Les oubliés de Sibérie et du Caucase
Les pertes russes ne sont pas réparties uniformément à travers le pays. Certaines régions paient un tribut beaucoup plus lourd que d’autres. Les républiques du Caucase, la Bouriatie, les régions rurales de Sibérie fournissent proportionnellement beaucoup plus de soldats que Moscou ou Saint-Pétersbourg. C’est une guerre de pauvres, menée par les pauvres, pour enrichir les riches. Les fils des oligarques ne meurent pas en Ukraine. Ce sont les fils des ouvriers, des paysans, des chômeurs qui tombent sous les obus. Cette réalité crée une fracture sociale profonde en Russie, même si la censure et la répression empêchent toute contestation ouverte. Dans certains villages de Bouriatie ou du Daghestan, presque toutes les familles ont perdu un fils, un frère, un père. Les cimetières débordent de tombes fraîches, ornées de photos de jeunes hommes en uniforme.
Mais à Moscou, la vie continue presque normalement. Les restaurants sont pleins, les boutiques de luxe prospèrent, les théâtres affichent complet. Deux Russies coexistent : celle qui meurt en Ukraine, et celle qui fait semblant de ne rien voir. Cette dichotomie est insoutenable. Elle crée des tensions, des ressentiments, des colères sourdes qui ne demandent qu’à exploser. Les régions qui fournissent le plus de soldats sont aussi les plus pauvres, les plus isolées, les plus oubliées par le pouvoir central. Elles n’ont pas accès aux mêmes services, aux mêmes opportunités, aux mêmes perspectives d’avenir que les grandes métropoles. Et maintenant, on leur demande de sacrifier leurs fils pour une guerre dont elles ne comprennent ni les enjeux ni les objectifs. C’est une injustice criante, un scandale moral que le Kremlin préfère ignorer.
Mediazona et la comptabilité des morts
Mediazona, en collaboration avec la BBC russe et une équipe de volontaires, maintient une liste nominative des soldats russes tués, compilée à partir de sources publiques vérifiables. Au 19 décembre 2025, ils avaient confirmé le décès de 155 300 soldats russes dont l’identité a pu être établie. Ce chiffre, bien qu’impressionnant, ne représente qu’une fraction des pertes réelles. Tous les décès ne sont pas rendus publics. Beaucoup de familles, par peur ou par honte, ne publient rien sur les réseaux sociaux. Les autorités locales ne communiquent pas systématiquement. Et puis il y a tous ces soldats qui disparaissent simplement, avalés par le brouillard de la guerre, dont on ne retrouvera jamais les corps. Pour pallier ces limites, Mediazona a développé une méthode statistique basée sur l’excès de mortalité masculine enregistré dans le Registre russe des testaments.
Cette approche suggère que les pertes réelles sont au moins deux fois supérieures aux chiffres officiellement confirmés. Peut-être même trois fois. Personne ne sait vraiment. Et c’est peut-être ça le plus terrible : même le nombre exact de morts reste un mystère, une zone d’ombre que le Kremlin entretient soigneusement. Chaque jour, de nouveaux noms s’ajoutent à la liste. Chaque jour, de nouvelles familles plongent dans le deuil. Chaque jour, la Russie perd un peu plus de sa jeunesse, de sa vitalité, de son avenir. Et tout ça pour quoi ? Pour quelques kilomètres carrés de terres dévastées, pour des villages en ruines, pour des champs minés et inhabitables. Le calcul est simple, brutal, insoutenable : la Russie sacrifie son avenir pour un présent qui n’a aucun sens.
Quand je pense à ces op-rateurs de drones ukrainiens. Ils sont assis dans un bunker, à des kilomètres du front, les yeux rivés sur un écran. Ils voient un soldat russe avancer, peut-être un gamin de vingt ans qui ne voulait pas être là. Ils appuient sur un bouton. Le drone plonge. Explosion. Le soldat disparaît. Et l’opérateur passe à la cible suivante. C’est ça, la guerre moderne. Aseptisée, distante, mais tout aussi meurtrière. Peut-être même plus, parce qu’elle déshumanise complètement l’ennemi. Il n’est plus qu’un pixel sur un écran, une cible à éliminer. Pas un être humain avec une famille, des rêves, des peurs. Juste une cible.
L'armée russe : une machine à broyer les vies
La doctrine stalinienne ressuscitée
Les tactiques employées par l’armée russe en Ukraine ne sont pas nouvelles. Elles puisent directement dans l’héritage de la Seconde Guerre mondiale et de la doctrine militaire soviétique. Les assauts frontaux massifs, le mépris total pour les pertes humaines, l’utilisation de vagues successives d’infanterie pour submerger les défenses ennemies : tout cela rappelle les heures les plus sombres de la bataille de Stalingrad ou du siège de Leningrad. À l’époque, Staline avait ordonné à ses généraux de ne pas reculer d’un pouce, quelles que soient les pertes. Les soldats qui tentaient de battre en retraite étaient abattus par leurs propres officiers. Aujourd’hui, les méthodes ont à peine évolué. Les soldats russes sont envoyés à l’assaut en groupes de dix, vingt, parfois cinquante hommes, sans couverture aérienne adéquate, sans soutien d’artillerie suffisant.
