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Chronique : Combattants de la résistance ukrainienne : feu, flammes et sabotage contre les infrastructures russes
Credit: Adobe Stock

Fin octobre-début novembre 2025 : quatre cibles logistiques détruites en profondeur

Les dates exactes restent floues, délibérément masquées pour protéger les opérateurs, mais les résultats sont indéniables. Entre la fin octobre et le début novembre 2025, les services de renseignement militaire ukrainiens ont confirmé que des groupes de résistance opérant à l’intérieur de la Fédération de Russie ont détruit quatre installations logistiques clés. Selon Defence Express, qui a publié l’information le 8 novembre 2025 en citant des sources ukrainiennes, les opérations se sont déroulées dans deux régions distinctes et stratégiquement importantes. À Sterlitamak, une ville industrielle située dans la République de Bachkirie, à plus de mille kilomètres à l’est de la frontière ukrainienne, les saboteurs ont incendié des équipements appartenant à trois tours de communications. Ces installations ne sont pas de simples antennes civiles. Selon les rapports de renseignement ukrainiens, elles jouent un rôle crucial dans la transmission de données à la fois civiles et militaires, et leur destruction représente un coup porté à la coordination régionale et à la connectivité dont dépendent les forces russes pour synchroniser leurs opérations. La perte de ces tours crée des zones aveugles dans le réseau de communication, forçant les unités militaires à recourir à des moyens de communication alternatifs plus vulnérables à l’interception.

Simultanément, près de la ville de Vologda, située au nord-ouest de Moscou dans une région historiquement importante pour les routes commerciales et militaires russes, un autre groupe de saboteurs a détruit une armoire de relais ferroviaire. Ce détail technique peut sembler insignifiant pour un observateur non averti, mais pour quiconque comprend le fonctionnement des réseaux ferroviaires, c’est un coup de maître. Les armoires de relais régulent la signalisation ferroviaire et contrôlent le trafic des trains sur des sections entières de voies. Leur destruction ou leur dysfonctionnement peut paralyser le trafic ferroviaire sur des dizaines de kilomètres, bloquant les convois militaires transportant munitions, carburant et équipement vers les lignes de front. Selon Defence Express, cette cible apparemment modeste revêt une importance tactique majeure, car elle permet d’arrêter ou de retarder considérablement le mouvement des trains militaires, créant des embouteillages logistiques qui se propagent en cascade à travers tout le réseau ferroviaire régional. Les forces armées ukrainiennes comprennent que le rail est l’artère vitale de la logistique militaire russe, et elles ciblent méthodiquement ces points de vulnérabilité pour saigner progressivement la capacité de Moscou à soutenir ses opérations offensives.

Le ciblage systématique de ce type d’infrastructures révèle une planification minutieuse et une compréhension approfondie de la chaîne logistique russe. Les partisans ukrainiens ne frappent pas au hasard. Ils sélectionnent des cibles qui maximisent les perturbations tout en minimisant leur exposition aux forces de sécurité russes. Les tours de communication et les relais ferroviaires sont souvent situés dans des zones peu surveillées, loin des centres urbains densément peuplés où la présence policière est forte. Cette approche permet aux saboteurs d’opérer rapidement, de frapper efficacement, et de disparaître avant que les autorités russes ne puissent réagir. Chaque opération réussie envoie également un message psychologique puissant aux forces d’occupation et à la population locale : nulle part n’est vraiment sécurisé, même en profondeur sur le territoire russe, même loin des lignes de front. Cette guerre des partisans transforme l’arrière-pays russe d’une zone de confort et de reconstitution en un territoire contesté où chaque infrastructure peut devenir une cible à tout moment.

5-6 novembre 2025 : la Légion Liberté de Russie brûle des dizaines de locomotives

Dans la nuit du 5 au 6 novembre 2025, l’une des opérations de sabotage les plus spectaculaires de cette guerre asymétrique s’est déroulée simultanément à travers tout le territoire russe. Le mouvement de résistance Légion Liberté de Russie, composé de citoyens russes opposés au régime de Poutine et à la guerre contre l’Ukraine, a mené une série d’attaques coordonnées contre des locomotives utilisées pour transporter du matériel militaire. La Direction principale du renseignement du ministère de la Défense ukrainien a confirmé l’opération dans un communiqué publié le 6 novembre 2025, saluant l’efficacité et l’ampleur des frappes. Selon ce communiqué, les cibles principales étaient les locomotives que les forces russes utilisent pour approvisionner les zones de guerre en armes, munitions et équipements. Les partisans ont utilisé des méthodes simples mais terriblement efficaces : des cocktails Molotov. Ces dispositifs incendiaires rudimentaires, fabriqués à partir de bouteilles remplies de liquides inflammables, ont été lancés directement dans les systèmes de contrôle et d’alimentation électrique de dizaines de locomotives, incinérant les composants essentiels qui permettent à ces machines de fonctionner.

