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Quand les drones ukrainiens frappent le cœur de l’empire de Kadyrov
Crédit: Adobe Stock

Gudermes sous le feu des drones ukrainiens

Gudermes, deuxième ville de Tchétchénie avec ses 50 000 habitants, n’avait jamais connu pareille attaque depuis la fin de la seconde guerre de Tchétchénie en 2009. Cette ville située à une trentaine de kilomètres à l’est de Grozny abrite plusieurs installations militaires stratégiques, dont la base du 78e régiment motorisé spécial Sever-Akhmat. C’est précisément cette base qui a été frappée dans la nuit du 2 décembre. Les premières informations ont commencé à circuler vers 3 heures du matin, heure locale, sur les canaux Telegram tchétchènes. Des habitants rapportaient avoir entendu une explosion puissante suivie d’un incendie visible depuis plusieurs quartiers de la ville. Rapidement, des vidéos ont été publiées montrant un drone en approche finale vers un bâtiment de trois étages situé dans l’enceinte militaire. L’impact est net, précis. L’explosion qui suit illumine toute la zone. Sur les images suivantes, on distingue clairement les dégâts. Le bâtiment touché présente une façade éventrée, des fenêtres soufflées sur plusieurs niveaux, des traces d’incendie. Selon les sources OSINT (renseignement en sources ouvertes), ce bâtiment servait de casernement pour les soldats du régiment. Le nombre exact de victimes n’a pas été communiqué, mais plusieurs sources locales évoquent des pertes humaines significatives.

Le 78e régiment Sever-Akhmat n’est pas une unité ordinaire dans l’arsenal militaire russe. Formé en septembre 2022 sur ordre direct de Ramzan Kadyrov, ce régiment a été créé spécifiquement pour renforcer les forces russes engagées dans l’invasion de l’Ukraine. Son nom même, Sever-Akhmat (Nord-Akhmat), fait référence à Akhmad Kadyrov, le père de Ramzan, ancien grand mufti de Tchétchénie devenu président de la république avant d’être assassiné en 2004. Cette unité est subordonnée à la 42e division motorisée de la Garde russe, une formation d’élite qui a participé à toutes les opérations majeures de la guerre en Ukraine. Les soldats du Sever-Akhmat ont été déployés sur plusieurs fronts, notamment dans la région de Bakhmout et plus récemment dans le secteur de Pokrovsk. Leur réputation de brutalité les précède. De nombreux témoignages de civils ukrainiens et de prisonniers de guerre font état de violences extrêmes, de pillages systématiques, d’exécutions sommaires. Ces hommes ne sont pas de simples soldats. Ce sont les instruments d’une politique de terreur délibérée. Frapper leur base arrière à Gudermes, c’est donc toucher au cœur même du dispositif militaire de Kadyrov. C’est lui rappeler que ses hommes ne sont pas invincibles, que leur sanctuaire tchétchène n’est plus hors de portée.

Le bâtiment du FSB d’Achkhoy-Martan en flammes

Pendant que Gudermes brûlait, une autre frappe frappait Achkhoy-Martan, une ville de 30 000 habitants située à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Grozny. La cible cette fois était un bâtiment du FSB, le Service fédéral de sécurité de la Fédération de Russie. Selon les témoignages recueillis par le canal Telegram russe Astra, l’attaque s’est produite vers la même heure que celle de Gudermes, suggérant une coordination minutieuse des deux frappes. Les résidents locaux ont rapporté avoir entendu le bruit caractéristique d’un drone suivi d’une explosion et d’un incendie qui s’est rapidement propagé à l’ensemble du bâtiment. Les images publiées le lendemain montrent une structure de trois étages complètement ravagée par les flammes. Les murs noircis, les fenêtres béantes, la toiture effondrée témoignent de la violence de l’impact et de l’intensité de l’incendie qui a suivi. Contrairement à la frappe de Gudermes, aucune vidéo de l’attaque elle-même n’a été diffusée, mais les photos de l’après-coup ne laissent aucun doute sur l’ampleur des dégâts. Le bâtiment est inutilisable, probablement pour plusieurs mois voire définitivement.