Ils avancent à découvert, sous le feu des mitrailleuses ukrainiennes, des drones FPV, des obus de mortier. Beaucoup meurent avant même d’avoir atteint les lignes ennemies. Ceux qui survivent sont souvent blessés, traumatisés, incapables de continuer. Mais qu’importe : une nouvelle vague arrive derrière eux, puis une autre, et encore une autre, jusqu’à ce que les défenseurs ukrainiens soient à court de munitions ou submergés par le nombre. Cette stratégie du rouleau compresseur humain a un coût effroyable. Pour chaque kilomètre carré de territoire conquis, la Russie sacrifie des centaines, parfois des milliers de soldats. En 2023, elle a gagné 530 kilomètres carrés au prix de 250 000 vies. C’est l’équivalent de la superficie de Varsovie, Vienne ou Budapest. En 2024, elle a progressé de 3 600 kilomètres carrés en perdant 430 000 hommes.
Les drones : la nouvelle faucheuse
Si les tactiques russes rappellent la Seconde Guerre mondiale, les armes utilisées par les Ukrainiens appartiennent résolument au XXIe siècle. Les drones FPV (First Person View) sont devenus l’arme la plus redoutée du champ de bataille. Ces petits engins, pilotés à distance par des opérateurs ukrainiens, peuvent traquer un soldat isolé, suivre un véhicule blindé, frapper avec une précision chirurgicale. Ils ont rendu les assauts d’infanterie encore plus meurtriers qu’auparavant. Un soldat russe qui avance à découvert est une cible facile pour un drone. Il peut se cacher derrière un arbre, se jeter dans un trou d’obus, ramper dans la boue : le drone le retrouvera. Et quand il le retrouve, c’est fini. Une explosion, un éclair, et le soldat disparaît. Les vidéos de ces frappes circulent par milliers sur les réseaux sociaux.
Les commandants russes savent que leurs soldats sont des cibles faciles pour les drones ukrainiens. Ils le savent, et pourtant ils continuent de les envoyer à l’assaut. Parce qu’ils n’ont pas d’autre choix. Les véhicules blindés, autrefois l’épine dorsale des offensives mécanisées, sont devenus trop vulnérables. Un char moderne coûte plusieurs millions de dollars et peut être détruit par un drone à 500 euros. Le calcul est vite fait. Alors l’armée russe est revenue à l’infanterie, à la chair humaine, à la masse. Elle envoie des hommes par vagues, sachant que beaucoup mourront, mais espérant qu’assez survivront pour atteindre les lignes ennemies. C’est une logique comptable, froide, inhumaine. Chaque soldat est un pion, une ressource consommable. S’il meurt, on le remplace. La Russie a 144 millions d’habitants. Elle peut se permettre de perdre un million de soldats, puis deux, puis trois. Du moins, c’est ce que semble penser le Kremlin.
Les drones ont transformé cette guerre en quelque chose d’étrange, de presque irréel. On voit des vidéos de soldats filmés par des drones, traqués comme des animaux, éliminés sans qu’ils aient la moindre chance de riposter. C’est une guerre asymétrique, où la technologie écrase l’humain. Et ça me met mal à l’aise. Parce que si les drones sont si efficaces, si bon marché, si faciles à produire, qu’est-ce qui empêchera leur prolifération ? Demain, n’importe quel groupe armé, n’importe quel État voyou pourra se doter de milliers de drones et les utiliser contre des populations civiles. Cette guerre en Ukraine est peut-être un avant-goût de ce qui nous attend. Et c’est terrifiant.
Bakhmout : le symbole de l'absurdité
Neuf mois de carnage pour des ruines
La bataille de Bakhmout restera dans l’histoire comme l’une des plus meurtrières et des plus absurdes de cette guerre. Cette petite ville du Donbass, qui comptait 70 000 habitants avant le conflit, est devenue le théâtre d’affrontements d’une violence inouïe entre l’été 2022 et le printemps 2023. Le groupe paramilitaire Wagner, dirigé par Evgueni Prigojine, a été chargé de prendre la ville. Pour cela, il a utilisé des tactiques dignes de la Première Guerre mondiale : des assauts frontaux répétés, des vagues d’infanterie lancées contre les positions ukrainiennes, un pilonnage d’artillerie constant. Les combattants de Wagner, dont beaucoup étaient d’anciens prisonniers recrutés dans les colonies pénitentiaires russes, ont été envoyés à l’assaut par groupes de dix ou vingt. Ils avançaient à découvert, sous le feu des mitrailleuses et des mortiers ukrainiens. La plupart mouraient avant d’avoir parcouru cent mètres.
Les pertes de Wagner à Bakhmout ont été colossales. Selon plusieurs estimations, le groupe paramilitaire a perdu entre 20 000 et 30 000 hommes dans cette bataille. Peut-être plus. Prigojine lui-même, dans une vidéo diffusée en mai 2023, avait évoqué des pertes massives, sans donner de chiffre précis. Mais il avait reconnu que ses unités avaient été décimées, que beaucoup de ses meilleurs combattants étaient morts. Et pour quel résultat ? Bakhmout a finalement été prise par les forces russes en mai 2023, après neuf mois de combats acharnés. Mais la ville n’était plus qu’un champ de ruines. Tous les bâtiments avaient été détruits ou gravement endommagés. Il n’y avait plus d’habitants, plus d’infrastructure, plus rien. Juste des décombres et des cadavres. La victoire russe était purement symbolique. Elle n’avait aucune valeur stratégique. Bakhmout ne contrôlait aucun axe routier important, ne protégeait aucune position clé.