L’ampleur géographique de cette opération est stupéfiante. Les sabotages n’ont pas eu lieu dans une seule région, mais à travers de multiples oblasts et républiques russes. Selon le Kyiv Post, qui a compilé une liste détaillée des sites touchés à partir de sources ouvertes et de déclarations de la Légion Liberté de Russie, les attaques ont frappé dans la région de Moscou, où un train a été incendié à Arkhangelskoye. À Samara, un centre industriel majeur de la Russie, plusieurs frappes ont été enregistrées dans les villes de Syzran, Tolyatti, Bezenchuk et Kinel-Cherkasy. Dans la République des Komis, au nord, les rebelles ont détruit un train à Syktyvkar. À Kemerovo, en Sibérie occidentale, une locomotive a été incendiée à Novokuznetsk. La région de Sverdlovsk, autour de Iekaterinbourg, a été particulièrement touchée, avec des sabotages rapportés à Bilimbay, Bogdanovich, Pervouralsk et Nizhny Tagil. Cette dispersion géographique démontre que la Légion Liberté de Russie n’est pas un mouvement localisé mais un réseau national capable de coordonner des actions simultanées à travers des milliers de kilomètres de territoire russe.

Ce qui rend ces attaques encore plus significatives, c’est que les partisans n’ont pas limité leurs opérations au territoire russe reconnu internationalement. Ils ont également frappé dans les territoires ukrainiens occupés par la Russie, démontrant que même dans les zones sous contrôle militaire russe direct, les forces d’occupation ne sont pas à l’abri de la résistance. Des locomotives ont été incendiées dans les oblasts de Donetsk et Kherson, montrant que les membres russes de la Légion Liberté de Russie peuvent opérer aussi librement dans les territoires occupés d’Ukraine qu’en Russie même. Cette capacité à frapper dans les zones occupées est particulièrement importante sur le plan psychologique, car elle sape le récit russe selon lequel ces territoires sont désormais définitivement intégrés à la Russie et sécurisés. Le renseignement militaire ukrainien a souligné que ces frappes ont considérablement ralenti le mouvement des ressources ennemies et affecté la stabilité de l’approvisionnement des unités de l’armée russe au front. Chaque locomotive détruite représente non seulement une perte matérielle immédiate, mais aussi une perturbation prolongée de la chaîne logistique, car les chemins de fer russes souffrent déjà d’une pénurie chronique de locomotives et de personnel qualifié pour les opérer, aggravée par les sanctions occidentales qui limitent l’accès aux pièces de rechange et aux équipements de maintenance.

8-9 novembre 2025 : Atesh paralyse les lignes ferroviaires en Crimée près de Simferopol

Le mouvement partisan Atesh, dont le nom signifie « feu » en tatar de Crimée, a frappé un coup majeur contre les lignes d’approvisionnement russes en Crimée occupée dans la nuit du 8 au 9 novembre 2025. Selon un communiqué publié sur le canal Telegram du mouvement le 9 novembre et relayé par de multiples sources ukrainiennes dont RBC-Ukraine et United24media, les agents d’Atesh ont mené une opération de sabotage sur les voies ferrées dans la région de Simferopol occupé. Cette frappe visait spécifiquement une artère logistique clé utilisée par les forces d’occupation russes pour acheminer des approvisionnements vers les directions de Kherson et Zaporijia, où les combats se poursuivent avec intensité. Le communiqué d’Atesh affirme que l’opération a réussi à arrêter le trafic ferroviaire, perturbant directement la livraison de munitions, de carburant et d’équipements aux troupes russes déployées sur ces fronts. Le mouvement a déclaré que même en profondeur dans l’arrière en Crimée, l’armée russe ne peut pas se sentir en sécurité, un message destiné autant à démoraliser les forces d’occupation qu’à inspirer la population ukrainienne sous occupation.