Le choix de cibler une installation du FSB revêt une dimension hautement symbolique. Le Service fédéral de sécurité, successeur direct du KGB soviétique, est l’une des institutions les plus puissantes et les plus redoutées de Russie. En Tchétchénie et dans l’ensemble du Caucase du Nord, le FSB joue un rôle central dans le maintien de l’ordre et le contrôle de la population. C’est lui qui coordonne les opérations de contre-terrorisme, surveille les mouvements séparatistes, traque les opposants au régime. C’est aussi lui qui assure la liaison entre le pouvoir central à Moscou et les autorités locales, garantissant que les républiques caucasiennes restent fermement sous contrôle russe. En Tchétchénie spécifiquement, le FSB travaille en étroite collaboration avec les forces de Kadyrov, partageant renseignements et ressources. Le bâtiment d’Achkhoy-Martan abritait probablement des bureaux administratifs, des salles d’interrogatoire, des centres de communication. Sa destruction représente donc une perte opérationnelle significative pour les services de sécurité russes dans la région. Mais au-delà de l’aspect purement militaire, c’est surtout un coup porté au prestige et à l’image d’invulnérabilité que le FSB cultive soigneusement. Montrer qu’un bâtiment du FSB peut être détruit en plein cœur de la Tchétchénie, c’est démontrer que même les institutions les plus protégées de l’État russe ne sont plus à l’abri.

Il y a une forme de justice poétique dans le fait que ce soit précisément le FSB qui soit touché. Cette organisation qui a orchestré tant de souffrances, tant de disparitions, tant de tortures dans le Caucase et ailleurs. Cette machine répressive qui broie les vies sans état d’âme au nom de la sécurité de l’État. La voir frappée au cœur de son sanctuaire tchétchène, c’est comme voir un bourreau recevoir un avant-goût de ce qu’il inflige à ses victimes. Je ne me réjouis pas de la violence en soi. Mais je ne peux nier une certaine satisfaction à voir les instruments de l’oppression subir à leur tour ce qu’ils font subir aux autres. C’est brutal, c’est cru, mais c’est la réalité de cette guerre.

Sources

Sources primaires

UNITED24 Media, « Drone Strike Blasts FSB Facility Deep Inside Chechnya, Video Shows Direct Hit », 2 décembre 2025. Kyiv Post, « Explosions, Fire in Chechnya as Drone Strike Hits FSB, Akhmat Sites », 2 décembre 2025. Defense Express, « Ukrainian Drones Hit Military Unit of Kadyrov’s Forces and FSB Building in russia’s Chechnya », 2 décembre 2025. Supernova+ (canal Telegram OSINT), publications du 2 décembre 2025. Exilenova+ (canal Telegram), vidéos et analyses du 2 décembre 2025. Astra (canal Telegram russe), témoignages de résidents locaux, 2 décembre 2025. Ministère russe de la Défense, communiqué sur les drones abattus, 2 décembre 2025. NEWS.ru, interview du général-major Sergei Lipovoy, décembre 2025.

Sources secondaires

The Moscow Times, « Ukrainian Drone Strikes Damage Energy Sites in Oryol Region, FSB Building in Chechnya », 2 décembre 2025. Militarnyi, « A drone strike hit a special forces barracks in Grozny », novembre-décembre 2024. Euromaidan Press, « Drone strikes Kadyrov’s forces barracks in Grozny overnight », décembre 2024. Reuters, « Ukrainian drone hits police barracks in Russia’s Chechnya », 12 décembre 2024. AP News, « Ukrainian drone hits Russia’s Chechnya », décembre 2024. Institute for the Study of War (ISW), rapports d’analyse sur les opérations en Tchétchénie, 2024-2025. Proekt Media, « Chechnya’s Kadyrov Nearly Triples Loyal Military Units During Ukraine War », décembre 2024. Novaya Gazeta Europe, « Why did Chechen air defence systems fail to respond during a drone attack », décembre 2024. OC Media, « Ukrainian drones strike military units in Chechnya », décembre 2024. Caucasian Knot, « Chechnya found itself in the zone of drone attacks », 2024-2025.

Ce contenu a été créé avec l'aide de l'IA.

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