Avdiivka et Chasiv Yar : le même scénario
Après Bakhmout, l’armée russe s’est attaquée à d’autres villes du Donbass, avec les mêmes méthodes et les mêmes résultats. Avdiivka, une ville industrielle située près de Donetsk, a été le théâtre de combats intenses entre l’automne 2023 et le début 2024. Les forces ukrainiennes, solidement retranchées dans des positions fortifiées, ont infligé des pertes terribles aux assaillants russes. Selon l’État-major ukrainien, 40 000 soldats russes ont été éliminés dans la bataille d’Avdiivka. Quarante mille. C’est l’équivalent de deux divisions entières. Et comme à Bakhmout, la ville a finalement été prise par les Russes, mais au prix d’un sacrifice humain démesuré. Avdiivka n’était plus qu’un tas de gravats lorsque les derniers défenseurs ukrainiens se sont repliés. Il n’y avait plus rien à défendre, plus rien à conquérir. Juste des ruines fumantes et des champs de mines.
La bataille de Chasiv Yar illustre encore mieux l’absurdité de cette guerre. Cette petite ville, située à quelques kilomètres à l’ouest de Bakhmout, résiste depuis 18 mois maintenant aux assauts russes. Malgré des attaques répétées, des bombardements constants, des tentatives d’encerclement, les forces ukrainiennes tiennent bon. Et pendant ce temps, les pertes russes s’accumulent. Près de 12 000 soldats ont déjà été tués dans les combats autour de Chasiv Yar. Douze mille hommes pour une ville qui n’a aucune importance stratégique particulière. Mais l’armée russe ne peut pas reculer. Elle ne peut pas admettre l’échec. Alors elle continue d’envoyer des hommes, encore et encore, dans l’espoir qu’à force de sacrifices, la ville finira par tomber. C’est une logique de l’épuisement, où la victoire revient à celui qui accepte de perdre le plus de soldats. Et dans ce jeu macabre, la Russie semble prête à aller jusqu’au bout.
Quand je lis les récits de ces batailles, je ne peux m’empêcher de penser aux soldats qui y ont participé. Qu’est-ce qui passe par la tête d’un homme qui reçoit l’ordre d’attaquer une position fortifiée, sachant qu’il a neuf chances sur dix de mourir avant d’y arriver ? Est-ce qu’il pense à sa famille ? À sa vie d’avant ? Ou est-ce qu’il est tellement conditionné, tellement endoctriné, qu’il ne pense plus à rien ? Je ne sais pas. Et c’est peut-être mieux comme ça. Parce que si je savais, si je comprenais vraiment ce qui se passe dans la tête de ces hommes, je crois que je ne pourrais plus écrire.
Le matériel militaire russe : une hémorragie sans fin
Des chars par milliers
Au-delà des pertes humaines, l’armée russe subit également des pertes matérielles considérables. Selon les chiffres de l’État-major ukrainien, 11 472 chars russes ont été détruits depuis le début de l’invasion. Onze mille quatre cent soixante-douze. C’est un chiffre colossal qui dépasse largement les stocks initiaux de l’armée russe. Avant la guerre, la Russie disposait d’environ 3 000 chars modernes en service actif, plus plusieurs milliers d’anciens modèles stockés dans des dépôts. Pour compenser les pertes, le Kremlin a dû puiser dans ces réserves, remettre en état des chars T-62 et T-55 datant des années 1960 et 1970, voire récupérer des épaves dans des musées militaires. Mais même ces mesures désespérées ne suffisent pas. Les images satellites montrent que les dépôts de chars russes se vident progressivement.
Les véhicules blindés subissent le même sort. 23 837 ont été détruits, selon les données ukrainiennes. Ces véhicules, qui transportent l’infanterie et fournissent un appui-feu rapproché, sont essentiels pour les opérations offensives. Sans eux, les soldats doivent avancer à pied, exposés au feu ennemi. C’est l’une des raisons pour lesquelles les pertes humaines russes sont si élevées : l’armée manque de véhicules pour protéger ses troupes. Elle est donc contrainte de recourir à des assauts d’infanterie à découvert, beaucoup plus meurtriers. Quant à l’artillerie, colonne vertébrale de la doctrine militaire russe, elle aussi fond comme neige au soleil. 35 570 systèmes d’artillerie ont été détruits, dont 1 581 lance-roquettes multiples. Ces pertes sont d’autant plus graves que l’artillerie russe dépend largement de stocks de munitions hérités de l’ère soviétique.
La guerre aérienne et navale
Dans les airs, la Russie a perdu 434 avions et 347 hélicoptères depuis le début de la guerre. Ces chiffres incluent des appareils modernes comme les Su-34, des bombardiers tactiques de dernière génération, et des hélicoptères d’attaque Ka-52. Chaque appareil perdu représente non seulement un coût financier énorme (un Su-34 coûte environ 50 millions de dollars), mais aussi la perte de pilotes expérimentés, dont la formation prend des années. La Russie dispose certes d’une importante flotte aérienne, mais elle ne peut pas se permettre de perdre des centaines d’appareils sans conséquences. D’autant que l’industrie aéronautique russe, frappée par les sanctions occidentales, a du mal à produire de nouveaux avions. Les chaînes de production tournent au ralenti, faute de composants électroniques importés.
En mer, la situation n’est guère meilleure. La flotte russe de la mer Noire a perdu 28 navires ou bateaux de guerre, dont le croiseur lance-missiles Moskva, navire amiral de la flotte, coulé en avril 2022 par des missiles ukrainiens. Deux sous-marins ont également été détruits. Ces pertes ont contraint la Russie à retirer une grande partie de sa flotte de Sébastopol, en Crimée, pour la redéployer dans des ports plus sûrs. La mer Noire, autrefois dominée par la marine russe, est devenue un espace contesté où les Ukrainiens, malgré l’absence de flotte de surface, parviennent à infliger des dégâts significatifs grâce à des drones navals et des missiles anti-navires. Cette évolution illustre une tendance plus large : la guerre moderne favorise les armes asymétriques, peu coûteuses mais redoutablement efficaces, au détriment des plateformes conventionnelles lourdes et onéreuses.