Cette opération s’inscrit dans une campagne plus large et systématique de sabotage ferroviaire menée par Atesh en Crimée occupée et dans d’autres territoires sous contrôle russe. Le 26 octobre 2025, selon En Defence-UA qui a rapporté l’incident le 25 octobre, le mouvement avait déjà mené une opération de sabotage réussie près d’Armiansk, une ville située au nord de la Crimée à l’entrée de la péninsule. Les agents d’Atesh avaient alors désactivé des équipements de relais ferroviaire, stoppant les mouvements de trains utilisés pour approvisionner l’armée d’occupation russe. Selon les partisans, ce sabotage avait été chronométré pour coïncider avec un pic d’activité logistique russe, retardant considérablement la livraison de munitions et de fournitures aux unités déployées dans la direction de Kherson. Chaque action de ce type crée des difficultés supplémentaires pour le groupe ennemi et réduit progressivement sa capacité de combat. Atesh a souligné dans ses communications que le mouvement continue de perturber systématiquement les routes d’approvisionnement des occupants, que son réseau d’agents s’étend, et que ses frappes deviennent de plus en plus efficaces.

La capacité d’Atesh à opérer en Crimée occupée est particulièrement remarquable étant donné les mesures de sécurité draconiennes mises en place par les autorités russes depuis l’annexion illégale de la péninsule en 2014. La Crimée abrite la base navale de Sévastopol, siège de la flotte russe de la mer Noire, ainsi que plusieurs bases aériennes militaires et installations de défense aérienne stratégiques. Le territoire est densément surveillé par les services de sécurité russes, y compris le FSB et la police militaire. Pourtant, Atesh parvient non seulement à survivre mais à prospérer dans cet environnement hostile, recrutant des agents locaux, collectant des renseignements sur les installations militaires russes, et menant des opérations de sabotage qui perturbent régulièrement les opérations militaires russes. Cette résilience témoigne du soutien persistant d’une partie de la population locale, notamment parmi les Tatars de Crimée et les Ukrainiens ethniques qui n’ont jamais accepté l’occupation russe et continuent de résister malgré la répression. Le mouvement partisan Atesh représente ainsi une forme de résistance permanente qui maintient contestée l’affirmation russe selon laquelle la Crimée est désormais définitivement et pacifiquement intégrée à la Fédération de Russie.

Octobre 2025 : une campagne soutenue de sabotage ferroviaire à travers la Russie

Le mois d’octobre 2025 a été marqué par une intensification spectaculaire des opérations de sabotage ferroviaire à travers tout le territoire russe. Selon la Direction principale du renseignement du ministère de la Défense ukrainien, qui a publié un bilan le 2 novembre 2025 tel que rapporté par Ukraine Today, les groupes partisans opérant à l’intérieur de la Fédération de Russie mènent un nombre croissant d’opérations de sabotage contre l’infrastructure ferroviaire russe. Le renseignement ukrainien a déclaré que les mouvements de résistance opérant sur le territoire de la Fédération de Russie ciblent activement les routes logistiques stratégiques. Ces attaques, allant de l’incendie criminel aux explosions, auraient perturbé les réseaux de transport essentiels à la logistique militaire. Selon le rapport du HUR, des incidents ont été signalés dans de multiples régions, y compris Briansk, Rostov et Mourmansk, ainsi qu’en Tchétchénie et en Karachay-Tcherkessie. Des opérations similaires ont également été rapportées dans les territoires occupés de Crimée et de la région de Louhansk, indiquant que la campagne s’étend au-delà des frontières internationalement reconnues de la Russie.

L’un des exemples les plus récents cités par le HUR concernait un sabotage réussi près de Novocherkassk dans la région de Rostov. Selon les rapports, l’opération a retardé des trains militaires transportant du personnel et de l’équipement, provoquant des perturbations en cascade dans les chaînes d’approvisionnement jugées vitales pour les forces russes. Le mouvement partisan Atesh a revendiqué la responsabilité de l’incendie volontaire d’une armoire de relais ferroviaire à Tokmak occupé, dans la région de Zaporijia, perturbant la logistique militaire russe le long d’une route d’approvisionnement clé. Le 7 octobre 2025, selon RBC-Ukraine, une ligne ferroviaire dans la région de Leningrad en Russie a été endommagée par une explosion tôt le matin, entraînant le déraillement d’un train transportant du fret militaire. L’explosion s’est produite le long de la route Stroganovo-Mshinskaya, perturbant l’une des principales lignes ferroviaires reliant Saint-Pétersbourg et Pskov. Selon des sources du renseignement ukrainien citées par le média, l’opération a été menée par des partisans locaux et a entraîné une paralysie temporaire du trafic ferroviaire sur la route. Les chemins de fer russes ont confirmé que le mouvement des trains avait été interrompu dans la zone mais ont décrit la cause comme des « raisons techniques ». Les trains de marchandises et de passagers ont été redirigés via des itinéraires alternatifs, entraînant des retards de plusieurs heures.

