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Stavky et Novoselivka : quand Moscou filme des mensonges pour nourrir le Kremlin de victoires fantômes
Crédit: Adobe Stock

Petits groupes infiltrés, drapeaux plantés, caméras allumées

La mécanique est simple. Terriblement simple. Efficace aussi, du moins à court terme. Moscou a compris que dans l’ère des réseaux sociaux et de l’information instantanée, l’image compte plus que la réalité. Qu’une vidéo de trente secondes peut créer une perception qui mettra des heures, voire des jours à être démentie. Que pendant ce laps de temps, la propagande aura fait son œuvre. Les médias d’État russes auront diffusé les images. Les chaînes Telegram pro-Kremlin les auront partagées. Les trolls les auront amplifiées. Et même quand le démenti ukrainien arrivera, il sera trop tard. Le mal sera fait. L’illusion sera installée. Une partie de l’audience croira la version russe. Une autre doutera. Une troisième ne saura plus quoi penser. Mission accomplie pour Moscou. Le ministère russe de la Défense a perfectionné cette technique. Il ne s’agit plus d’opérations militaires classiques. Il s’agit d’opérations de communication déguisées en opérations militaires. Le but n’est pas de tenir le terrain. Le but est de filmer qu’on tient le terrain. Nuance. Énorme nuance. Mortelle nuance.

Les groupes russes reçoivent des ordres précis. Infiltrer. Filmer. Exfiltrer. Dans cet ordre. L’infiltration se fait généralement de nuit ou à l’aube. Petits groupes de cinq à dix soldats. Équipés léger. Pas de véhicules blindés bruyants. Pas d’artillerie de soutien. Juste des hommes, des armes légères, un drapeau et une caméra. Parfois une GoPro. Parfois un smartphone. L’important, c’est la qualité vidéo suffisante pour être diffusable. Ils progressent en évitant les positions ukrainiennes. Ils connaissent les angles morts. Ils ont étudié les cartes. Ils savent où sont les défenseurs. Ils contournent. Ils rampent. Ils attendent. Puis, quand l’opportunité se présente, ils foncent. Destination : un point reconnaissable. Un panneau de village. Une place centrale. Un bâtiment administratif. N’importe quoi qui permette d’identifier le lieu. Arrivés là, c’est le rush. Sortir le drapeau. Le planter. Se positionner. Allumer la caméra. Filmer. Trente secondes. Une minute maximum. Pas plus. Chaque seconde supplémentaire augmente le risque d’être repérés. D’être ciblés. D’être tués. Alors ils filment vite. Très vite. Puis ils tentent de repartir. Certains y arrivent. La plupart non.

Des soldats sacrifiés pour des clips de propagande

Le 3e Corps d’armée ukrainien ne mâche pas ses mots : « Chacun de ces groupes est systématiquement anéanti par les unités ukrainiennes. » Systématiquement. Le mot est important. Il signifie que ce n’est pas un hasard. Pas une malchance. Pas un accident. C’est une certitude. Ces soldats russes sont condamnés dès qu’ils acceptent la mission. Ils le savent probablement. Leurs commandants le savent certainement. Mais la mission est lancée quand même. Parce que la vidéo est plus importante que leurs vies. Parce que le rapport de succès à envoyer au Kremlin vaut plus que leur survie. Parce que dans la logique perverse de cette guerre, un mensonge bien filmé a plus de valeur qu’une vérité sans images. Les défenseurs ukrainiens ont développé des protocoles spécifiques pour gérer ces incursions. Dès qu’un groupe russe est repéré en train de filmer, l’alerte est donnée. Les drones de reconnaissance confirment la position. L’artillerie ajuste ses coordonnées. Les groupes de réaction rapide se déploient. Puis c’est l’élimination. Méthodique. Professionnelle. Sans pitié. Parce que ces soldats russes, même s’ils sont là pour une mission de propagande, restent des combattants ennemis. Même s’ils sont manipulés par leurs supérieurs, ils représentent une menace. Même s’ils sont condamnés d’avance, ils doivent être neutralisés.

Le cynisme de cette tactique est vertigineux. Moscou sacrifie délibérément ses propres soldats pour créer du contenu de propagande. Elle les envoie mourir non pas pour conquérir du terrain, mais pour filmer qu’ils conquièrent du terrain. Elle transforme des êtres humains en accessoires de mise en scène. En figurants d’un spectacle macabre. En acteurs d’une pièce dont ils ne verront jamais la fin. Et le pire, c’est que ça continue. Malgré les démentis ukrainiens. Malgré les pertes russes. Malgré l’évidence que cette tactique ne fonctionne pas militairement. Parce qu’elle fonctionne médiatiquement. Parce qu’elle permet aux commandants de la 20e Armée russe de remplir leurs rapports avec des « victoires ». Parce qu’elle nourrit la machine de propagande du Kremlin. Parce que dans un système où le mensonge est devenu la norme, dire la vérité est devenu un acte de résistance. Et résister, dans l’armée russe de 2025, c’est risquer sa carrière. Voire sa vie. Alors les commandants mentent. Les soldats meurent. Les vidéos circulent. Et le cycle recommence. Encore et encore. Jusqu’à ce que quelqu’un ait le courage de dire stop. Mais ce quelqu’un n’existe pas dans l’armée russe. Pas encore. Peut-être jamais.

Comment en arrive-t-on là ? Comment une armée peut-elle en arriver à sacrifier ses propres soldats pour des vidéos de propagande ? Je cherche une explication rationnelle et je n’en trouve pas. C’est au-delà de la logique militaire. Au-delà de la stratégie. Au-delà même du cynisme habituel des guerres. C’est quelque chose de plus profond. De plus malade. Une armée qui a perdu son âme. Un système qui a oublié que derrière chaque uniforme, il y a un être humain. Une mère qui attend. Un père qui espère. Des enfants qui ne reverront jamais leur papa. Tout ça pour trente secondes de mensonge. Tout ça pour satisfaire l’ego d’un dictateur qui refuse d’admettre qu’il est en train de perdre. C’est obscène. Et ça me rend malade.

Sources

Sources primaires

Ukrainska Pravda, « Ukrainian Armed Forces deny Russian claim of capturing two villages in Donetsk Oblast », 1er décembre 2025. Kyiv Post, « Ukraine Denies Russian ‘Capture’ Claims of 2 Villages in Lyman Sector », 1er décembre 2025. 3e Corps d’armée ukrainien, déclaration officielle sur Telegram, 1er décembre 2025. 60e Brigade mécanisée séparée « Inhulets », déclaration du commandant Dmytro Rohoziuk, 1er décembre 2025. État-major général des forces armées ukrainiennes, rapports quotidiens du 1er décembre 2025. DeepState, carte de situation au 1er décembre 2025.

Sources secondaires

Espreso Global, « Fake Russian videos claim capture of Ukrainian villages to impress Kremlin », 16 août 2025. Direction principale du renseignement ukrainien (HUR), rapport sur les tactiques russes de désinformation, août 2025. Institut pour l’étude de la guerre (ISW), analyses des gains territoriaux russes en novembre 2025. Agence France-Presse (AFP), analyse des avancées russes en novembre 2025. Mezha.net, « Ukrainian Armed Forces Deny Russian Claims of Capturing Stavky and Novoselivka », 1er décembre 2025. Yahoo News, « Ukrainian Armed Forces deny Russian claim of capturing two villages », 1er décembre 2025.

Ce contenu a été créé avec l'aide de l'IA.

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