Ces chiffres de matériel détruit me fascinent et m’horrifient à la fois. Chaque char, chaque avion, chaque navire représente des millions de dollars, des années de travail, des ressources immenses. Et tout ça part en fumée en quelques secondes. Un missile, une explosion, et c’est fini. Mais au-delà de l’aspect financier, il y a quelque chose de profondément symbolique dans cette destruction. C’est comme si la Russie se dévorait elle-même, consumait ses propres forces dans un feu qui ne s’éteint jamais. Et le plus tragique, c’est qu’elle ne semble pas capable de s’arrêter.
Les drones : l'arme qui a changé la guerre
Une révolution tactique
Si cette guerre a apporté une innovation majeure dans l’art militaire, c’est bien l’utilisation massive des drones. Selon les chiffres ukrainiens, 96 532 drones russes de niveau opérationnel-tactique ont été abattus depuis le début du conflit. Mais ce chiffre ne reflète qu’une partie de la réalité. Les deux camps utilisent des drones par dizaines de milliers, dans tous les domaines : reconnaissance, frappe, guerre électronique, logistique. Les drones FPV, en particulier, ont révolutionné le champ de bataille. Ces petits engins, souvent fabriqués à partir de composants commerciaux, peuvent être pilotés à distance par un opérateur situé à plusieurs kilomètres. Ils sont rapides, maniables, difficiles à détecter. Et surtout, ils sont bon marché. Un drone FPV coûte entre 300 et 500 euros à produire. Il peut détruire un char à plusieurs millions de dollars, tuer un soldat, neutraliser une position fortifiée.
Cette révolution technologique a profondément modifié les tactiques militaires. Les assauts blindés, autrefois l’épine dorsale des offensives modernes, sont devenus extrêmement risqués. Un char qui avance à découvert est une cible facile pour un drone. Il peut être frappé par le dessus, là où son blindage est le plus faible. Même les chars les plus modernes, équipés de systèmes de protection active, peinent à se défendre contre des essaims de drones attaquant simultanément. Résultat : les armées sont revenues à l’infanterie, à la guerre de tranchées, aux combats rapprochés. Mais l’infanterie, elle aussi, est vulnérable aux drones. Un soldat isolé dans un champ peut être repéré, traqué, éliminé en quelques minutes. Les seules protections efficaces sont les bunkers souterrains, les forêts denses, les zones urbaines où les drones ont du mal à manœuvrer.
La course technologique
Face à la menace des drones, les deux camps cherchent des parades. Les Russes ont développé des systèmes de guerre électronique capables de brouiller les signaux de contrôle des drones, de les faire crasher ou de les détourner. Mais les Ukrainiens ripostent en utilisant des drones autonomes, capables de fonctionner sans liaison radio constante avec l’opérateur. Ces drones utilisent l’intelligence artificielle pour identifier et suivre leurs cibles, ce qui les rend beaucoup plus difficiles à contrer. C’est une véritable course aux armements qui se joue sous nos yeux, avec des innovations constantes de part et d’autre. Les Russes déploient des filets anti-drones au-dessus de leurs positions, des cages métalliques sur leurs chars, des systèmes de fumigènes pour masquer leurs mouvements. Les Ukrainiens développent des drones plus rapides, plus furtifs, capables de voler à très basse altitude pour échapper aux radars.
Cette guerre des drones a également une dimension industrielle. L’Ukraine, avec l’aide de ses partenaires occidentaux, a mis en place une production massive de drones. Des dizaines d’entreprises, souvent de petites start-ups, fabriquent des milliers d’unités chaque mois. La Russie fait de même, mobilisant son industrie pour produire des drones en quantités toujours plus importantes. Mais la qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Beaucoup de drones russes sont des copies de modèles chinois ou iraniens, souvent moins performants que leurs équivalents ukrainiens. Et surtout, la Russie souffre des sanctions occidentales qui limitent son accès aux composants électroniques de haute technologie. Elle doit se tourner vers des fournisseurs chinois ou contourner les embargos par des circuits parallèles, ce qui augmente les coûts et ralentit la production.
Cette guerre des chiffres me fatigue. Comme si le nombre exact de morts changeait quoi que ce soit à l’horreur de la situation. Qu’ils soient 800 000 ou 1,2 million, ça reste une tragédie absolue. Mais je comprends pourquoi c’est important. Parce que les chiffres, aussi froids soient-ils, sont la seule façon de percer le brouillard de la propagande. Ils sont la preuve tangible que cette guerre est un désastre. Et tant que le Kremlin refusera de les publier, nous devrons continuer à les compter, à les vérifier, à les documenter. C’est notre devoir de mémoire envers tous ces hommes qui sont morts pour rien.
La dimension économique : une guerre qui coûte des milliards
Le fardeau financier
Au-delà du coût humain et matériel, cette guerre représente un fardeau économique colossal pour la Russie. Selon plusieurs estimations, le conflit coûte entre 150 et 200 milliards de dollars par an au budget russe. Ce chiffre inclut les dépenses militaires directes (salaires des soldats, achat de munitions, entretien du matériel), mais aussi les coûts indirects (compensations aux familles, reconstruction des infrastructures, pertes économiques liées aux sanctions). Pour financer cette guerre, le Kremlin a dû puiser dans ses réserves de change, augmenter les impôts, réorienter l’économie vers la production militaire. Le budget de la défense russe a explosé, passant de 65 milliards de dollars en 2021 à plus de 150 milliards en 2025. C’est désormais le premier poste de dépenses de l’État, devant l’éducation, la santé ou les infrastructures.