Ce schéma répété d’attaques démontre que la campagne de sabotage ferroviaire n’est pas composée d’incidents isolés mais représente une stratégie coordonnée et soutenue visant à dégrader systématiquement les capacités logistiques russes. Le HUR ukrainien a souligné que les actions coordonnées des groupes partisans compliquent considérablement la logistique ennemie, limitent la capacité de transférer de l’équipement et des renforts, et affaiblissent son potentiel offensif. Cette évaluation est corroborée par les rapports russes eux-mêmes, qui admettent de plus en plus ouvertement les problèmes rencontrés par les chemins de fer russes. Dès la fin 2023, les chemins de fer russes faisaient face à une disponibilité réduite des locomotives et une capacité de fret diminuée en raison des sanctions occidentales. Les restrictions imposées par l’Occident sur ce que les entreprises russes peuvent acheter à l’étranger signifient que les composants et pièces nécessaires pour effectuer la maintenance et les réparations sont en pénurie. À la mi-2025, les chemins de fer russes souffraient d’un déficit de trois mille équipages de locomotives et deux mille cinq cents ingénieurs, laissant environ deux cents trains dans leurs stocks tout simplement incapables de fonctionner. Chaque locomotive détruite par les saboteurs aggrave encore cette crise déjà critique.

Les méthodes opérationnelles : simplicité, efficacité et dispersion

Ce qui frappe dans cette campagne de sabotage, c’est la simplicité des méthodes employées conjuguée à leur efficacité dévastatrice. Les partisans ne disposent pas de missiles de croisière ni de drones sophistiqués. Ils utilisent des cocktails Molotov fabriqués artisanalement, des dispositifs explosifs improvisés rudimentaires, et des incendies volontaires. Selon les rapports du HUR ukrainien relayés par Telegrafi le 6 novembre 2025, les cocktails incendiaires des partisans ont incinéré les systèmes de contrôle et d’alimentation électrique de dizaines de véhicules utilisés pour transporter du fret militaire. Ces moyens simples mais efficaces ont été utilisés pour frapper les nœuds de transport les plus importants, sans causer de pertes civiles, mais en endommageant considérablement la capacité de l’armée russe à transporter équipements et troupes. La formulation prudente souligne une dimension éthique importante de ces opérations : les saboteurs ciblent délibérément l’infrastructure militaire et logistique tout en évitant les pertes civiles, contrairement aux bombardements russes aveugles sur les infrastructures civiles ukrainiennes.

La vidéo publiée par le Kyiv Independent montre la nature artisanale de ces opérations. Les premières secondes sont filmées du point de vue des partisans eux-mêmes, qui enregistrent leur vision des liquides inflammables qu’ils versent à l’intérieur des trains qu’ils ciblent. Après cela, nous voyons les résultats : train après train en flammes. De l’essence est allumée. Des cocktails Molotov sont lancés. Chaque train semble non gardé et vulnérable, ce qui constitue une lacune massive dans la sécurité d’un pays qui dépend si lourdement du rail pour se maintenir en fonctionnement. Il semble presque trop facile. Mais beaucoup plus probable est que le HUR et la Légion Liberté de Russie ont passé des semaines, peut-être même des mois, à sélectionner des trains spécifiques qu’ils savaient pouvoir être accessibles et qui étaient susceptibles d’être utilisés par la Russie pour transporter des armes et des munitions vers l’Ukraine. La vidéo alterne entre les sabotages si rapidement qu’il est difficile d’obtenir une idée précise du nombre de trains que la Légion Liberté de Russie a frappés pendant la nuit. Heureusement, nous n’avons pas besoin de nous fier uniquement aux images pour en savoir plus.

La dispersion géographique des opérations révèle également une planification sophistiquée et une structure organisationnelle décentralisée. Frapper simultanément à travers de multiples régions russes nécessite des cellules opérationnelles locales capables d’agir de manière autonome tout en se coordonnant sur le calendrier et les objectifs généraux. Cette structure cellulaire rend le mouvement beaucoup plus résilient face aux efforts de contre-espionnage russes. Si une cellule est compromise et ses membres arrêtés, les autres cellules continuent d’opérer car elles fonctionnent de manière compartimentée avec un minimum de connaissances sur les autres unités. Cette approche organisationnelle s’inspire des meilleures pratiques de la guerre de guérilla et des mouvements de résistance historiques, notamment la résistance française pendant la Seconde Guerre mondiale et les mouvements partisans dans les Balkans. La Légion Liberté de Russie et Atesh démontrent qu’ils ont appris ces leçons et les appliquent avec succès dans le contexte russe contemporain, transformant la profondeur stratégique que la Russie considérait comme un avantage en une vulnérabilité exploitable.

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