027. Deux millions! C’est l’équivalent de toute la population de Saint-Pétersbourg anéantie.
Éditorial: réflexion sur le coût humain que personne ne compte
Note: cette section présente une interprétation basée sur l’observation des guerres d’attrition historiques
Je regarde ces chiffres — 1 170 en une journée, 1 147 740 au total — et je réalise que nous avons perdu le sens de ce que ces nombres signifient vraiment. Un million cent quarante-sept mille sept cent quarante. Ce n’est pas une statistique. Ce sont un million cent quarante-sept mille sept cent quarante vies individuelles. Un million cent quarante-sept mille sept cent quarante mères qui pleurent. Un million cent quarante-sept mille sept cent quarante histoires terminées brutalement.
Et pour quoi? Pour 12% de territoire ukrainien supplémentaire. Pour la vanité de Poutine. Pour l’illusion impériale du Kremlin. C’est le calcul le plus obscène de l’histoire moderne: sacrifier plus d’un million d’hommes pour conquérir une bande de terre que personne en Russie ne voulait vraiment.
La machine qui broie les vies sans compter
Et ce qui me terrifie le plus, c’est que la machine continue. Chaque jour. Mille soldats. Comme une horloge. Comme si c’était acceptable. Comme si c’était durable. Mais ce n’est pas durable. Aucune société ne peut absorber de telles pertes sans s’effondrer à terme.
La Russie cache ces chiffres. Elle refuse de publier ses pertes officielles. Elle minimise, elle ment, elle enterre ses morts dans le silence. Mais les corps s’accumulent. Les cercueils de zinc retournent dans les villages russes. Et un jour — peut-être pas aujourd’hui, peut-être pas demain, mais un jour — la société russe se réveillera et demandera: pourquoi? Pour quoi?
L’avenir: vers les deux millions de pertes d’ici 2027?
Si la guerre continue au rythme actuel — et rien n’indique qu’elle ralentira — la Russie atteindra deux millions de pertes d’ici fin 2026 ou début 2027. Deux millions! C’est un chiffre qui défie l’imagination. C’est un chiffre qui devrait provoquer une révolution. Mais en Russie? Le silence règne. Et les corps continuent de tomber.
Conclusion
6 novembre 2025. 1 170 soldats russes perdus en 24 heures. 1 147 740 depuis le début. Et demain? Encore mille. Et après-demain? Encore mille. C’est la réalité de la guerre de Poutine: un hachoir humain qui tourne sans fin, broie les vies sans compter, sacrifie une génération pour une conquête impossible.
Et ce qui tue vraiment? Le monde s’habitue. Les chiffres deviennent des statistiques. Les morts deviennent des nombres. Et la tragédie — cette tragédie humaine insondable — devient juste un autre titre dans les nouvelles du jour. Mais derrière chaque nombre, il y a un homme. Et derrière chaque million, il y a un million de tragédies individuelles que personne ne compte plus.
Encadré de transparence du rédacteur
Positionnement éditorial
Je ne suis pas journaliste, mais chroniqueur et analyste. Mon expertise réside dans l’observation et l’analyse des dynamiques géopolitiques, économiques et stratégiques qui façonnent notre monde. Mon travail consiste à décortiquer les stratégies politiques, à comprendre les mouvements économiques globaux, à contextualiser les décisions des acteurs internationaux et à proposer des perspectives analytiques sur les transformations qui redéfinissent nos sociétés.
Je ne prétends pas à l’objectivité froide du journalisme traditionnel, qui se limite au rapport factuel. Je prétends à la lucidité analytique, à l’interprétation rigoureuse, à la compréhension approfondie des enjeux complexes qui nous concernent tous. Mon rôle est de donner du sens aux faits, de les situer dans leur contexte historique et stratégique, et d’offrir une lecture critique des événements.
Méthodologie et sources
Ce texte respecte la distinction fondamentale entre faits vérifiés et analyses interprétatives. Les informations factuelles présentées proviennent exclusivement de sources primaires et secondaires vérifiables.
Sources primaires: rapport quotidien de l’État-major général des Forces armées d’Ukraine publié sur Facebook le 6 novembre 2025; rapport du Ministère de la Défense britannique du 14 octobre 2025 et du 4 novembre 2025; données de BBC News Russian et Mediazona sur les morts russes identifiés au 31 octobre 2025; rapport des services de renseignement américains de février 2023 cité par Wikipedia; déclarations de Yevgeny Prigozhin de mai-juin 2023.
Sources secondaires: Ukrinform 6 novembre 2025; Ukrainska Pravda 6 novembre 2025; Mezha.net 6 novembre 2025; RBC-Ukraine 5-6 novembre 2025; Defence-UA 4 novembre 2025; Euromaidan Press 4-5 novembre 2025; Meduza 3 novembre 2025; The Economist 17 octobre 2025; The New York Times janvier 2025; Wikipedia article sur les pertes de la guerre russo-ukrainienne mis à jour novembre 2025; Institute for the Study of War rapports novembre 2025; Russia Matters 5 novembre 2025; National Interest 5 novembre 2025.
Les données historiques comparatives (guerre d’Afghanistan soviétique 15 000 morts, ratios tués/blessés, analyses démographiques) proviennent de sources historiques vérifiées et d’institutions de recherche militaire établies.
Nature de l’analyse
Les analyses, interprétations et perspectives présentées dans les sections analytiques de cet article constituent une synthèse critique et contextuelle basée sur les informations disponibles, les tendances observées et les commentaires d’experts cités dans les sources consultées.
Mon rôle est d’interpréter ces faits de pertes militaires massives dans le cadre de la stratégie d’attrition russe et de l’impact démographique à long terme, et de leur donner un sens cohérent. Ces analyses reflètent une expertise développée à travers l’observation continue des guerres d’attrition historiques, de la manipulation des statistiques de pertes par les régimes autoritaires, et de la compréhension des coûts humains réels des conflits prolongés.
Toute mise à jour des chiffres officiels de pertes ou toute révélation majeure concernant les statistiques russes réelles pourrait modifier les perspectives présentées ici. Cet article sera mis à jour si de nouvelles données officielles substantielles concernant les pertes russes sont publiées après le 6 novembre 2025.