Les sanctions occidentales aggravent encore la situation. Depuis 2022, l’Union européenne, les États-Unis et leurs alliés ont imposé des milliers de sanctions visant l’économie russe. Les exportations de technologies de pointe vers la Russie sont interdites. Les banques russes sont coupées du système SWIFT. Les avoirs des oligarques russes à l’étranger sont gelés. Le pétrole et le gaz russes font l’objet d’embargos partiels. Ces mesures ont eu un impact significatif. La croissance économique russe a ralenti, l’inflation a grimpé, le rouble s’est déprécié. Certes, la Russie a trouvé des moyens de contourner certaines sanctions, notamment en réorientant ses exportations vers la Chine, l’Inde et d’autres pays non-alignés. Mais le coût de ces contournements est élevé. Le pétrole russe se vend avec une décote importante. Les importations de biens occidentaux passent par des circuits parallèles qui augmentent les prix.
Une économie de guerre insoutenable
La transformation de l’économie russe en économie de guerre pose également des problèmes structurels. Des milliers d’entreprises civiles ont été converties pour produire du matériel militaire. Des usines automobiles fabriquent maintenant des véhicules blindés. Des entreprises électroniques produisent des composants pour drones et missiles. Cette réorientation a permis à la Russie de maintenir un niveau de production militaire élevé malgré les sanctions. Mais elle se fait au détriment de l’économie civile. Les biens de consommation se raréfient, les prix augmentent, la qualité baisse. Les Russes ordinaires voient leur pouvoir d’achat diminuer, leurs conditions de vie se dégrader. Et cette situation ne peut pas durer indéfiniment. À un moment donné, l’économie russe atteindra ses limites. Les réserves de change s’épuiseront. Les stocks de matériel soviétique seront vides.
Certains économistes estiment que la Russie pourra tenir encore deux ou trois ans à ce rythme. D’autres pensent qu’elle peut continuer plus longtemps, en mobilisant encore davantage son économie, en augmentant la production militaire, en réduisant les dépenses civiles. Mais tous s’accordent sur un point : cette guerre est insoutenable à long terme. La Russie ne peut pas indéfiniment sacrifier son avenir économique pour une guerre qui ne lui apporte aucun bénéfice tangible. Les territoires conquis en Ukraine sont dévastés, leur reconstruction coûtera des centaines de milliards. Les sanctions occidentales ne seront pas levées tant que la guerre continuera. Et la population russe, pour l’instant passive, pourrait à terme se révolter contre un régime qui l’appauvrit et envoie ses fils mourir pour rien. Le Kremlin joue une partie dangereuse, pariant que l’Ukraine et l’Occident céderont avant que la Russie ne s’effondre.
Quand je pense à l’économie russe, je me dis que c’est comme regarder un train foncer vers un mur. On sait que ça va mal finir, mais on ne peut rien faire pour l’arrêter. Le Kremlin a fait le choix de la guerre totale, de la mobilisation complète de la société et de l’économie. Et maintenant, il ne peut plus reculer. Parce que reculer, ce serait admettre l’échec, reconnaître que toutes ces vies, tout cet argent, toutes ces ressources ont été gaspillées pour rien. Alors il continue, envers et contre tout, espérant que l’adversaire craquera le premier. C’est une logique suicidaire, mais c’est la seule qui reste au régime.
Les officiers russes : une hécatombe dans les rangs
Des généraux qui tombent
Parmi les pertes russes, celles des officiers sont particulièrement significatives. Au 19 décembre 2025, Mediazona avait confirmé le décès de 6 168 officiers de l’armée russe et d’autres agences de sécurité. Ce chiffre inclut des officiers de tous grades, du lieutenant au général. Mais ce qui est frappant, c’est le nombre de généraux tués. Douze généraux russes ont officiellement perdu la vie dans cette guerre : trois lieutenants-généraux, sept majors-généraux, et deux généraux à la retraite. C’est un chiffre sans précédent dans les conflits modernes. Lors de la guerre en Afghanistan (1979-1989), l’Union soviétique n’avait perdu qu’un seul général en dix ans de combats. En Ukraine, la Russie en a perdu douze en moins de quatre ans. Cette hécatombe s’explique par plusieurs facteurs.
D’abord, les généraux russes ont tendance à se rapprocher du front pour superviser directement les opérations, ce qui les expose aux frappes ukrainiennes. Ensuite, les Ukrainiens ciblent délibérément les postes de commandement, utilisant des renseignements précis et des armes de haute précision pour éliminer les officiers supérieurs. Parmi les généraux tués, certains cas sont particulièrement emblématiques. Le lieutenant-général Igor Kirillov, chef des troupes de protection nucléaire, biologique et chimique, a été tué en décembre 2024 par une bombe à Moscou même, dans une opération attribuée aux services de renseignement ukrainiens. Le lieutenant-général Yaroslav Moskalik, officier supérieur de la Direction principale des opérations de l’État-major général, a été tué en avril 2025 par une voiture piégée dans une banlieue de Moscou. Ces assassinats ciblés montrent que la guerre ne se limite plus au champ de bataille ukrainien.
L’impact sur le commandement
La perte de tant d’officiers supérieurs a des conséquences importantes sur l’efficacité de l’armée russe. Les généraux ne sont pas facilement remplaçables. Leur formation prend des décennies. Ils possèdent une expérience, une connaissance du terrain, une capacité à coordonner des opérations complexes que les officiers juniors n’ont pas. Quand un général meurt, c’est toute une chaîne de commandement qui est perturbée. Les décisions prennent plus de temps, les ordres sont moins clairs, la coordination entre les unités se dégrade. Et dans une guerre moderne, où la rapidité et la précision sont essentielles, ces dysfonctionnements peuvent être fatals. Les Ukrainiens l’ont bien compris. Ils consacrent des ressources importantes à l’identification et à l’élimination des officiers russes. Chaque général tué est une victoire stratégique, bien au-delà de la simple élimination d’un individu.
La proportion d’officiers parmi les pertes russes a évolué au fil de la guerre. Au début du conflit, quand l’armée régulière constituait l’essentiel des forces d’invasion, les officiers représentaient jusqu’à 10% des pertes. Aujourd’hui, avec le recrutement massif de volontaires et de mobilisés, cette proportion est tombée à 2-3%. Cela ne signifie pas que moins d’officiers meurent en valeur absolue, mais plutôt que les pertes d’infanterie ont explosé. Les officiers, qui commandent depuis des positions relativement protégées, ont un taux de survie supérieur à celui des simples soldats envoyés à l’assaut. Mais même avec ce taux de survie plus élevé, les pertes d’officiers restent considérables. 6 168 officiers tués, c’est l’équivalent de plusieurs académies militaires entières. C’est une génération d’officiers qui disparaît, emportant avec elle son expérience, ses compétences, sa mémoire institutionnelle.
La mort des généraux russes me laisse un sentiment étrange. D’un côté, ce sont des responsables militaires, des hommes qui ont planifié et exécuté cette invasion. Ils portent une part de responsabilité dans le carnage. Mais d’un autre côté, ce sont aussi des êtres humains, avec des familles, des histoires. Et leur mort ne change rien au cours de la guerre. Un général tué est immédiatement remplacé par un autre, qui continuera la même politique, les mêmes tactiques, les mêmes erreurs. C’est comme si le système était plus fort que les individus, comme si la machine de guerre fonctionnait toute seule, indépendamment de ceux qui la dirigent.
La guerre des chiffres : qui dit la vérité ?
Les sources ukrainiennes
Les chiffres de pertes russes que nous utilisons proviennent principalement de l’État-major ukrainien, qui publie quotidiennement un décompte des pertes ennemies. Ces chiffres sont-ils fiables ? C’est une question légitime. Dans toute guerre, chaque camp a tendance à exagérer les pertes adverses et à minimiser les siennes. C’est une constante historique. Cependant, plusieurs éléments suggèrent que les chiffres ukrainiens sont globalement crédibles. D’abord, ils sont cohérents dans le temps. Les augmentations quotidiennes correspondent aux intensités des combats rapportées par d’autres sources. Ensuite, ils sont corroborés par des sources indépendantes comme Mediazona, qui a confirmé l’identité de plus de 155 000 soldats russes tués. Certes, ce chiffre est bien inférieur aux 1,2 million annoncés par l’Ukraine, mais il faut rappeler que Mediazona ne compte que les morts dont l’identité a pu être vérifiée à partir de sources publiques.
Les méthodes statistiques développées par Mediazona en collaboration avec Meduza apportent un éclairage supplémentaire. En analysant l’excès de mortalité masculine enregistré dans le Registre russe des testaments, ils ont estimé que les pertes réelles pourraient être deux à trois fois supérieures aux chiffres confirmés. Cela donnerait un total de 300 000 à 450 000 morts confirmés, auxquels il faut ajouter les blessés graves qui ne retourneront jamais au combat. Si on applique le ratio historique d’un mort pour deux blessés graves, on arrive à un total de pertes irréversibles compris entre 900 000 et 1,35 million. Ces chiffres recoupent les estimations ukrainiennes. Bien sûr, il subsiste une marge d’incertitude. Peut-être que les Ukrainiens surestiment légèrement les pertes russes. Peut-être que certains soldats comptés comme tués sont en réalité blessés ou prisonniers.
Le silence russe
Face à ces chiffres accablants, le Kremlin maintient un silence obstiné. Comme nous l’avons vu, les derniers chiffres officiels remontent à septembre 2022, avec 5 937 morts annoncés. Depuis, plus rien. Ce silence n’est pas innocent. Il fait partie d’une stratégie délibérée visant à minimiser l’impact de la guerre sur la société russe. Si les Russes savaient que plus d’un million de leurs compatriotes ont été tués ou gravement blessés, la contestation pourrait émerger. Les familles pourraient se révolter. L’opinion publique pourrait basculer. Alors le gouvernement préfère taire les chiffres, contrôler l’information, maintenir l’illusion que tout va bien. Cette stratégie fonctionne, du moins pour l’instant. Les sondages d’opinion, bien que peu fiables dans un régime autoritaire, suggèrent que la majorité des Russes soutiennent encore la guerre, ou du moins ne s’y opposent pas ouvertement.
Certains observateurs occidentaux ont également émis des doutes sur les chiffres ukrainiens, les jugeant trop élevés. Ils soulignent que l’Ukraine a tout intérêt à gonfler les pertes russes pour maintenir le moral de sa population et obtenir davantage d’aide militaire de ses alliés. C’est un argument recevable. Mais il faut aussi considérer que les sources indépendantes, comme Mediazona ou les analyses d’excès de mortalité, confirment l’ordre de grandeur des pertes russes. De plus, les images satellites, les vidéos de drones, les témoignages de prisonniers de guerre, tout cela corrobore l’idée que la Russie subit des pertes massives. Peut-être que le chiffre exact n’est pas 1,2 million mais 1 million, ou 900 000. Mais quelle différence cela fait-il vraiment ? Dans tous les cas, nous parlons d’une hécatombe sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale.
Quand j’essaie d’imaginer l’avenir, je ne vois que du noir. Tous les scénarios sont mauvais. Soit la guerre continue indéfiniment, broyant des centaines de milliers de vies supplémentaires. Soit elle s’arrête sur un compromis bancal qui ne satisfera personne et préparera la prochaine guerre. Soit elle dégénère en conflit nucléaire et c’est la fin de tout. Je voudrais être optimiste, croire qu’une solution pacifique est possible. Mais je n’y arrive pas. Parce que tant que Poutine sera au pouvoir, tant que le Kremlin refusera d’admettre son échec, cette guerre continuera. Et des hommes continueront de mourir, par milliers, par dizaines de milliers, pour rien.
Les perspectives : jusqu'où ira cette folie ?
Une guerre sans fin en vue
Après 1405 jours de combats, rien n’indique que cette guerre touche à sa fin. Au contraire, tous les signaux suggèrent qu’elle va continuer, peut-être pendant des années encore. Vladimir Poutine, lors de sa conférence de presse annuelle en décembre 2025, n’a évoqué aucune perspective de paix. Il a parlé de victoire inévitable, de nécessité de poursuivre l’opération militaire spéciale, de défense des intérêts russes. Le ministre de la Défense Andreï Belooussov a présenté des plans pour agrandir encore l’armée, la porter à 1,5 million de soldats actifs. De nouveaux équipements sont commandés, de nouvelles unités sont formées, de nouvelles offensives sont planifiées. Tout indique que le Kremlin se prépare à une guerre longue, une guerre d’usure où la victoire reviendra à celui qui tiendra le plus longtemps.
Du côté ukrainien, la détermination reste intacte. Malgré trois ans de guerre, malgré les destructions, malgré les pertes, l’Ukraine refuse de capituler. Elle continue de se battre, soutenue par l’aide militaire occidentale. Les États-Unis, l’Union européenne, le Royaume-Uni fournissent des armes, des munitions, du matériel. Mais cette aide a ses limites. Les stocks occidentaux s’épuisent. La production industrielle peine à suivre le rythme de consommation de munitions. Et surtout, la lassitude commence à se faire sentir dans les opinions publiques occidentales. Combien de temps les Américains accepteront-ils de financer une guerre lointaine ? Combien de temps les Européens toléreront-ils les conséquences économiques des sanctions contre la Russie ? Ces questions sont cruciales. Parce que sans le soutien occidental, l’Ukraine ne pourra pas tenir indéfiniment face à une Russie qui mobilise toutes ses ressources pour la guerre.
Les scénarios possibles
Plusieurs scénarios sont envisageables pour l’avenir de ce conflit. Le premier, le plus optimiste pour l’Ukraine, serait une victoire militaire totale, avec la libération de tous les territoires occupés, y compris la Crimée. Mais ce scénario semble de plus en plus improbable. La Russie a fortifié ses positions, construit des lignes de défense en profondeur, miné des milliers de kilomètres carrés. Une offensive ukrainienne pour reprendre ces territoires coûterait des dizaines de milliers de vies et nécessiterait des quantités massives d’armes lourdes que l’Occident n’est pas prêt à fournir. Le deuxième scénario serait un gel du conflit, avec une ligne de front stabilisée et un cessez-le-feu de facto, sans accord de paix formel. C’est ce qui s’est passé après 2014 dans le Donbass. Mais ce scénario ne satisfait personne. L’Ukraine refuse d’abandonner ses territoires. La Russie veut continuer à avancer.
Le troisième scénario, le plus sombre, serait une escalade du conflit. La Russie pourrait utiliser des armes nucléaires tactiques, franchissant un tabou qui tient depuis 1945. Les conséquences seraient catastrophiques, non seulement pour l’Ukraine mais pour le monde entier. L’OTAN pourrait être contrainte d’intervenir directement, transformant une guerre régionale en conflit mondial. Personne ne souhaite ce scénario, mais il ne peut être totalement exclu tant que Poutine reste au pouvoir et que la Russie continue de subir des revers militaires. Le quatrième scénario serait un effondrement interne de la Russie. Les pertes militaires, les sanctions économiques, les tensions sociales pourraient finir par provoquer une crise politique à Moscou. Un coup d’État, une révolution, une guerre civile même. Ce scénario est également peu probable à court terme, mais il devient plus plausible à mesure que la guerre s’éternise et que les coûts s’accumulent.
Je termine cet article avec un sentiment de rage et d’impuissance. Rage contre ceux qui ont déclenché cette guerre, contre ceux qui la perpétuent, contre ceux qui envoient des hommes mourir pour rien. Impuissance parce que je sais que mes mots ne changeront rien. Que demain, après-demain, dans un mois, dans un an, des soldats continueront de mourir dans les champs boueux d’Ukraine. Que les chiffres continueront d’augmenter. Que les familles continueront de pleurer. Et que le monde continuera de tourner, indifférent à cette tragédie qui se joue sous nos yeux. Mais je continuerai d’écrire. Parce que c’est tout ce que je peux faire. Témoigner. Documenter. Refuser l’oubli.
Conclusion : le prix du sang que personne ne veut compter
Un bilan qui dépasse l’entendement
1 205 690 soldats russes éliminés. Ce chiffre, publié le 29 décembre 2025 par l’État-major ukrainien, résume à lui seul l’ampleur du désastre. Plus d’un million de vies sacrifiées en moins de quatre ans pour une guerre qui n’aurait jamais dû avoir lieu. Des fils, des pères, des frères, des maris, rayés de la carte pour satisfaire l’ego d’un homme et les ambitions impériales d’un régime. Et le plus terrifiant, c’est que ce chiffre continue d’augmenter chaque jour. 1 180 soldats tués rien que le 28 décembre. Mille cent quatre-vingts. En une seule journée. C’est l’équivalent d’un bataillon entier qui disparaît quotidiennement. Et pendant ce temps, à Moscou, dans les bureaux feutrés du Kremlin, on continue de parler d’opération militaire spéciale, de dénazification, de protection des populations russophones. Comme si les mots pouvaient masquer la réalité du carnage. Comme si le mensonge répété mille fois pouvait devenir vérité.
Ces pertes dépassent tout ce que le monde a connu depuis la Seconde Guerre mondiale. Elles sont supérieures aux pertes italiennes, hongroises, japonaises durant tout le conflit mondial. Elles approchent les pertes allemandes. Seule l’Union soviétique, avec ses 8,5 millions de morts militaires, a connu un bilan plus lourd. Et encore, ces chiffres concernaient une guerre de six ans impliquant des dizaines de millions de combattants sur plusieurs continents. La Russie, elle, a réussi l’exploit macabre d’atteindre de tels niveaux en moins de quatre ans, dans un conflit régional. C’est proprement hallucinant. Et ce qui l’est encore plus, c’est l’indifférence apparente du régime face à cette hécatombe. Pas de deuil national, pas de commémoration, pas même une reconnaissance officielle. Juste le silence. Un silence pesant, oppressant, qui pèse sur les familles endeuillées, sur les régions vidées de leurs hommes, sur tout un pays qui fait semblant de ne rien voir.
L’héritage d’une génération perdue
Cette guerre laissera des cicatrices profondes dans la société russe. Une génération entière d’hommes a été décimée. Dans certaines régions, particulièrement en Bouriatie, au Daghestan, dans les zones rurales de Sibérie, presque toutes les familles ont perdu un proche. Les cimetières débordent de tombes fraîches. Les écoles manquent d’enseignants masculins. Les entreprises peinent à recruter. Et ce vide ne se comblera pas de sitôt. Il faudra des décennies pour que la démographie russe se remette de ce choc. Mais au-delà des chiffres, il y a aussi le traumatisme psychologique. Des centaines de milliers de soldats reviendront du front avec des blessures invisibles : stress post-traumatique, dépression, addictions. Ils auront du mal à se réinsérer dans la société civile, à retrouver un emploi, à reconstruire leur vie. Certains deviendront violents, incapables de gérer leurs émotions. D’autres sombrerront dans l’alcoolisme ou la drogue.
Mais le plus tragique dans tout cela, c’est que ces sacrifices n’ont servi à rien. La Russie n’a gagné que quelques milliers de kilomètres carrés de terres dévastées, de villages en ruines, de champs minés. Elle n’a conquis aucune ville importante, aucun port stratégique, aucune ressource vitale. Elle a juste avancé, lentement, péniblement, au prix d’un océan de sang. Et pour quoi ? Pour satisfaire l’orgueil d’un dictateur vieillissant qui refuse d’admettre son échec. Pour maintenir l’illusion de la grandeur russe. Pour prouver au monde que la Russie est encore une puissance avec laquelle il faut compter. Mais à quel prix ? Un million de morts, une économie exsangue, une société traumatisée, un pays isolé sur la scène internationale. Est-ce que ça en valait la peine ? La réponse est évidente. Non. Mille fois non. Cette guerre est une tragédie absolue, un gâchis humain sans précédent, une folie collective dont les conséquences se feront sentir pendant des générations.
Pour que ces hommes, ces 1,2 million de vies brisées, ne soient pas juste des statistiques. Pour qu’on se souvienne qu’ils ont existé, qu’ils ont souffert, qu’ils sont morts. Et pour qu’un jour, peut-être, on se demande enfin : comment avons-nous pu laisser faire ça ? Comment avons-nous pu rester silencieux face à cette hécatombe ? Comment avons-nous pu continuer à vivre normalement pendant qu’un million d’hommes mouraient à quelques milliers de kilomètres de chez nous ? Ces questions me hantent. Elles devraient nous hanter tous. Parce que cette guerre n’est pas seulement une tragédie russe ou ukrainienne. C’est une tragédie humaine. Et nous en sommes tous, d’une certaine manière, complices par notre silence, notre indifférence, notre incapacité à agir. Alors oui, je continuerai d’écrire. Je continuerai de compter les morts. Je continuerai de témoigner. Parce que c’est la seule chose qui me reste. La seule façon de ne pas devenir complice de l’oubli.
Sources
Sources primaires
État-major des Forces armées ukrainiennes, rapport quotidien sur les pertes russes, publié le 29 décembre 2025. Defense Express, « 1405 Days of russia-Ukraine War – russian Casualties in Ukraine », publié le 29 décembre 2025. Mediazona en collaboration avec BBC Russian Service, « Russian losses in the war with Ukraine », mis à jour le 19 décembre 2025. Ministère de la Défense ukrainien, communiqués officiels, décembre 2025.
Sources secondaires
Zona Media, « Les pertes russes dans la guerre contre l’Ukraine. Le Kremlin cache — Mediazona atteste », publié le 19 décembre 2025. The Moscow Times, « Verified Russian Deaths in Ukraine War Surpass 150K », publié le 29 novembre 2025. Institute for the Study of War (ISW), « Russian Offensive Campaign Assessment », rapports de décembre 2025. Ukrinform, « Russia’s war casualty toll in Ukraine up by 1,180 over past day », publié le 29 décembre 2025. Mezha.net, « Russian Military Losses Update December 2025 », publié en décembre 2025.
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